Journalistes et défenseurs de droits menacés au Soudan du Sud, dit l'Onu

reuters.com  |   |  587  mots

par Denis Dumo

JUBA (Reuters) - Des journalistes et des militants des droits de l'homme ont été tués ou arrêtés au Soudan du Sud entre 2016 et 2017 et le gouvernement a contraint nombre de journaux à mettre la clef sur la porte, rendant ainsi difficile la couverture de l'une des plus graves crises humanitaires au monde, a dit jeudi l'Onu.

La mission des Nations unies au Soudan du Sud (MINUSS) précise dans un rapport qu'un total de 102 journalistes et de militants des droits de l'homme ont été empêchés de s'exprimer librement entre juillet 2016 et décembre 2017.

Parmi les cas répertoriés par l'Onu figurent deux morts de journalistes, 58 arrestations ou détentions arbitraires de journalistes ou de militants, 16 personnes renvoyées de leur travail, la fermeture, définitive ou temporaire, de trois organes de presse et la censure d'articles, que ce soit dans la presse écrite ou sur des sites internet.

Le gouvernement refuse en outre régulièrement d'accorder des visas à des correspondants étrangers, poursuit l'Onu.

"Nous nous inquiétons grandement des restrictions imposées aux médias, notamment les vastes pouvoirs accordés aux services de sécurité nationaux en termes de surveillance, d'arrestations et de détentions, et le fait que certains de ses officiers ont été incorporés à des maisons d'édition de journaux", a dit David Shearer, à la tête de la MINUSS, lors d'une conférence de presse.

"Cela a conduit à une situation d'auto-censure grandissante."

Réagissant aux propos de l'Onu, un porte-parole du président du Soudan du Sud Salva Kiir a dit : "La sécurité nationale n'intervient pas dans le travail des journalistes. Les autorités des médias ont le pouvoir d'examiner le travail de n'importe quel journaliste. La sécurité nationale n'a jamais empêché un journaliste ou un média de faire son travail dans le Soudan du Sud."

"En tant que gouvernement, nous reconnaissons la liberté d'expression des citoyens et de toute personne accréditée", a-t-il ajouté.

LA MOITIÉ DE LA POPULATION A BESOIN D'AIDE

Le pays a basculé dans la guerre civile à la fin 2013, deux ans après avoir obtenu son indépendance du Soudan.

Le conflit, né d'un différend entre le président Salva Kiir, un Dinka, et son vice-président de l'époque, Riek Machar, membre de l'ethnie Nuer, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts et entraîné des déplacements massifs de population.

Un cessez-le-feu signé le 21 décembre à Addis-Abeba a pour objectif de restaurer une trêve conclue en 2015, qui avait volé en éclats un an plus tard en raison de violents combats à Juba, la capitale. Depuis, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont dénoncé des violations du cessez-le-feu.

Dans son rapport, la MINUSS dit n'avoir pu vérifier les violations que dans les zones contrôlées par les forces gouvernementales, notant que l'insécurité une restriction des déplacements compliquaient son travail dans celles aux mains de l'opposition.

Les rebelles du SPLA-IO, fidèles à Riek Machar, ont assuré ne pas empêcher les journalistes de faire leur travail.

"Nous n'imposons pas de restrictions. Nous avons donné accès à des journalistes aux fronts où nous opérons. Ils se rendent dans nos camps de déplacés, dans les zones que nous contrôlons. C'est dans le territoire gouvernemental que les gens ont peur de parler aux membres de leurs propres familles", a dit un porte-parole du SPLA-IO.

(Benoit Van Overstraeten pour le service français, édité par Arthur Connan)