Budget 2024 : le débat brûlant sur la taxation des superprofits refait surface

En plein débat sur le budget 2024, plusieurs voix au sein de la majorité et des ONG plaident pour la mise en oeuvre d'une taxation des superprofits. Après s'y être fermement opposé à l'été 2022, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire avait finalement suivi les recommandations de la Commission européenne, de l'OCDE et du FMI plaidant pour la mise en place un prélèvement sur les énergéticiens. Mais alors que la menace du 49-3 ressurgit, cette proposition pourrait passer à la trappe.
Grégoire Normand
Le parlement a entamé les discussions parlementaires sur le budget 2024.
Le parlement a entamé les discussions parlementaires sur le budget 2024. (Crédits : Reuters)

« Je ne sais pas ce que c'est qu'un superprofit. Je sais que les entreprises doivent être profitables, c'est tout ce que je sais ». Devant un parterre de grands patrons réunis à l'hippodrome de Longchamp pour la rencontre des entrepreneurs français (REF) en août 2022, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire avait balayé d'un revers de main la question brûlante des profits mirobolants des grands groupes. Cette réaction avait suscité un malaise au sein de la majorité parlementaire.

Le député et patron du groupe MoDem à l'Assemblée nationale, Jean-Paul Mattei avait bien porté un amendement portant sur les superdividendes. Mais, d'abord adopté dans le projet de loi de finances 2023, il avait finalement été rejeté dans la version adoptée à coup de 49-3.

 Lire aussiBudget 2024 : entre l'inflation, le climat et la dette, le gouvernement sur une ligne de crête

Un an après, ce débat hautement inflammable refait surface au grand dam de l'exécutif. Dans le contexte des débats budgétaires à l'Assemblée, le réseau action climat (RAC) est revenu à la charge sur une hausse de la fiscalité des superprofits ce mardi 3 octobre. « Chaque degré compte et chaque loi doit intégrer le virage économique et social », a déclaré Anne Bringault, directrice des programmes du réseau fédérant plusieurs dizaines d'associations lors d'un point presse organisé à proximité de l'Assemblée nationale. Une semaine après la présentation du budget par le gouvernement, le projet de loi de finances 2024 (PLF 2024) a entamé son parcours parlementaire la semaine dernière. Et en dépit des menaces de 49-3 qui planent au-dessus du budget, Anne Bringault estime «qu'il y a des marges de manoeuvre pour améliorer le PLF 2024 ».

La taxe sur les superprofits pourrait rapporter entre 8 et 12 milliards d'euros par an

Malgré les réticences du ministre de l'Economie, l'exécutif s'était tout de même résolu à mettre en place une contribution exceptionnelle sur les profits des énergéticiens à la fin de l'année 2022. Mais au sujet de ce texte voté au Parlement européen, le RAC estime que « cette mesure ne va pas assez loin, car elle ne cible pas tous les secteurs et que le taux fixé est trop faible ». Dans leur proposition, les associations demandent une taxation des entreprises les plus polluantes.

Mais « ce n'est qu'un premier pas »« On demande également une taxation des superprofits générés de manière aléatoire », ajoute Elise Nacaratto de l'ONG Oxfam. Du point de vue des recettes fiscales, les responsables tablent sur une enveloppe « de 8 à 12 milliards d'euros chaque année ». Concernant les modalités, « nous sommes ouverts à la discussion sur le niveau de la taxation et l'assiette », assurent-ils.

Lire aussiUn ISF vert en Europe, la proposition choc de deux parlementaires français

Des économistes proches de Macron favorables à une taxation exceptionnelle

Cette proposition d'une taxe sur les superprofits est loin de se limiter aux ONG. Plusieurs économistes ayant participé au programme économique du chef de l'Etat en 2017 sont montés au front pour défendre cette fiscalité exceptionnelle. Lors de la remise d'un rapport très attendu à la Première ministre Elisabeth Borne au printemps, l'économiste Jean Pisani-Ferry a mis sur la table l'option d'une telle taxe pour financer la montagne d'investissements dédiée à la transition écologique. Interrogé par La Tribune il y a un an, le président du conseil d'analyse économique Philippe Martin s'était montré également favorable à cet outil fiscal. 

« Le bouclier tarifaire a bénéficié aux plus aisés. C'est un signe de solidarité dans ce contexte de crise énergétique. L'outil fiscal est ce qu'il y a de plus efficace pour assurer de la redistribution », expliquait-il.

Lire aussiUrgence climatique: Jean Pisani-Ferry préconise d'investir 70 milliards d'euros d'ici 2030

Une loi de programmation pour le financement de la transition

S'agissant du financement de la transition, les associations ont défendu l'idée d'une loi de programmation pluriannuelle des finances publiques pour la transition. « La question des financements est centrale sur la planification. Il faut que les financements soient massifs, justes, cohérents et durables. Le PLF propose 7 milliards d'euros. C'est un premier pas. Mais il reste des zones d'ombre sur la part du privé et la part du public », a expliqué Elise Nacaratto, lors de la réunion avec des journalistes.

Pour « donner de la visibilité aux acteurs », les représentants des associations réclament la mise en place d'une loi de programmation pluriannuelle des finances publiques pour la transition. Ils proposent en outre de véritablement mettre fin aux dépenses néfastes à l'environnement chiffrées à 22 milliards d'euros et veulent multiplier le conditionnement des aides aux entreprises. L'objectif est de conditionner les aides publiques à l'évolution du bilan des émissions pour les grandes entreprises de plus de 500 salariés et ayant un chiffre d'affaires supérieur à 40 millions d'euros. Autant dire que les débats promettent d'être explosifs au palais Bourbon.

Grégoire Normand
Commentaires 17
à écrit le 05/10/2023 à 0:57
Signaler
Toujours pas la seule proposition qui soit cohérente, celle de faire réaliser par la Cour des Comptes un AUDIT de la DEPENSE PUBLIQUE afin que l'ont sachent exactement ou va l'argent !!!

à écrit le 04/10/2023 à 10:09
Signaler
Inutile de se prendre la tête avec cette histoire de taxation des supers profits .Que les pouvoirs publics commencent par supprimer les niches fiscales qui permettent aux grandes entreprises de ramener le taux d'impôt sur les sociétés de 25% à .......

le 04/10/2023 à 15:48
Signaler
@Idx. Ils sont payés par mes impôts, entre-autres, ces assistés de la politique politicienne, alors ils doivent se pencher sérieusement sur les deux volets, ne serait-ce que pour l'intérêt général et le bien commun. Je n'ai pas encore vérifié le taux...

à écrit le 04/10/2023 à 10:07
Signaler
Inutile de se prendre la tête avec cette histoire de taxation des supers profits .Que les pouvoirs publics commencent par supprimer les niches fiscales qui permettes aux grandes entreprises de ramener le taux d'impôt sur les sociétés de 25% à .........

à écrit le 04/10/2023 à 9:18
Signaler
A défaut de vouloir condamner les superprofits (on ne saurait pas ce que c'est), on peut toujours condamner le rôle des entreprises dans la fabrication de l'inflation (50% des responsabilités, comme l'a récemment signalé le FMI). Une manière très dir...

le 04/10/2023 à 13:29
Signaler
Le FMI est un refuge utilisé par les gouvernants pour caser les pistonnés. Normal qu'ils essayent de dérober leurs protécteurs de leurs responsabilités. La responsabilité de l'inflation est à 90% des états et des banques centrales. Dépenser en défi...

le 04/10/2023 à 15:28
Signaler
@Adieu BCE. "Le FMI est un refuge utilisé par les gouvernants pour caser les pistonnés", comme la Banque Mondiale, la Commission européenne etc. Une politique de relance monétaire doit être impérativement accouplée à une politique budgétaire pour pro...

à écrit le 04/10/2023 à 8:20
Signaler
Tu parles encore un débat "brulant" qui va accoucher d'une souris même pas comestible !

à écrit le 04/10/2023 à 7:26
Signaler
Il est un peu fort d'entendre un Ministre des Déficits faire la morale à des entrepreneurs qui n'ont fait que leur travail: amener leurs entreprises à être profitables. Le Bon Sens l'aurait-il quitté?

à écrit le 03/10/2023 à 19:23
Signaler
En priorité il faut interdire les subvention publiques aux ONG. Une ONG qui accepte des aides publiques n'est plus digne de s'appeller ONG, elle devient une OG. Les financements d'une ONG doivent être à 100% volontaires et privés.

à écrit le 03/10/2023 à 19:02
Signaler
Un super profit ça n'existe pas, faut prendre des cours de compta et de gestion financière ! Et j'ai entendu aucune ongles vociferer avec tolerance qu'il fallait confisquer les supersalaires des rentiers de ka république, ou confisquer les superprofi...

le 04/10/2023 à 9:06
Signaler
Vous avez raison, c'est une gabegie phénoménale. Mais les "30 milliards de la formation" vont en dernier ressort.....à des entreprises de formation qui se nourrissent, comme beaucoup d'entreprises "de commande publique", avec des abus largement dénon...

le 04/10/2023 à 10:06
Signaler
Ces 32 milliards d'euros ne correspondent pas à un budget que l'État redistribue. Il s'agit de la somme de contributions éclatées, de la part des entreprises (43%), des régions (14%), de l'État (13%), mais aussi de l'Unédic et de Pôle emploi (5%), de...

à écrit le 03/10/2023 à 18:59
Signaler
Bonjour, s'est moche taxé les super profils, tous comme le patrimoines, le bénéfice du travail... S'est très très compliqué en France... Pays de quelques individus qui détient tous... Leur prendre de l'argent s'est leur arracher le coeur... Ils faut...

à écrit le 03/10/2023 à 18:23
Signaler
Et ça tergiverse encore🤡!!! Au premier semestre 2023, les bénéfices nets cumulés des entreprises du CAC 40 s’élevaient à plus de 81 milliards d’euros. C’est une progression de 15% sur un an qui est beaucoup plus rapide que la hausse du chiffre d’affa...

le 04/10/2023 à 10:04
Signaler
Le CAC 40 ne répresente pas les entreprises française. La majorité des entreprises du cac 40 ne sont plus françaises ni au niveau de la majorité de leur actionnariat, ni du % de leur activité, ni du % de leurs salariés

le 04/10/2023 à 14:36
Signaler
@Adieu BCE. Vous avez déjà progressé au niveau de vos réflexions datées en réalisant que la libre circulation des capitaux n'a rien de comparable avec la libre circulation du facteur travail depuis les années 90. Une dichotomie ahurissante depuis la ...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.