L'Italie choisit la confrontation avec l'UE sur le budget

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L'italie maintient ses previsions cles dans son nouveau budget 2019[reuters.com]
(Crédits : Maxim Shemetov)

par Jan Strupczewski

BRUXELLES (Reuters) - L'Italie a soumis à la Commission européenne un nouveau projet de budget 2019 comportant les mêmes hypothèses de croissance et de déficit que le précédent, avec des projections seulement amendées pour la dette publique.

La révision en baisse des prévisions de la dette, grâce à la promesse de revenus de privatisation équivalant à 1% du produit intérieur brut, vise à répondre aux réserves principales exprimées par la Commission pour motiver son rejet d'une première mouture du budget le mois dernier - à savoir que l'Italie doit réduire la trajectoire de sa dette conformément aux règles européennes.

Mais le projet révisé maintient la projection d'une hausse de 0,8 point de PIB du déficit structurel l'an prochain - autrement dit hors effets conjoncturels - au lieu de la baisse de 0,6 point requise par les règles européennes.

Ce point, avec le maintien également d'hypothèses de croissance jugées trop optimistes par Bruxelles, ouvre la voie à une confrontation avec la Commission, qui rendra un avis le 21 novembre.

"Le gouvernement italien a revu à la hausse son programme de privatisation et s'est engagé à limiter les dépassements de dépenses, mais il n'a pas modifié ses objectifs de déficit. Cela va probablement amener la Commission européenne à recommander l'ouverture d'une procédure de déficit excessif", commente Daniele Antonucci, économiste chez Morgan Stanley.

Les règles européennes imposent aux pays fortement endettés, comme l'est l'Italie, de réduire d'année en année leur déficit structurel et leur endettement.

En réponse, Rome a revu à la baisse ses projections pour la dette qui devrait représenter 129,2% du PIB en 2019, 127,3% en 2020 et 126,0% en 2021, contre 130,9% attendu cette année.

Dans ses prévisions publiées la semaine dernière, la Commission européenne situe le ratio dette/PIB de l'Italie à 131,1% cette année et ne le voit pas diminuer sensiblement en 2019.

DES HYPOTHÈSES DE CROISSANCE OPTIMISTES

Le nouveau projet de budget reprend les hypothèses de croissance du précédent (+1,5% en 2019, +1,6% en 2020 et +1,4% en 2021), pourtant jugées trop optimistes par Bruxelles et par le Fonds monétaire international (FMI). La Commission anticipe une croissance de 1,2% en Italie l'année prochaine et le FMI est encore plus pessimiste avec une prévision de 1,0%.

Il confirme aussi l'objectif d'un déficit budgétaire de 2,4% en 2019 contre 1,8% attendu cette année, le gouvernement de coalition entendant ainsi financer ses promesses électorales.

La CE estime que la croissance plus faible qu'escompté et la hausse des coûts de financement porteront le déficit à 2,9% en 2019 et à 3,1% en 2020, au-delà de la limite de 3% fixée par le Pacte de stabilité et de croissance.

"On anticipe un déficit à environ 2,5% du PIB sur les trois prochaines années, avec une croissance plus faible. La dette publique ne baissera probablement pas avant 2019-2021", juge Daniele Antonucci. "Le budget de relance aura probablement des effets bénéfiques sur la consommation mais le résultat sera insuffisant pour améliorer la situation des finances publiques."

Pour Jon Day, gérant obligataire chez Newton Investment Management, le gouvernement italien court un risque important en augmentant ses besoins de financement au moment même où l'arrêt imminent du programme d'achats d'actifs de la Banque centrale européenne le rend plus dépendant des investissements privés.

"Le marché (obligataire) devra probablement trouver 30 à 40 milliards d'euros supplémentaires en 2019 pour que l'Italie reste perçue comme intégralement financée", estime-t-il.

(Véronique Tison pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat)