Au royaume des séries, peu peuvent se targuer de susciter tant d'émoi. Dès ce 16 novembre, l'ultime saison de The Crown sera disponible sur Netflix. Une dernière révérence après sept années d'un succès impérial. Alors que les batailles pour le Trône de fer enflammaient les fans de Game of Thrones, la couronne d'Angleterre avait, à la surprise générale, su tirer son épingle du jeu, réinventant le genre du biopic. Avec un grand succès dès la diffusion en 2016 de la première saison, qui raconte l'accession surprise au trône d'une Élisabeth âgée de seulement 25 ans, à la mort de son père adoré Georges VI en 1952. Le dernier chapitre aborde la période courant de 1997 à 2005, s'inscrivant encore plus dans le réel.

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Loin de célébrer la monarchie anglaise, ce drama royal a donné au public le pouvoir de pénétrer les couloirs de Buckingham Palace pour voir défiler un pan de l'Histoire, et observer celle des têtes couronnées à travers le trou de leur serrure dorée. « Ça a rendu la famille royale plus réelle et, au fil des saisons, donné vie à des moments dont mes grands-parents m'ont parlé, en particulier autour de la guerre », confie Becky, une Londonienne. Entre réalité historique et trouvailles scénaristiques, la série a même fait trembler les murs du palais, provoquant polémiques et foudres jusqu'aux sommets.

N'en déplaise à l'ancien Premier ministre Tony Blair, qui a qualifié la série de « déchet complet et absolu », celle-ci persiste et signe donc pour une sixième saison découpée en deux parties. La première, objet de toutes les discussions, se concentre sur l'idylle entre Diana et Dodi Al-Fayed suivie de leur mort tragique dans le tunnel du pont de l'Alma, à Paris. Un épisode qui sera scruté à la loupe par les fans. « C'est un moment très émouvant de l'histoire, dans le monde entier, mais surtout pour les Londoniens », souligne encore Becky. Mais si le fantôme de la princesse des cœurs hante au sens propre ce final - un épisode la fait apparaître après sa mort dans un dialogue intérieur avec le prince Charles -, il en est un autre qui plane sur les derniers instants du show. Tournée au lendemain du décès d'Élisabeth II, la dernière salve d'épisodes est marquée par cette disparition qui a bouleversé, en plus du monde entier, les plans du créateur de la série. Face à l'émotion née des funérailles, Peter Morgan a dû revoir sa copie et modifier la fin préalablement écrite, afin de traiter la mort de la reine sans l'aborder frontalement.

L'ombre écrasante de celle dont on a suivi l'ascension à l'écran dans le même temps que sa véritable fin de règne se laisse d'ailleurs entrevoir dès le premier teaser de cette saison 6. « La couronne est un symbole de permanence », y déclare Claire Foy (l'Élisabeth II des deux premières saisons) avant que ne résonne « une partie de nous est perdue, c'est toujours ainsi » dans la voix d'Olivia Colman (Queen Elizabeth version 1964 à 1990). Si pour Anaïs, Française vivant à Londres depuis dix ans, « The Crown pourrait continuer à vivre sans la reine, même si c'est un personnage central », les Anglais ont, selon elle, d'autres préoccupations que la monarchie. « C'est vraiment la crise en Angleterre. Le contraste entre la splendeur de la Couronne et le manque d'argent des citoyens complique les relations. »

La date de diffusion de cette nouvelle saison de The Crown tombe au plus mal pour le nouveau roi, Charles III. Elle convoque un passé révolu et peu glorieux pour lui, au moment où il doit s'imposer dans les traces de sa mère, phare de quatre générations de Britanniques. Alors qu'il a clôturé son tout premier King's Speech sous les huées ce 7 novembre, la série le ramène aux années Diana et à son attitude ambiguë à l'époque, tantôt fragile au regard de ses responsabilités, tantôt machiavélique face à sa première épouse. Elle le montre, comme l'a résumé Dominic West, l'acteur qui interprète le souverain, « au pire moment de sa vie ». ■