CETA : Attal veut rassurer le Canada sur l'engagement de la France

Le Premier ministre français va rencontrer son homologue canadien Justin Trudeau, ce jeudi, à Ottawa. Il devrait notamment réaffirmer le soutien de son gouvernement au traité de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada. Au mois de mars, le Sénat a voté contre ce texte, mettant en péril la ratification par la France du CETA, sur fond de crise agricole.
Le Premier ministre français Gabriel Attal va rencontrer son homologue Justin Trudeau, ce jeudi à Ottawa
Le Premier ministre français Gabriel Attal va rencontrer son homologue Justin Trudeau, ce jeudi à Ottawa (Crédits : LUDOVIC MARIN)

Malgré le camouflet législatif, le gouvernement continue de soutenir le traité de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada, et compte bien le faire savoir à ses homologues canadiens. C'est d'ailleurs l'un des sujets au menu des discussions entre le Premier ministre français Gabriel Attal et son homologue Justin Trudeau, lors de leur d'une rencontre ce jeudi à Ottawa.

Pour rappel, signé fin 2016, adopté par le Parlement européen fin 2017 et appliqué provisoirement depuis, le CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement, ou Accord économique et commercial global, en français) n'a pas encore été ratifié par dix Etats européens. Surtout, le Sénat français a voté le 21 mars dernier contre ce texte, mettant en péril sa ratification sur fond de crise agricole.

Attal tente de rassurer sur les intentions du gouvernement

Gabriel Attal devrait « rassurer sur le fait que le gouvernement français croit à son application et à ses vertus », explique un ministre qui l'accompagne. Paris rapporte une « déception » d'Ottawa à ce sujet, mais assure que ce débat au Parlement « ne change pas du tout la relation bilatérale ». Le chef du patronat français (Medef) Patrick Martin, également du voyage, souhaite que « cet épisode ne laisse pas trop de séquelles (et reste un simple) accident ».

Lire aussiCETA : la stratégie à haut risque du gouvernement Attal avant les Européennes

« C'est vu au Canada comme un enjeu de politique intérieure français », abonde la politologue canadienne Stéphanie Chouinard. Sa collègue Geneviève Dufour, experte en droit du commerce international à l'université d'Ottawa, met ce rejet par le Sénat français sur le compte « de la désinformation, du populisme et d'une grogne des agriculteurs ».

Elle rappelle que le CETA a contribué à doper les échanges commerciaux entre les deux pays et que « les Français sont ceux qui en bénéficient le plus ». Le Premier ministre canadien y a même fait allusion mercredi soir vantant le « niveau record » des investissements franco-canadiens qui, grâce à ce traité, « créent des emplois des deux côtés de l'Atlantique ».

La filière bovine française contre le CETA

Un ministre français interrogé par l'AFP a reconnu « qu'il y a un sujet dans la filière bovine » française, qui s'est réjouie du rejet du traité, à l'inverse des exportateurs de vin. « Mais ce n'est pas avec le Canada qu'on va le régler ». « Il n'y a pas un gramme de bœuf canadien dans nos assiettes », fait-il valoir. Mais ces arguments n'ont pas convaincu les sénateurs qui ont voté en majorité contre le texte.

Lire aussi« Crise agricole » : les syndicats vont maintenir la pression jusqu'à la prise de parole d'Emmanuel Macron

Ce rejet a été qualifié de « bonne nouvelle » par le président de la Fédération nationale bovine (FNB). « Il y a des bonnes nouvelles de temps en temps », a jubilé Patrick Bénézit, par ailleurs deuxième vice-président du syndicat agricole majoritaire FNSEA. Il estime aussi que les sénateurs ont « enfin eu l'occasion de faire le bon choix, celui de ne pas ratifier un traité qui autorise des denrées alimentaires qui ne respectent pas nos conditions de production ».

Son avis n'est pas partagé unanimement. « Dans un moment économiquement compliqué (pour les exportations de la filière, ndlr), se mettre dans une position délicate après une bonne dynamique (depuis la mise en œuvre du traité) nous paraît totalement surréaliste », a expliqué Nicolas Ozanam, le délégué général de la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS).

La majorité présidentielle vend les bienfaits de ce traité

De son côté, dénonçant une « posture démagogique » de « la part de l'extrême gauche et de la droite française », l'eurodéputée macroniste Valérie Hayer a jugé qu'un rejet serait « dévastateur pour nos agriculteurs français et pour le signal qui serait envoyé à nos partenaires européens ». À la sortie du Conseil européen fin mars, Emmanuel Macron avait également plaidé en faveur de cet accord, citant ses bénéfices pour les secteurs français du « lait », « fromage » ou « vin ».

Lire aussiAccord sur le CETA : « Ce n'est pas une perspective menaçante » (Paolo Gentiloni, Commission européenne)

Un point de vue qui rejoint celui du commissaire européen à l'économie Paolo Gentiloni, qui, dans un entretien à La Tribune, le 20 mars, affirmait que « l'accord est en place depuis plus de six ans et je n'ai vu aucun désastre. » « Au contraire, le commerce entre le Canada et l'Union européenne a augmenté de plus de 30%. Cet accord a soutenu 700.000 emplois en Europe. Les avantages sont donc très clairs pour l'Union européenne et pour la France. Avant l'introduction de l'accord, certains pays avaient des doutes. Mais objectivement, ce n'est pas une perspective menaçante », a-t-il assuré.

En outre, cet accord ne se résume pas à l'agriculture. Il comprend un volet sur les minerais canadiens dits « critiques » pour la transition énergétique comme l'uranium ou le lithium, prisés par Paris. Les échanges entre l'UE et le Canada ont pris une nouvelle tournure depuis la guerre en Ukraine. Grâce au CETA, l'Europe a pu substituer des produits canadiens - comme ces matériaux - aux produits russes qu'elle n'importe plus.

Paris veut faire avancer Ottawa sur le climat

Sur le plan climatique, Gabriel Attal entend pousser une initiative du président français Emmanuel Macron, le « Pacte de Paris pour les peuples et la planète » (4P), lancé en juin 2023. Il vise à refonder le système financier mondial afin de lutter à la fois contre le réchauffement climatique et la pauvreté.

Le Canada ne l'a pas ratifié, mais Paris attend un engagement « ambitieux » de son partenaire qui enverrait aussi « un signal » en France, où le Premier ministre est accusé de reculer sur la question climatique au profit des agriculteurs.

(Avec AFP)

Commentaires 13
à écrit le 18/04/2024 à 13:44
Signaler
Il devrait dire : je confirme que la démocratie est un concept, mais que dans les faits on fera ce qu'on aura envie de faire, contre l'avis du peuple et l'avis du sénat ! Les traités de libre échange favorisent logiquement les "moins disant" ceux qui...

à écrit le 12/04/2024 à 23:36
Signaler
Ben moi je boycott le ceta et le mercosur :tous les produits qui arriveront ici et les boites complices de ces imports…que les. Citoyens reprennent leur pouvoir de vote par leur porte monnaie et choix de consommation…

à écrit le 12/04/2024 à 23:36
Signaler
Ben moi je boycott le ceta et le mercosur :tous les produits qui arriveront ici et les boites complices de ces imports…que les. Citoyens reprennent leur pouvoir de vote par leur porte monnaie et choix de consommation…

à écrit le 11/04/2024 à 22:57
Signaler
Ou dont les chiffres issus d une autorité indépendante qui argumentent que la France est gagnante Mr Attal ? Mentez vous comme un arracheur de dent .. mais à qui ?

à écrit le 11/04/2024 à 16:53
Signaler
Le problème de la décence… Atal sait déjà qu’il n’a aucun futur politique. Du coup, il pense à monter un deal, avec la signature d’un mauvais accord commercial. Il prendra ce qu’il lui faut, puis ira travailler si jamais il en a envie. C’est déjà fin...

à écrit le 11/04/2024 à 14:45
Signaler
Attal va mentir à qui ? Au canada , aux français ou à l'Europe ?

le 13/04/2024 à 0:09
Signaler
Comme Macron. Il mentira aux trois...

à écrit le 11/04/2024 à 13:36
Signaler
l'assemblée a voté contre, du coup rassurer veut dire quoi? qu'il va passer au dessus de l'assemblée? tout en réfléchissant comment ils vont contourner celle ci? Sinon, le budget de 2025 ils annoncent déjà qu'ils vont passer au 49.3...... C'est m...

le 11/04/2024 à 15:01
Signaler
Les traités de libre-échange sont une compétence exclusive de la Commission Européenne. En clair cela signifie que la ratification ou non par les parlements nationaux ne peut plus avoir aucun effet sur ce qui a été signé. La preuve 90% du CETA est dé...

à écrit le 11/04/2024 à 13:25
Signaler
une politique qui ne protège pas ses agriculteurs est vouée à un grand échec !

à écrit le 11/04/2024 à 12:49
Signaler
Sauf que La majorité présidentielle n'a plus de pouvoir à l'Assemblée. Les engagements de la majorité sur ces sujets valent donc exactement peau de balle et n'obligent que les naifs qui peuvent y croire.

à écrit le 11/04/2024 à 11:43
Signaler
Les types du gouvernement butinent dans tous les pays et sur tous les continents, au point qu'ils en oublient la France pour réfléchir correctement sur l'état du patient. Bientôt et ce ne serait pas surprenant, ils vont venir nous affirmer qu'ils ont...

à écrit le 11/04/2024 à 11:08
Signaler
Le problème est qu'un communicant à l'ère d'internet n'est plus du tout rassurant. Pendant qu'il nous sort sa soupe habituelle nous avons les images, lesm ots et le son qui prouvent le contraire.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.