Migrants : Trump tente de désamorcer la crise dans la confusion

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Migrants: l'ordre de trump seme la confusion[reuters.com]
(Crédits : Leah Millis)

par Richard Cowan et Steve Holland

WASHINGTON/MCALLEN, Texas (Reuters) - Donald Trump a ordonné jeudi à l'administration américaine de réunir les familles de migrants dont les parents et les enfants ont été séparés à leur arrivée aux Etats-Unis, mais ses efforts pour revenir sur une politique qui a suscité un tollé mondial s'opèrent dans la confusion.

Malgré l'ordre du président des Etats-Unis, on ne sait ni comment ni quand les quelque 2.300 mineurs qui ont été séparés de leurs parents au cours des dernières semaines seront réunis avec eux. On ne sait pas non plus où seront les familles le temps que les parents soient poursuivis au pénal.

On ne sait pas non plus si le gouvernement continuera à poursuivre les personnes prises en flagrant-délit de traversée illégale de la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis.

Les procureurs ont certes déclaré qu'ils ne rejetteraient aucune affaire, mais certaines audiences jeudi n'ont pas eu lieu. A McAllen, au Texas, 17 migrants ont été informés par leurs avocats que leurs dossiers ne se seraient pas traités pour l'instant.

Par ailleurs, le gouvernement a demandé à l'armée américaine de se préparer à accueillir dans des bases militaires jusqu'à 20.000 enfants de migrants non accompagnés, a indiqué le porte-parole du Pentagone, Jamie Davis.

Des vidéos montrant des enfants séparés de leurs parents assis dans des cages et un enregistrement sonore d'enfants en pleurs, symboles de la politique d'immigration de "tolérance zéro" mise en place par le gouvernement Trump, a suscité l'indignation dans de nombreux pays

Face à cette vague de critiques et sur l'insistance de ses proches, et notmament de son épouse Melania Trump, le président a fait marche arrière et signé un décret mercredi pour maintenir les familles ensemble en détention dans l'attente du règlement de leur dossier.

"JE M'EN FICHE COMPLÈTEMENT"

Jeudi, la première dame a rendu une visite impromptue à des enfants déplacés à McAllen, dans une structure où sont logés 55 mineurs âgés de 12 à 17 ans. Six d'entre eux ont été séparés de leurs parents au moment où ils franchissaient la frontière, a-t-on expliqué aux journalistes.

Mais la veste Zara vert olive portée par Melania Trump à son départ pour le Texas dont le dos portait les mots : "Je m'en fiche complètement, et vous?" est apparue en contradiction avec l'image de compassion qu'elle voulait donner.

La veste n'était plus visite lors de la visite au centre d'hébergement.

La Maison blanche a répondu aux critiques en disant qu'il n'y avait pas de message caché. "C'est une veste", a déclaré Stephanie Grisham, la porte-parole de Melania Trump. "Après la visite importante d'aujourd'hui au Texas, j'espère que les médias ne vont pas choisir de se concentrer sur sa garde-robe."

Pour mettre en pratique la réunification des familles, le ministère de la Justice a demandé que soit modifiée une jurisprudence de 1997 qui était interprétée comme fixant une limite de 20 jours à la détention des enfants entrés illégalement dans le pays.

Lors d'une réunion à la Maison blanche, Donald Trump a déclaré qu'il ne voulait pas séparer les enfants de leurs parents et a ordonné aux ministères de la Justice, de la Sécurité intérieure et de la Santé et des Services sociaux de "travailler ensemble pour garder ensemble les membres des familles d'immigrants illégaux durant le processus d'immigration et de réunir les groupes précédemment séparés."

UNE LOI D'ENSEMBLE

L'administration Trump a précisé que le décret de mercredi interdisant la séparation des familles ne mettait pas pour autant fin à la politique de tolérance zéro mise en place il y a un peu plus de deux mois et qui prévoit des poursuites contre les migrants qui passent illégalement la frontière.

La Patrouille de surveillance de la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique continuera de transférer aux services judiciaires les adultes pris en train de traverser illégalement la frontière, a déclaré jeudi un porte-parole de l'Office des douanes et de la protection des frontières.

"L'unité familiale sera maintenue pour les familles appréhendées traversant illégalement la frontière, et elles seront transférées ensemble au Service des douanes et de l'immigration", a indiqué le porte-parole dans un communiqué.

L'administration Trump souhaite également que la question de l'immigration soit réglée par une loi d'ensemble. Mais la Chambre des représentants, où les républicains de Trump sont majoritaires, a rejeté jeudi une proposition de loi soutenue par les plus conservateurs.

En outre, la Chambre a reporté à deux reprises, d'abord à vendredi puis à une date ultérieure, vraisemblablement la semaine prochaine, un vote sur une seconde proposition de loi, dite de compromis, afin d'essayer de rassembler plus de soutiens dans le camp républicain.

Les deux propositions de loi, appuyées par Trump, prévoient un financement du mur que le président dit vouloir faire construire le long de la frontière avec le Mexique.

Mais, le texte dit de compromis ouvre la possibilité aux Dreamers, ces migrants entrés clandestinement aux Etats-Unis alors qu'ils étaient mineurs, d'obtenir la nationalité américaine, ce qui n'était pas le cas de la proposition la plus conservatrice.

(Avec Tim Ahmann, Amanda Becker, James Oliphant et Yeganeh Torbati à Washington et Mitchell Ferman à McAllen, Texas; Danielle Rouquié pour le service français)