2022, année record pour l'emploi des cadres malgré la guerre en Ukraine, prévoit l'APEC

L'Association pour l'emploi des cadres (APEC) anticipe plus de 282.000 recrutements de cadres en 2022 avec un marché de l'emploi très dynamique. « La reprise de 2021 joue encore à plein en 2022 », explique l'organisation. En revanche, les cadres sont particulièrement angoissés par l'inflation. La hausse galopante des prix pourrait les amener à être plus exigeants en matière de rémunération, prévient l'Apec. Pour 2023, en revanche, l'institution de placement paritaire juge qu'il est trop tôt pour faire des prévisions.
Grégoire Normand
(Crédits : Reuters)

L'horizon économique s'assombrit en France. Entre la crise énergétique, l'inflation galopante et une croissance en berne, la plupart des indicateurs passent au rouge les uns après les autres. Après deux ans et demi de pandémie et huit mois après l'éclatement de la guerre en Ukraine, la plupart des instituts de prévision ont révisé à la baisse leurs perspectives pour les mois à venir.

Malgré ce contexte troublé, l'emploi des cadres se porte très bien. « La dynamique de l'emploi cadre reste soutenue », a déclaré Lætitia Niaudeau, la directrice générale adjointe de l'association lors d'un point presse lundi 7 novembre. « L'année 2022 sera peut être un année record en matière de recrutement des cadres », a-t-elle ajouté lors de la présentation du dernier baromètre de l'APEC portant sur le dernier trimestre de l'année. « Le chiffre record de 2019 pourrait être atteint, voire dépassé ». Au printemps, l'association avait tiré la sonnette d'alarme sur les conséquences de la guerre en Ukraine sur le marché du travail des cadres. Depuis, ses projections ont bien changé, révélant des difficultés pour établir des chiffres relativement solides.

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282.000 recrutements prévus sur l'ensemble de l'année 2022

Après le plongeon historique de 2020 marqué par la pandémie et le rebond spectaculaire de 2021, l'APEC table sur 282.000 embauches sur 2022, soit un niveau légèrement supérieur à 2019. Avant la crise sanitaire, les entreprises avaient déjà massivement embauché des cadres (281.000). La crise sanitaire avait marqué un coup d'arrêt brutal dans les embauches après plusieurs années consécutives en hausse.

Sans surprise, l'année 2021 a enregistré un pic de recrutements. La poursuite de cette dynamique s'explique par « un acquis de croissance que l'on ressent encore en 2022, poursuit la directrice. L' effet de la reprise en 2021 joue encore à plein en 2022. Les entreprises ont privilégié l'action à l'attentisme. Pour l'instant, l'investissement des entreprises tient ».

Au dernier trimestre, la dynamique est particulièrement visible dans les grandes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire (ETI). 62% d'entre elles envisagent de recruter, un niveau en progression par rapport au T2 (58%) et au T3 (54%). Ce phénomène est également à l'œuvre dans les PME puisque 19% d'entre elles envisagent d'embaucher en fin d'année contre 15% lors des deux trimestres précédents.

« La situation reste favorable aux cadres », résument les auteurs de l'enquête. Actuellement, les entreprises sont à l'affût de ce type de profil. En effet, plus d'un tiers des cadres affirment qu'ils ont été contactés par des cabinets de recrutement au troisième trimestre 2022, soit une hausse de 5 points par rapport à la même période en 2021 et de 15 points par rapport au T3 2022.

Des tensions en Occitanie et en Auvergne-Rhône Alpes

Les difficultés de recrutement ont entraîné des conséquences particulièrement néfastes dans certaines régions et certains secteurs. « Ces difficultés s'intensifient », selon le responsable adjoint des études Gaël Bouron. Si aucun territoire n'est épargné par ces obstacles, certaines régions sont en proie à plus de difficultés que d'autres.

D'après le dernier baromètre de l'Apec, l'Occitanie, l'Auvergne-Rhône Alpes et la Bretagne sont les trois premières régions concernées par ce manque d'appariement entre l'offre et la demande de main-d'œuvre. « L'Occitanie se démarque car une grande partie des recrutements concerne des métiers en études et recherche et développement », ajoute Gaël Bouron.

A l'opposé, l'Île-de-France demeure relativement épargnée par ces tensions. « Les forts besoins en compétences cadres des entreprises franciliennes et les difficultés qu'elles peuvent rencontrer sont en partie amortis par une concentration de cadres en poste et de jeunes diplômés à nulle autre pareille », souligne le baromètre.

L'informatique, la recherche et développement et l'industrie sous pression

Parmi les métiers les plus en tension figurent en premier lieu ceux de l'informatique (développeur, web designer). Viennent ensuite la recherche et développement ou encore l'industrie. Ces métiers « sont tous en lien avec les transformations structurelles importantes », précise l'APEC. La numérisation accélérée de l'économie ces dernières années génère de forts besoins en recrutement chez les entreprises, en particulier chez les TPE et les PME.

A cela s'ajoute la nécessité d'embaucher des profils orientés sur la transition énergétique ou les métiers « verts ». Les tensions sur ces métiers techniques risquent encore de s'accroître dans le contexte du réchauffement climatique et la nécessaire adaptation des entreprises au changement environnemental.

« Il existe des viviers de recrutement sous-utilisés en France dans les quartiers prioritaires, les seniors ou les demandeurs d'emploi de longue durée. Les entreprises doivent changer de regard sur ces publics afin que ces viviers répondent davantage au recrutement des cadres », indique Lætitia Niaudeau.

L'inflation, source d'angoisse chez les cadres

La reprise post-pandémie et la guerre en Ukraine ont propulsé l'indice des prix à des sommets ces derniers mois. En France, même si l'indice des prix à la consommation augmente moins vite que dans d'autres pays européens, la flambées des prix dans l'énergie et l'alimentaire oblige un grand nombre de salariés à se serrer la ceinture pour se chauffer et s'alimenter.

En dépit de salaires plus élevés, l'inflation constitue une source d'angoisse pour les cadres également. « Le contexte actuel d'inflation génère de l'inquiétude sur le pouvoir d'achat des cadres. 43% d'entre eux ont l'intention de demander des hausses », a indiqué Lætitia Niaudeau. Entre août et octobre 2022, la part des salariés inquiets pour leur pouvoir d'achat a grimpé en flèche, passant de 62% à 71%.

« Cette inflation cristallise les inquiétudes et pourrait amener les cadres à être plus exigeants en matière de rémunération », note Lætitia Niaudeau. En face, 49% des entreprises affirment qu'elles ont déjà mis en œuvre des mesures de pouvoir d'achat (prime, hausse de salaires). « Avant les négociation annuelles obligatoires, certaines entreprises avaient pris en compte ce contexte inflationniste ». Mais ces premiers gestes pourraient s'avérer insuffisants compte tenu de l'inflation persistante.

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Pas de « grande démission » chez les cadres

La pandémie a rebattu les cartes sur le marché du travail. Dans de nombreux secteurs où les conditions de travail sont jugées difficiles (restauration, bâtiment, services à la personne), beaucoup de salariés ont décidé de claquer la porte de leur entreprise. Sans atteindre de record, le taux de démission a bondi en France. Selon de récents chiffres de la direction statistique du ministère du Travail (Dares), cette proportion a atteint 2,7% des salariés, un niveau inédit depuis 2008. Chez les cadres, ce phénomène ne se ressent pas vraiment dans les enquêtes menées par l'APEC. « Les intentions de changer d'entreprise restent stables », souligne Laetitia Niaudeau.

Ces chiffres n'illustrent pas de « grande démission». Il y a néanmoins un vrai enjeu de fidélisation dans les entreprises, selon l'association. « Sur les 10 dernières années, 22% des cadres ont démissionné dans les deux années après leur prise de poste. Ces démissions constituent un écueil pour les entreprises. Un des principaux écueil est l'écart entre la réalité du poste et ce qui a été décrit pendant l'entretien », affirme la responsable. Les offres doivent être le reflet de la réalité du métier, sinon le risque de démission augmente. Le rôle des managers est de soigner l'intégration et l'évolution processionnelle au fil des années », conclut la directrice générale adjointe de l'association pour l'emploi des cadres.

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Grégoire Normand
Commentaires 2
à écrit le 08/11/2022 à 13:16
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"En revanche, les cadres sont particulièrement angoissés par l'inflation." Qu'est - ce que doivent dire les non-cadres dans ce cas.

à écrit le 07/11/2022 à 18:22
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Il faut plus de gens qui font ,Il faut plus de gens avec des savoirs.

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