La Cour européenne des droits de l'Homme examine pour la première fois des plaintes pour inaction contre le changement climatique

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Le batiment de la cour europeenne des droits de l'homme est vu avant le debut d'une audience a strasbourg[reuters.com]
(Crédits : Vincent Kessler)

par Emma Farge

STRASBOURG (Reuters) - La Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a examiné pour la première fois mercredi une plainte visant un Etat pour son inaction face au changement climatique, déposée par des retraitées suisses contre leur gouvernement.

L'association "Les Aînées pour la protection du climat suisse", qui compte plus de 2.000 membres, accuse Berne de violer les droits des femmes âgées, dont leur droit à la vie, celles-ci étant "particulièrement vulnérables" aux conséquences du changement climatique, notamment pendant les canicules.

La CEDH, basée à Strasbourg, doit aussi examiner mercredi après-midi la plainte de l'ancien maire de Grande-Synthe (Nord), Damien Carême, qui accuse l'Etat français de porter atteinte au droit à la vie des habitants de la commune menacée par la montée du niveau de la mer, après avoir déjà obtenu sa condamnation par le Conseil d'Etat français pour non respect de ses propres objectifs en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Les avocats de l'association suisse comme de Damien Carême espèrent que les jugements de la CEDH - qui seront rendus à une date ultérieure - contraindront leurs gouvernements respectifs à réduire la courbe de leurs émissions de CO2 à un rythme plus rapide que l'objectif qu'ils se sont fixés.

Plusieurs dizaines de retraitées suisses avaient effectué le déplacement à Strasbourg mercredi matin, accompagnées par des militants pour le climat et des activistes de Greenpeace, qui soutient leur démarche.

Bruna Molinari, âgée de 81 ans et souffrant d'asthme qui s'aggrave selon elle pendant les vagues de chaleur, a dit à Reuters son espoir mais aussi sa nervosité face à l'enjeu de cette action judiciaire.

"En tant que grand-mère et que mère, je pense que mes enfants et petits-enfants ont droit à un climat meilleur que celui que nous avons aujourd'hui", a-t-elle expliqué.

Stefanie Brander, membre des "Aînées pour la protection du climat suisse", a souligné pour sa part que le gouvernement helvétique risquait de payer les conséquences de ne pas avoir pris assez au sérieux les demandes de l'association.

"On nous a pris pour de vieilles dames qui n'ont pas des idées très claires sur ces sujets... et je crois que ça pourrait se retourner contre eux", a-t-elle dit à l'entrée de la salle d'audience.

Les retraitées ont été déboutées à deux reprises par les tribunaux suisses, qui ont jugé leur plainte non recevable, depuis qu'elles ont intenté leur action il y a six ans.

Le représentant de l'Etat suisse, Alain Chablais, a dit mercredi à la Cour qu'elle outrepasserait ses fonctions en imposant à Berne des mesures contraignantes d'ordre "quasi-législatif".

(Reportage d'Emma Farge, version française Tangi Salaün, édité par Blandine Hénault)