Déficit public : l'idée d'une taxe sur les « superprofits » refait surface, la présidente de l'Assemblée veut entamer une réflexion

Alors que le gouvernement s'attendrait désormais à un déficit autour de 5,6% du PIB, bien au-dessus des 4,9% prévus initialement, la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, s'est dit ouverte à une contribution « exceptionnelle » sur les « superprofits » ou « superdividendes », pour combler les trous du budget 2023. De son côté, Emmanuel Macron n'a pas souhaité s'exprimer, indiquant seulement que le gouvernement annoncera sa « stratégie » la « semaine prochaine ».
« Je suis partisane de regarder » une possible contribution « exceptionnelle » des entreprises « lorsqu'il y a des superdividendes, des superprofits, des rachats d'actions massifs », a déclaré Yaël Braun-Pivet sur France Bleu Sud Lorraine.
« Je suis partisane de regarder » une possible contribution « exceptionnelle » des entreprises « lorsqu'il y a des superdividendes, des superprofits, des rachats d'actions massifs », a déclaré Yaël Braun-Pivet sur France Bleu Sud Lorraine. (Crédits : SARAH MEYSSONNIER)

[Article publié le vendredi 22 mars 2024 à 11H48 et mis à jour à 16H33] L'idée d'une taxe sur les « superprofits » revient sur le devant de la scène. Ce vendredi, la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet (Renaissance), a réclamé « d'entamer la réflexion » sur une contribution « exceptionnelle » sur les « superprofits » des grandes entreprises.

« Nous ne souhaitons pas que les impôts des Français augmentent », a-t-elle rappelé, en préambule.

« Cela étant dit, je suis partisane de regarder » une possible contribution « exceptionnelle » des entreprises « lorsqu'il y a des superdividendes, des superprofits, des rachats d'actions massifs », a-t-elle lâché au micro de France Bleu Sud Lorraine.

Une mesurée déjà poussée au sein de la majorité

« Je crois que nous pouvons entamer la réflexion pour savoir s'il n'y a pas là de façon exceptionnelle une capacité que nous pourrions avoir à augmenter les recettes de l'État », a complété la présidente de l'Assemblée.

« Ça me paraît en tout cas être quelque chose qu'il faut poser dans le débat », afin que « nous en discutions collectivement », a ajouté la titulaire du perchoir, à propos d'une question qui agite la majorité présidentielle.

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La déclaration de Yaël Braun-Pivet est loin d'être anodine. La présidente de l'Assemblée se rend en effet dimanche prochain à Blois au congrès du MoDem. Or, plusieurs députés du parti réclament depuis plusieurs années des mesures de « justice fiscale » sur la taxation des superdividendes ou des rachats d'actions des plus grandes entreprises, sans parvenir à convaincre le gouvernement. Le chef des députés MoDem, Jean-Paul Mattei, suggère une hausse ciblée de la taxation des revenus du patrimoine en relevant la « flat-tax » instaurée en 2018.

Le gouvernement annoncera sa « stratégie » la « semaine prochaine »

Interrogé sur le sujet, Emmanuel Macron n'a pas souhaité s'exprimer, indiquant seulement que le gouvernement annoncera sa « stratégie » la « semaine prochaine ». « Je ne vais pas préempter les solutions techniques », s'est-il borné à dire.

Un peu plus tôt dans la journée, l'exécutif avait déclaré que le gouvernement taxera comme prévu les énergéticiens mais ne fera « pas plus que ça », a assuré Bruno Le Maire.

« Il y aura dans ce budget une récupération des rentes qui ont pu être faites par les énergéticiens (...) pas plus que ça », a indiqué sur BFMTV le ministre de l'Economie, estimant « qu'il ne s'agit pas de dévier de notre ligne de politique économique qui a donné des résultats, qui sont de très bons résultats ».

Un déficit supérieur à 5%

Les propos de Yaël Braun-Pivet interviennent surtout alors que l'exécutif est confronté à un déficit public qui grossit. Dans ce contexte, le gouvernement a déjà annoncé un tour de vis budgétaire : 10 milliards d'économies en 2024, avant de chercher « au moins » 20 milliards supplémentaires en 2025. Et pour cause, l'exécutif s'attend à un déficit public 2023 nettement plus dégradé qu'attendu, lors de l'annonce des chiffres de l'Insee mardi prochain.

Celui-ci pourrait s'envoler à 5,6% du PIB, loin des 4,9% initialement prévus en 2023, selon de récentes prévisions de Bercy mises au jour jeudi par le sénateur LR Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des Finances.

De fait, l'exécutif ne pourra compter que sur de maigres recettes cette année. Le gouvernement a déjà revu à la baisse son objectif de croissance 2024  : lui qui tablait sur 1,4% n'espère désormais plus que 1% sur l'année. Mécaniquement, les recettes fiscales risquent de diminuer.

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Surtout, le nouveau chiffre de 1% de croissance « est encore très largement gonflé », a estimé début mars, Eric Coquerel, le président de la commission des Finances de l'Assemblée nationale. « Quand vous avez un risque de récession économique, ce n'est pas le moment de baisser les dépenses publiques, qui sont aussi une façon de faire fonctionner l'économie », a poursuivi le député LFI dans une vidéo publiée sur le réseau social X (anciennement Twitter).

« Nous ne pouvons pas rester dans cette situation »

De son côté, la Cour des Comptes se veut rassurante. « La France n'est pas en faillite », a asséné ce vendredi, son premier président Pierre Moscovici au micro de RMC et BFMTV.

« La France est un pays sûr, un pays très ouvert et donc c'est un pays dont la dette se place bien, elle trouve des gens pour la financer », a-t-il déclaré avant d'ajouter qu'il « n'y a pas de problème de soutenabilité de la dette », a-t-il ajouté.

« En revanche nous avons une situation de finances publiques très préoccupante et c'est un problème de crédibilité pour nous, notamment au sein de la zone euro », a poursuivi l'ancien ministre de l'Économie et des Finances.

« Nous ne pouvons pas rester dans cette situation. »

D'autres mesures d'économie envisagées

Hormis l'idée d'une nouvelle taxe, pour tenter de trouver des solutions, Emmanuel Macron a reçu mercredi son ministre de l'Économie, ainsi que ceux chargés des collectivités locales et des affaires sociales, Christophe Béchu et Catherine Vautrin afin de remettre sur la table certaines pistes déjà avancées par le gouvernement, notamment pour freiner les dépenses d'assurance chômage et de santé.

Dans le viseur de l'exécutif se trouvent, par exemple, les remboursements de soins liés aux affections dites « de longue durée », les ALD, comme le diabète, le cancer, etc. Les patients qui bénéficient de ce système sont pris en charge à 100% par l'Assurance maladie. Or, selon le ministère de la Santé, ces ALD représentent les deux tiers des remboursements de l'Assurance maladie.

Lire aussiSanté : sur les affections de longue durée (ALD), « la vision de Bruno Le Maire est erronée » (Frédéric Bizard, ESCP)

L'assurance chômage devrait, elle aussi, évoluer comme l'annonçait, fin février, le Premier ministre. Gabriel Attal s'était, en effet, dit favorable à ce « qu'on rouvre le chantier de l'assurance chômage pour avoir un modèle social qui incite davantage à l'activité ». D'autant que, selon les prévisions de l'Unédic publiées quelque temps plus tôt, l'excédent du régime atteindra un peu plus de 1,5 milliard d'euros contre les cinq milliards estimés en septembre 2023.

(Avec AFP)

Commentaires 23
à écrit le 23/03/2024 à 4:14
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Une réforme de l'assurance chômage s'impose , il est assez scandaleux que des professionnels du chômage comme les saisonniers et les intermittents du spectacle et les CDD alternent tranquillement 6 mois de travail suivis de 6 mois de chômage indemni...

à écrit le 22/03/2024 à 21:27
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Il y a longtemps qu'une supertaxe sur les superprofits, les superpatrimoines et les superrevenus aurait dû être rétablie (ISF + tranche à 90%...) Même les économistes libéraux, même le FMI, même l'OCDE tirent la sonnette d'alarme sur des inégalités t...

à écrit le 22/03/2024 à 17:42
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trop facile de taxer les soit disant super profits je bouffe la caisse et apres je vais taper dans celle des autre je vais taper chez les chomeurs comme s'ils l'avaient fait expres allez donc voir les gars du batiment ou sa tangue dangereusement...

à écrit le 22/03/2024 à 15:49
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Ce qui a cramé la France, ce n'est pas la dette. Oui mais, à la louche : 1) la remontée des taux 2) les dépenses COVID en pure perte (vaccins, masques, matériels médicaux), avec quasiment peu de retours sur investissements en France, par rapport a...

le 22/03/2024 à 19:41
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@Alain d. Trop facile d'écarter d'un revers de main une certaine séquence de la dette. À savoir que la dette de la France atteignait 66.6% du PIB à la fin du deuxième trimestre 2007 (1 216.4 milliards d'euros). Soit avant la grande conflagration fina...

à écrit le 22/03/2024 à 15:34
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Et une taxe sur les super dépenses des élus ? Payable sur leurs biens personnels ? "Quoiqu'il en coûte" ?

le 22/03/2024 à 16:11
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On pourrait introduire une règle d'or dans la Constitution. Pour chaque 1% d'augmentation des dépenses courantes / prestations sociales, 1% de baisse des rémunerations des élus qui l'ont voté/décidée. Pour ceux qui chercheront de s'exonérer de la rè...

à écrit le 22/03/2024 à 15:26
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Qu'ils apprenent à faire plus avec moins d'argent et à ne pas acheter les voix par la depense sociale. S'ils en sont incapables qu'ils demissionnent en s'excusant pour avoir menti toute leur vie. Et qu'ils laissent à un Tavares de faire les coupes n...

à écrit le 22/03/2024 à 15:06
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Tous ces politiques se complaisent dans des solutions de facilité ! Dès que c’est un peu plus compliqué, il n’y a plus personne pour proposer des solutions innovantes…..

à écrit le 22/03/2024 à 14:48
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Visiblement on veut lacher du lest avant que ne s'alourdisse de trop l'ambiance nationale ! Les nantis, sont prêt à le faire en haut lieu !

à écrit le 22/03/2024 à 14:33
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Si on exclut l’hypothèse de [la /l’im]posture, cette initiative est -ce qu’il convient de qualifier d’-audacieuse et héroïque. Voire relevant de la FMI (force mission impossible). Pourquoi ? Le dogme du ´pas touche ´ aux impôts des riches -partic...

à écrit le 22/03/2024 à 13:01
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Soyons sérieux: notre niveau d'imposition est anormalement élevé, notre Service Public est devenu insuffisant et nous avons toujours un chômage délirant. C'est le résultat d'une défaillance de notre PIB; celui étant alimenté par nos entreprises (qui ...

le 22/03/2024 à 16:12
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En fait, les dépenses publiques servent à gonfler le PIB et à réduire le taux de chômage. Le cas grec est un exemple remarquable le PIB stagnant 35% en dessous du niveau de 2008 tandis que le taux de chômage reste deux fois plus élevé et l'améliorati...

à écrit le 22/03/2024 à 12:57
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Il faut taxer les super profits des membres du gouvernement.

à écrit le 22/03/2024 à 12:54
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Ce serait peut-être enfin le moment de vous réveiller sur "les superprofits" et tout ce qu'ils englobent, comme si dans ce pays l'on pouvait raisonnablement feindre les allégeances du gouvernement (et pas que celui-ci) faites envers le très haut somm...

le 22/03/2024 à 13:25
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Je partage votre point de vue mais plutôt que de taxer les supers profits il serait plus judicieux et rapide de supprimer ou du moins contrôler ou restreindre le crédit impôt recherche de relever le plafond de la tax flat de 30 à 40% ou des holdin...

le 22/03/2024 à 14:33
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Ne jamais oublier que lorsque le président du pays a dit "ceux qui ne sont rien" tout les évènements qui sont intervenus par la suite font lien a sa parole ! Deshumanisation, concussion, affairisme, incompétence , la dernière apparaissant a présent,...

le 22/03/2024 à 15:26
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Le gouvernement est la voix de son électorat, dit autrement une tranche d'âge ayant tout eu, de l'argent facile, des carrières facile, la retraite jeune et qui â encore devant lui quelques années d'espérance de vie en bonne santé et d'ici à ce qu'il ...

le 22/03/2024 à 16:03
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@Idx. Nous sommes tout à fait d'accord. Toutefois, je rajouterai en plus que le barème de l'impôt sur le revenu doit être réajusté en déplafonnant la tranche de 45%, tout comme les rachats d'actions propres doivent être beaucoup mieux encadrés (voir...

le 22/03/2024 à 16:13
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@o. Au risque de me répéter sempiternellement depuis des années, tout figure déjà dans "la théorie des choix publics" ("Public Choice Theory"; dont le texte fondateur est The Calculus of Consent publié en 1962 par les économistes James M. Buchanan et...

le 22/03/2024 à 17:45
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@Gonzague [car je pense qu'il y a un syndrome global de stockholm] Ohhhh que OUI!

à écrit le 22/03/2024 à 12:43
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Pour le moment, ils compensent avec edf ou ils extorquent au gens des factures impossibles a payer, l'augmentation des prix sur les besoins incompressibles depuis le début de l'année s’élève. a au moins 15% assurance loyer, santé, charges loyer, b...

à écrit le 22/03/2024 à 12:42
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Super-profits mais pas les 'simples' profits ? Comment se définit un super-profit ? Plus que d'habitude, calculé en moyenne sur les 5 ans précédents ? Profits en France ou profits mondiaux d'une entreprise française (pétrole & dérivés par ex) ? Quan...

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