France : Macron appelle le nouveau gouvernement à des "transformations profondes"

reuters.com  |   |  1172  mots
France: macron appelle le nouveau gouvernement a des transformations profondes[reuters.com]
(Crédits : Benoit Tessier)

par Myriam Rivet et Sophie Louet

PARIS (Reuters) - Emmanuel Macron a exhorté lundi les membres de la nouvelle équipe d'Elisabeth Borne à des "transformations profondes" pour garantir à la France son "indépendance" et aux Français des "progrès", prenant acte de "l'absence de volonté" des partis de gouvernement de nouer un accord.

Deux semaines après le revers du camp présidentiel aux élections législatives, le gouvernement "Borne 2" est entré en fonction lundi avec la délicate mission de mener les réformes ambitieuses voulues par le chef de l'Etat par-delà les clivages d'une Assemblée nationale fragmentée.

Lors d'un premier conseil des ministres, Emmanuel Macron a appelé à des "compromis exigeants".

"La situation politique du pays impose au gouvernement beaucoup de volontarisme, d'ambition. (...) Dans ce contexte, vous aurez d'abord à tenir dans ce contexte de guerre, qui change en profondeur beaucoup de choses, et je pense que ça n'a pas été suffisamment intégré dans le débat public français", a-t-i dit en évoquant le conflit ukrainien.

Le baptême du feu politique d'Elisabeth Borne aura lieu mercredi à l'Assemblée nationale, où elle prononcera son discours de politique générale. Elle ne sollicitera pas de vote de confiance, qui est une tradition, non une obligation, a confirmé le nouveau porte-parole du gouvernement, Olivier Véran qui remplace Olivia Grégoire.

Accusant la Première ministre de "maltraite(r) la démocratie", Mathilde Panot, cheffe de file des députés de La France insoumise, composante de l'alliance de gauche Nupes, a annoncé sur Twitter le dépôt d'une motion de censure mercredi.

La nouvelle équipe de 41 membres n'a rien de la coalition élargie que les appels au dépassement et au rassemblement d'Emmanuel Macron auraient pu laisser augurer. Pas de débauchage spectaculaire non plus - le nom de Yannick Jadot, candidat Europe Ecologie-Les Verts (EELV) à la présidentielle, a un temps circulé pour la Transition écologique -, l'exercice tenant plus du remaniement interne.

L'ex-candidate à la présidentielle Marine Le Pen, désormais chef de file des députés Rassemblement national, a déploré sur Twitter que le chef de l'Etat "ignore (...) une nouvelle fois le verdict des urnes et la volonté des Français d'une autre politique".

Des élus de la Nupes raillent quant à eux un gouvernement "Titanic", une "Macronie rabougrie", "le dernier quarteron des macronistes radicalisés", un "fruit pourri dont le noyau lutte pour sa survie".

UN PROCHE D'EDOUARD PHILIPPE À L'ÉCOLOGIE

Damien Abad, visé par une plainte pour tentative de viol et de nouveau mis en cause lundi par une quatrième jeune femme sur BFM TV, est écarté du gouvernement. Il a dénoncé des "calomnies ignobles" lors de la passation de pouvoirs. [nL8N2YL36O]. Il est remplacé au ministère des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées par Jean-Christophe Combe, jusqu'ici directeur général de la Croix-Rouge.

Visée par trois plaintes pour viol dans ses fonctions passées de gynécologue, Chrysoula Zacharopoulou reste pour sa part chargée du Développement, de la Francophonie et des Partenariats internationaux.

Les trois ministres battues aux élections législatives sont remplacées, selon la règle édictée par l'Elysée en 2017.

Un proche d'Edouard Philippe, Christophe Béchu, est promu à la Transition écologique à la place d'Amélie de Montchalin. Un signe d'apaisement politique adressé à l'ancien Premier ministre du premier quinquennat d'Emmanuel Macron, dont le groupe "Horizons" à l'Assemblée nationale sera une force d'appoint pour l'exécutif.

Le maire d'Angers, qui avait quitté Les Républicains en 2017, avait fait son entrée dans l'équipe Borne le 20 mai au poste de ministre délégué aux Collectivités territoriales.

Brigitte Bourguignon est remplacée à la Santé par François Braun, président de Samu-Urgences de France, artisan de la "mission flash" sur les services d'urgence diligentée par le gouvernement. Il s'est engagé à rénover un système "à bout de souffle".

Justine Benin, secrétaire d'Etat à la Mer, est remplacée par le député "macroniste" Hervé Berville.

Jean-François Carenco, actuel président de la Commission de régulation de l'énergie et ancien préfet d'Ile-de-France, remplace Yaël Braun-Pivet, élue présidente de l'Assemblée nationale, aux Outre-Mer, domaine rattaché au ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin qui voit ainsi son périmètre élargi.

LAURENCE BOONE AUX AFFAIRES EUROPÉENNES

Face à un vivier de candidats s'épuisant pour la Macronie, l'exécutif a renoué avec le jeu des chaises musicales.

Olivia Grégoire, qui laisse donc la responsabilité de porte-parole à Olivier Véran, est ainsi nommée à Bercy, chargée des PME, du Commerce, de l'Artisanat.

C'est le ministre du Commerce Franck Riester qui hérite du portefeuille des Relations avec le Parlement, poste-clé pour la suite du deuxième mandat d'Emmanuel Macron, contraint à des alliances parlementaires pour faire aboutir des textes phares comme celui sur le pouvoir d'achat, en l'absence de majorité absolue à l'Assemblée.

"Marcheur" de la première heure, le député Roland Lescure est nommé ministre délégué à l'Industrie.

Au nombre des mutations inattendues, Clément Beaune quitte les Affaires européennes pour les Transports.

C'est Laurence Boone qui assumera ses fonctions passées, au grade de secrétaire d'Etat. Cette économiste, ex-secrétaire générale adjointe de l'OCDE, succéda à Emmanuel Macron au poste de conseillère économique du président socialiste François Hollande de 2014 à 2016.

L'ancienne sénatrice de droite Caroline Cayeux, qui avait quitté Les Républicains en 2018 et signé en novembre 2021 une tribune appelant à un second mandat d'Emmanuel Macron, fait son entrée aux Collectivités territoriales.

Des figures de l'ancien quinquennat font leur retour.

Marlène Schiappa, ancienne ministre chargée de la Citoyenneté auprès du ministre de l'Intérieur, est nommée à l'Economie solidaire et sociale et à la Vie associative.

Le Mouvement démocrate (MoDem) de François Bayrou, qui s'estimait peu loti avec la seule nomination de Marc Fesneau (Agriculture) dans le cabinet "Borne 1", voit sa représentativité élargie avec trois recrues supplémentaires.

Geneviève Darrieussecq (ex-secrétaire d'Etat aux Anciens combattants dans le précédent quinquennat) est nommée au pôle Santé (Personnes handicapées). Sarah El Haïry (chargée de la Jeunesse et de l'Engagement dans le gouvernement de Jean Castex) est désormais à la Jeunesse et au Service national universel.

Député MoDem des Yvelines, Jean-Noël Barrot, fils de Jacques Barrot, économiste multi-diplômé, sera chargé de la Transition numérique et des Télécommunications.

Plusieurs élus de terrain, rompus aux pratiques législatives, font ainsi leur entrée, avec l'objectif de former des "majorités de projet" dans leurs domaines, à l'instar du député "Agir" (le parti de Franck Riester intégré dans la confédération présidentielle "Renaissance") Olivier Becht, qui officiera au Commerce extérieur.

Un transfuge du Parti socialiste, le maire de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) Olivier Klein, est nommé à la Ville et au Logement.

(Myriam Rivet et Sophie Louet, édité par Bertrand Boucey)