« Emmanuel Macron est le président le plus dépensier de la Ve République » (Gérard Larcher)

EXCLUSIF – Après Bruno Le Maire, Gérard Larcher est le deuxième invité de « l’Entretien de Jeudy ». Dans ce nouveau rendez-vous hebdomadaire de La Tribune, le président du Sénat n'est pas tendre avec le gouvernement, notamment sur sa gestion des finances publiques. Il tire en effet la sonnette d'alarme sur l’envolée de la dépense publique, qui, si elle n’était pas maîtrisée, risquerait de conduire à une situation similaire à celle de la Grèce. Au-delà des questions budgétaires, Gérard Larcher n’a esquivé aucune question, que ce soit sur le contrôle de l’immigration qu’il appelle à durcir par crainte d’une nouvelle crise migratoire d’ampleur, la réforme des institutions, les baisses d’impôts pour les classes moyennes, la situation des Républicains avec la sortie du silence de Laurent de Wauquiez en vue de la prochaine présidentielle, mais aussi sur l’hypothèse de le voir nommé à Matignon. Ce long entretien sera suivi d'un portrait détaillé de ce vétérinaire de formation élu pour la première fois au Sénat en 1986 et qui brigue un nouveau mandat à la présidence de la chambre haute.
Gérard Larcher interrogé par Bruno Jeudy
Gérard Larcher interrogé par Bruno Jeudy (Crédits : DR)

LA TRIBUNE- À Saint-Brévin-les-Pins, y a-t-il eu non-assistance à maire en danger ?

GÉRARD LARCHER- Je lui avais écrit quand son domicile a été incendié pour lui témoigner notre solidarité. Je ne sais pas s'il y a eu non-assistance à maire en danger, il faut connaître les détails du dossier. Mais je veux savoir. Quand un maire démissionne car sa vie est devenue impossible, c'est la République qui est menacée, insultée et agressée. C'est pour ça que j'ai approuvé la décision de notre collègue Jean-Noël Buffet, le Président de la commission des lois du Sénat, de convier Yannick Morez à une audition (elle a eu lieu mercredi dernier) afin de comprendre ce qui l'a conduit à démissionner. Nous avons besoin de son témoignage. Ce n'est pas suffisant de dire que ce n'est pas acceptable et de zapper ensuite. Il faut aller au fond des choses pour comprendre son ressenti. Il vivait dans sa commune depuis 32 ans et exerçait la profession de médecin. Il faut analyser ce processus d'auto-exclusion et cette violence. C'est le rôle constitutionnel du Sénat d'être aux côtés des élus, de les écouter et de les entendre. Dans sa lettre de démission, le maire de Saint-Brevin-les-Pins dénonce le manque de soutien de l'État. Le Sénat mène notamment, depuis la mort en 2019 du maire de Signes, un travail de fond pour mieux protéger les élus locaux. Une loi a été adoptée en janvier dernier. Peut-être faut-il aller encore plus loin et exiger de l'État qu'il soit plus réactif.

L'État protège-t-il assez les maires ?

Hélas non. Je visite trois départements par mois et rencontre des dizaines d'élus locaux. Je sens une extraordinaire lassitude des maires qui ne se sentent pas assez soutenus, mais sont aussi confrontés à une bureaucratisation, une inflation de normes qu'ils ne supportent plus. Regardez l'exemple du maire de Nevoy (Loiret). Comment voulez-vous qu'un maire de moins de 1.500 habitants puisse faire face à l'arrivée de 40.000 évangélistes ? Lui n'a pas démissionné mais il a lancé un appel au secours devant la passivité des services de l'État. Là, il y a non-assistance à commune en danger ! J'ai dû moi-même, avec les sénateurs du Loiret, alerter la Première ministre sur la situation pour qu'on ne le laisse pas tomber.

D'autres maires sont sous la pression d'opposants qui refusent l'ouverture de centres d'accueil de demandeurs d'asile. Cela pose-t-il la question de la clé de répartition des immigrés ?

Pas seulement la clé de répartition mais aussi des flux migratoires devenus incontrôlés par une absence totale de politique migratoire dans le pays. Du fait de l'arrivée massive de migrants, les contestations autour d'ouverture de centres d'accueil de demandeurs d'asiles se multiplient. Les maires et les départements sont confrontés à la question majeure des mineurs non accompagnés. Sur le terrain, de nombreux élus vivent des situations intenables face à l'explosion de l'immigration. Il est temps d'avoir une politique migratoire qui tienne compte des réalités. On ne peut pas laisser croire que ça va se régler en remplissant tous les hôtels une ou deux étoiles en Île-de-France ou des Alpes-Maritimes. Derrière, ce sont les maires qui doivent les accompagner, les accueillir dans les centres communaux d'action sociale, scolariser les enfants. Sans compter faire face aux tensions que cela peut engendrer. Les maires sont le dernier rempart de protection de notre société et ils affrontent tous les problèmes.

La Première ministre a finalement décidé d'ouvrir des consultations pour préparer une réforme de l'immigration d'ici à juillet. Vous aviez critiqué le report du projet de loi à l'automne. Cela doit vous réjouir ?

En mars, j'avais demandé à reporter ce texte. Au sortir de la réforme des retraites, ce n'était pas le bon moment, le pays me paraissait alors hors d'état de traiter une réforme aussi indispensable qui nécessite calme et raison. La proposition du gouvernement d'un texte à la découpe était inacceptable. Nous avons dit non. Ensuite, c'est la Première ministre qui annonce le report de l'examen du projet. Nous avons alors décidé de transformer le travail de la commission des lois du Sénat en propositions de loi. Vingt-quatre heures plus tard, Élisabeth Borne me téléphonait pour m'indiquer qu'elle allait reprendre des consultations. Tout ça n'est plus très clair...

Un consensus est-il possible avec les Républicains ?

Au Sénat, nous sommes prêts. Nous allons déposer une proposition de loi ordinaire et une proposition de loi constitutionnelle pour être réactifs et efficaces. Les deux groupes LR, Assemblée nationale et Sénat, sont sur la même longueur d'onde, à quelques nuances près. J'observe que les divisions sont plutôt dans la « majorité relative » qui a de vraies réticences à durcir le contrôle des flux migratoires. Il n'est pas question pour Les Républicains de régulariser au nom de l'emploi des immigrés entrés irrégulièrement. 500.000 personnes issues de l'immigration sont actuellement au chômage. Commençons par organiser le retour vers l'emploi de ces personnes.

« Le pacte asile immigration défendu par le Président de la République est un flop retentissant »

Gérald Darmanin a-t-il eu raison de mettre les pieds dans le plat en critiquant le gouvernement de Giorgia Meloni, incapable selon lui de régler les problèmes migratoires ?

Le constat de Gérald Darmanin est exact : l'Italie est confrontée à une nouvelle vague migratoire qu'elle n'arrive pas à juguler, avec des conséquences humaines terribles. Mais gardons-nous de donner des leçons, nous ne sommes pas en état de le faire ! En France aussi, les flux ont explosé, sans aucune politique migratoire efficace sur le dernier quinquennat. La question de l'immigration est un enjeu national et européen. C'est d'ailleurs le grand échec de la présidence française de l'Union européenne. Le pacte asile immigration défendu par le Président de la République est un flop retentissant.

Sommes-nous devant une nouvelle crise migratoire d'ampleur ?

Oui. Nous n'avons jamais accueilli autant d'étrangers qu'en 2022 : + 65% de titres de séjour délivrés par rapport à il y a dix ans ; + 44% cette année pour l'immigration économique, les bénéficiaires de l'Aide médicale d'État ont augmenté de 100% depuis 2009. Sur l'immigration, tous les signaux sont au rouge. On ne peut plus attendre, nos capacités d'accueil sont saturées. Le Président de la République le sait. La balle est dans son camp.

Faut-il légiférer contre les casseurs comme le souhaite Gérald Darmanin ?

Nous avons déjà légiféré en 2019. Une partie de la loi a été censurée par le Conseil constitutionnel, faute de garanties suffisantes, sur une disposition, pour préserver les libertés publiques. Au Sénat, la commission des lois a retravaillé les propositions pour qu'elles répondent aux exigences du Conseil constitutionnel. Si c'est nécessaire, légiférons à nouveau. Mais le grand sujet c'est la liaison police-justice. Des violences de Sainte-Soline à celles du 1er mai, j'observe qu'il n'y a pas eu beaucoup de suites judiciaires à ce jour.

Y a-t-il un danger avec ces manifs de l'ultra droite ?  Faut-il les interdire ?

Il y a un danger avec les manifestations de l'ultra droite et de l'ultra gauche. Encore faut-il que le préfet de police ait la possibilité de les interdire. Dans la manifestation de l'ultra droite qui a défrayé la chronique, je n'ai pas compris que la police laisse des individus défiler le visage masqué.

Gérald Darmanin est-il un bon ministre de l'Intérieur ?

Nous ne sommes pas toujours d'accord mais il fait le job et sa tâche est très difficile. C'est le cas notamment à Mayotte où il y a non-assistance à nos compatriotes de ce département d'Outre-mer en danger compte tenu des ravages de l'immigration incontrôlée et de l'explosion de la criminalité. Je regrette d'ailleurs que la Première ministre, qui était à la Réunion ces derniers jours, ne se soit pas rendue à Mayotte.

Votre collègue Yaël Braun-Pivet, Présidente de l'Assemblée nationale, estime que c'est le bon moment pour réformer les institutions. Partagez-vous son avis ?

C'est un sujet important mais je crains qu'il ne soit pas en phase avec les préoccupations des Français aujourd'hui. Arrêtons de se raconter des histoires, l'exécutif ne dispose pas des 3/5ème pour modifier la Constitution. Nous ne vivons pas une crise institutionnelle mais une crise politique. Elle est liée bien sûr à l'absence de majorité à l'Assemblée nationale mais aussi au mode de gouvernance du chef de l'État et à sa verticalité. La première réforme qu'Emmanuel Macron doit accomplir c'est de changer sa façon de gouverner.

Êtes-vous favorable à une révision de la Constitution sur l'IVG ?

Elle n'est pas utile. Le Conseil constitutionnel protège déjà l'interruption volontaire de grossesse. J'ai toujours été très attaché à la loi Veil. Ma préoccupation c'est la fermeture de 130 centres d'IVG en 15 ans, et les 16 départements sans gynécologue, cela ne cesse de s'aggraver. Je pense que le droit à l'IVG n'est pas menacé. Par contre, l'accès à l'IVG s'exerce de manière inégale selon les territoires.

Le rejet des demandes de RIP sur la réforme des retraites montre que la pratique du référendum est en panne. Faut-il revoir la procédure afin de la rendre possible ?

Les décisions du Conseil Constitutionnel sur le « RIP retraites » sont incontestables et cohérentes. Cessons de croire qu'un référendum peut être utilisé à toutes les sauces. La démocratie participative, si elle est utile, ne peut pas remplacer la démocratie représentative. Alors c'est vrai que nous avons perdu la culture du référendum. Nous avons notre part de responsabilité. En 2005, il y a le fâcheux précédent du référendum européen. Les Français le rejettent. On l'adopte quand même. À Notre-Dame-des-Landes, on organise un référendum local sur le projet d'aéroport. Les gens disent oui et le gouvernement fait le contraire. Les Français nous reprochent de ne pas respecter leur choix.

L'agenda parlementaire est plutôt « light » jusqu'à cet été en dehors des textes sur la Justice, l'industrie verte et la loi de programmation militaire, le signe d'un blocage de l'exécutif ?

C'est le signe que l'exécutif n'a pas de majorité et donc que nous allons travailler texte par texte. C'est compliqué mais c'est le seul moyen.

« En l'état actuel, nous ne voterons pas le projet de loi de programmation des finances publiques »

Bruno Le Maire a confié à La Tribune qu'il écouterait vos suggestions en matière de réductions des dépenses publiques. En l'état, voterez-vous la loi de programmation des finances publiques ?

En l'état actuel, nous ne voterons pas le projet de loi de programmation des finances publiques. Depuis plus d'un an, Bruno Le Maire dit vouloir mettre fin au « quoi qu'il en coûte ». Mais il ne se passe pas un jour ou presque sans que le Président de la République n'annonce de nouvelles dépenses. Les économies sont malheureusement plus rares. La demande du Sénat est claire : il faut maîtriser la dépense publique, sans quoi nous risquons de connaître une situation comme la Grèce. Nous ne voterons la loi de programmation que si elle porte une trajectoire à la fois claire, ambitieuse et crédible de baisse du déficit public.

« En matière de logement par exemple, nous dépensons, en proportion du PIB, deux fois plus que la moyenne européenne tout en étant confrontés à un déficit de logements. Cela ne peut plus durer ! »

Peut-on à la fois baisser les impôts pour les classes moyennes et contenir les dépenses comme l'assure le ministre de l'Économie et des Finances ?

Le Président a annoncé lundi soir un geste en faveur des classes moyennes à hauteur de 2 milliards d'euros, je m'interroge sur le financement d'une telle mesure ! Nous avons à la fois le taux de dépense publique et le taux de prélèvements obligatoires les plus élevés de l'UE. Les Français ne jugent plus les services publics à la hauteur de leurs attentes. Cela révèle un sérieux problème d'efficacité de la dépense. En matière de logement par exemple, nous dépensons, en proportion du PIB, deux fois plus que la moyenne européenne tout en étant confrontés à un déficit de logements. Cela ne peut plus durer !

Dites-vous qu'Emmanuel Macron est le président le plus dépensier de la V République ?

Oui. Au cours du premier quinquennat, les dépenses publiques ont augmenté de 240 milliards dont 60 milliards hors COVID. Le gouvernement annonce une progression de 220 milliards pour les cinq ans à venir. La tendance est deux fois plus rapide que sous François Hollande. Il faut revenir à la raison.

Que pensez-vous des annonces de Gabriel Attal qui veut s'attaquer aux ultra-riches qui fraudent le fisc ?

Ne soyons pas dupes, c'est un clin d'œil à l'aile gauche et la volonté de s'attirer les grâces des classes moyennes. L'administration fiscale fait correctement son travail. En revanche, il est normal de demander éthique et morale à ceux qui ont bénéficié économiquement de la crise. Mais évitons d'être démagogues. Pour lutter contre la fraude sociale, nous avons voté au Sénat, en 2019, la carte vitale biométrique. Et on attend toujours...

Le président a donné cent jours à la Première ministre pour amorcer un consensus avec les forces politiques parlementaires. Vous y croyez ou bien est-ce qu'il gagne du temps faute de solution pour relancer son mandat ?

Nous avons de vraies différences sur la manière de gouverner, sur le régalien, sur la décentralisation, sur les dépenses publiques. Voilà pourquoi nous ne pouvons avancer que texte par texte, quand c'est l'intérêt du pays. On ne fait pas en cent jours ce qu'on n'a pas fait en six ans.

J'ajoute que le Président Macron a lui-même déclaré, dans les colonnes de vos confrères de l'Opinion, qu'il ne croyait pas aux coalitions, dont acte ! Le prochain test pour l'exécutif sera à l'automne avec le vote du budget 2024. Il faudra qu'il soit attentif aux exigences du Sénat.

Pourtant votre nom circule pour Matignon ?

En l'état de nos différences, je refuserais une telle proposition. Pour relancer le quinquennat avec une coalition, il faut un choc passant par une nouvelle élection - présidentielle ou législative -avec derrière un accord électoral et un contrat de gouvernement très clair.

Des membres de la gauche qui manifestent devant le siège de Renaissance en criant « Louis XVI on t'a décapité, Macron on peut recommencer ». Que dites-vous ?

Ce n'est pas acceptable.

Croyez-vous au retour du clivage droite/gauche en 2027 ou bien la tripartition de la vie politique entre le bloc de la décroissance (la Nupes), le bloc nationaliste et le bloc central est durablement installé ?

La vie politique a besoin de clarté sinon nous ouvrons un boulevard aux extrêmes. Nous assistons aux limites du « en même temps ». Ce « en même temps » de gauche et de droite a été mortifère pour notre démocratie. Le clivage droite/gauche réapparaît d'ailleurs naturellement quand il s'agit de la réforme des retraites ou celle de l'immigration.

Quel bilan tirez-vous des premiers mois de la présidence d'Éric Ciotti ?

Ce n'était pas mon candidat mais je trouve qu'il fait preuve de courage et de détermination. Je serai à ses côtés.

Aurélien Pradié a-t-il sa place dans votre mouvement ?

C'est à lui de le décider, mais à force de prendre des positions contraires à la majorité du parti, il devra se mettre en cohérence avec ses convictions.

Laurent Wauquiez sort du silence et trace des perspectives. Est-il le candidat naturel de la droite pour 2027 ?

Son entretien dans « Le Point » est très intéressant. Sa réflexion mûrit. Chacun sait que j'aurais aimé qu'il se positionne davantage sur les retraites. Est-il notre candidat naturel ? Il en a toutes les qualités mais l'urgence du moment n'est pas de savoir qui sera notre candidat. Quand on est à moins de 5% à l'élection présidentielle, il faut d'abord retrouver la confiance des électeurs. Ce que je sens profondément c'est que les Français ne croient plus à l'action politique et qu'elle ne change plus rien à leur vie. À nous de leur proposer un nouveau chemin.

Faut-il s'attendre à des bouleversements lors du prochain renouvellement sénatorial ?

Rien n'est jamais gagné. Je fais donc campagne pour éviter de mauvaises surprises. Il faut expliquer aux élus locaux notre action pour contrôler le gouvernement et les représenter. Beaucoup sont déconcertés par un exécutif qui avance à petit pas, sans boussole et sans majorité. Et puis, les Français sont perturbés par l'image dégradée de l'Assemblée nationale du fait de l'attitude de certains députés. Je crois que le Sénat est un pôle de stabilité dans notre République si ballotée en ce moment.

Les candidats « Horizons », le parti d'Édouard Philippe, peuvent-ils créer la surprise ?

Je ne crois pas à de grands bouleversements. Édouard Philippe fera sûrement élire quelques sénateurs grâce à son tissu d'élus locaux. Nous verrons quel sera leur positionnement au Sénat.

Vous-même, vous êtes candidat à un nouveau mandat dans une assemblée où vous avez été élu pour la première fois en 1986. Qu'est-ce qui vous motive encore ?

Faire les choses avec la même passion qu'au premier jour. Je ne suis jamais autant heureux que lorsque je me retrouve à la table d'un conseil municipal. J'aime les campagnes, j'aime les gens. Mon baromètre politique, ce sont les 35.000 communes.

Ce sera donc le dernier mandat ?

Je n'en sais rien. Pour l'instant, j'ai le sentiment d'être utile, j'ai l'énergie, je veux servir.

Qui seraient vos invités rêvés (personnages morts ou vivants) dans un dîner parfait ?

Martin Luther King, ce personnage me fascine depuis mon adolescence. Et Jean Moulin, un parcours, un modèle, une passion pour la France. Une rue porte son nom à Rambouillet (ndlr, Gérard Larcher fut maire de la sous-préfecture des Yvelines pendant 28 ans) car il a été préfet d'Eure-et-Loir, le département voisin.

En quoi souhaiteriez-vous vous réincarner ?

Je ne crois pas à la réincarnation.

Qu'aimeriez-vous sur votre épitaphe ?

 Rien

Et si c'était à refaire, quel métier aimeriez-vous ?

Vétérinaire, le mien. J'ai appris de ma formation qu'il faut poser un diagnostic et proposer un traitement. C'est peut-être ce qui manque à la politique aujourd'hui.

De quoi rêviez-vous enfant ?

D'être agriculteur-éleveur. Je n'ai pas tout à fait réussi !

Où aimeriez-vous être en 2027 ?

Là où je pourrai être utile.

Portrait- Gérard Larcher, l'art de se réinventer

La photo est cachée derrière une autre sur la cheminée de son bureau de président du Sénat. Gérard Larcher aime la montrer à ses visiteurs avec un petit sourire en coin. On y voit sur ce document en noir et blanc de la séance inaugurale du Sénat en 1996 le jeune (37 ans) sénateur des Yvelines, élu pour la première fois en 1986, et l'autre benjamin (35 ans) de la Haute-Assemblée Jean-Luc Mélenchon, son collègue socialiste de l'Essonne avec son collier de barbe entourant le président de l'époque Alain Poher. Autre temps, autre histoire.

Depuis le « petit vétérinaire » de Rambouillet, comme l'avait surnommé Charles Pasqua, a fait son chemin. Avec son physique de sénateur, son tempérament tout en rondeur et sa subtilité politique, il fait rapidement partie des murs. Quand il débarque au Sénat, Gérard Larcher milite déjà dans les rangs du RPR depuis une bonne dizaine d'années. C'est l'époque où François Mitterrand est contraint à composer dans une inédite cohabitation avec Jacques Chirac. L'ascension du pasquaïen Larcher sera rapide. La compétition politique lui va comme un gant. Larcher est une fine gâchette. Ce Normand de naissance, fils d'un maire de L'Orne, est un grand amateur de chasse et d'équitation. Il a même été le vétérinaire de l'équipe de France championne olympique à Montréal en 1976. Bon vivant, il aime les campagnes et revient rarement bredouille de ses joutes électorales.

Élu pour la première fois en 1979 au conseil municipal de Rambouillet, il en devient maire en 1983. Quatre décennies plus tard, le sénateur des Yvelines est toujours dans l'arène politique, totalisant 36 années de mandat au Sénat dont 11 comme président, 28 à la tête de la mairie de Rambouillet et 3 en tant que ministre dans les gouvernements Raffarin et Villepin.

Le petit vétérinaire « ne veut pas se la péter »

Incroyable longévité. Traversant les pouvoirs et les modes, Gérard Larcher dure et se réinvente sans cesse. Ministre du Travail, il fait l'unanimité auprès des syndicats qui saluent son sens du dialogue. De retour au Sénat, il conquiert la présidence en terrassant le favori Jean-Pierre Raffarin. Après un premier raté de mandat de président du Sénat entre 2008 et 2011, il est battu par un socialiste. La remise en cause est brutale. Il travaille sa communication et ses réseaux. Change ses équipes. Prend sa revanche en 2014 et redore le blason d'un Sénat, symbole de l'ancien monde raillé par Emmanuel Macron lors de son accession au pouvoir.

Mais le jeune président ne connaît pas Raoul. Le patron du Sénat va organiser la résistance. A 73 ans, il revient donc du diable vauvert. Catholique devenu protestant (lors de son mariage en secondes noces), Larcher devient le plus petit dénominateur commun d'une droite déchirée et à la peine. Au point de se retrouver presqu'au centre de la vie politique. Certains envisagent sérieusement qu'Emmanuel Macron finisse par lui proposer Matignon pour sortir de la paralysie qui guette le Parlement faute de majorité. Lui passe son temps à dire non à une proposition qui ne lui a jamais été faite formellement. L'ex-maire de Rambouillet, lui, n'a qu'un objectif en tête : se faire réélire pour la sixième fois sénateur des Yvelines et ensuite décrocher pour la quatrième fois un la prestigieuse présidence de la Haute-Assemblée qui fait de lui le 3ème personnage de l'Etat. Il confie à la Tribune qu'il refuserait « en l'état actuel » de ses différences avec Emmanuel Macron d'être son Premier ministre. Seules de nouvelles élections législatives et donc une dissolution pourraient, selon lui, créer les conditions d'un choc qui pourraient amener Les Républicains à conclure un contrat de majorité avec les macronistes. C'est donc non.

Pour autant, Gérard Larcher se méfie de la pente qui conduit la France vers les dangers extrémistes. Il abhorre Marine Le Pen et ses idées. Le chiraquien n'a pas oublié ses fondamentaux. Il trouve que Gérald Darmanin « fait le job ». Il s'entend bien avec Bruno Le Maire. Il entretient évidemment de bonnes relations avec Bruno Retailleau, tenant d'une ligne dure à droite et juge « intéressante » l'interview que Laurent Wauquiez a accordée au magazine « Le Point ». Après 40 ans de vie politique et avant de démarrer probablement son dernier mandat, le « petit vétérinaire » ne veut pas « se la péter », fidèle à la promesse faite à son fils lors de sa première élection. Il voudrait surtout baliser le chemin qui ramènera la droite modérée vers le pouvoir. Ce qu'il a raté deux fois avec ses candidats préférés et successifs, de François Fillon (avec qui il est fâché) à Valérie Pécresse. Revenant d'un voyage en Arménie en 2021 et alors que certains le pressaient de se lancer dans la course à l'Elysée, il nous confia : « Je n'ai plus l'âge. Mon objectif est de faire un nouveau mandat de président du Sénat mais je ferai tout pour faire revenir la droite au pouvoir. » La présidence du Sénat ne devrait pas lui échapper. Il lui reste à réinventer la droite. Ce n'est pas gagné.

Bruno Jeudy

Commentaires 33
à écrit le 26/02/2024 à 16:48
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a table au palais du Luxembourg il doit pas manger que de la salade avec ses 8000euro mensuel donne pas de leçons à autrui gege

à écrit le 24/05/2023 à 21:20
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Bonjour, En effet dépensé plus que l'on gagne n'est pas signe de bonne gestion. J'ai remarqué après avoir côtoyé beaucoup d'élus que décider avec l'argent des autres il n'y a rien de plus facile. Mais un jour il faut rembourser. Pour avoir travaillé ...

à écrit le 21/05/2023 à 7:19
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et que dire de l'humour de la macronie qui sur une deferlente contre zelensky et pret a remettre en cause le bon vivre francais la pensee unique que m macron nous impose ont la refuse

à écrit le 19/05/2023 à 10:20
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Etes vous vraiment sur que le président Macron soit le plus dépensier de la V eme ? qui avant lui ? giscard ? mitterrand ? chirac ? sarkozy ? hollande ? macron? : il est vrai qu'il faut des finances à l'état français comme payer ses imports quand on ...

le 19/05/2023 à 13:47
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en effet ! un état qui dépense plus qu il ne gagne. ! peut se trouver au niveau de la GRECE

le 19/05/2023 à 20:04
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@lu Oui, absolument et emmené là à la déchetterie les mêmes mondialistes, Maastricht et l' article 63 du TFUE et l' UE mais aussi la grande ..bienveillance de la troïka penchée sur son berceau..

à écrit le 19/05/2023 à 10:20
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Etes vous vraiment sur que le président Macron soit le plus dépensier de la V eme ? qui avant lui ? giscard ? mitterrand ? chirac ? sarkozy ? hollande ? macron? : il est vrai qu'il faut des finances à l'état français comme payer ses imports quand on ...

à écrit le 19/05/2023 à 1:08
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Avec ces avis et opinions que les gens ont de lui comment il a fait pour gagner 2 fois les élections ?

le 19/05/2023 à 9:23
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les sénateurs ne sont pas élus par les français mais par les grands électeurs (soucieux de garder leurs privilèges) le casting est cohérent avec larcher

le 19/05/2023 à 13:31
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Macron a gagner en choisissant son adversaire pour le 2nd tour…. Ça a marché deux fois. Si il avait la possibilité de se représenter, ça marcherait une troisième fois, sans doute avec une marge un peu plus étroite !

le 19/05/2023 à 14:15
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@ozarmes "Si il avait la possibilité de se représenter" Il y a deux situations ou il peut se représenter ou conserver son poste .Le passage au septennat - ( avril 2022 ,Emmanuel Macron s'est dit "plutôt favorable au septennat" ),des juristes de...

à écrit le 18/05/2023 à 20:34
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Un énarque irresponsable qui comme ses prédécesseurs contribue à ruiner notre pays . Pour mémoire , la dette sous Giscard représentait 14,5 % du PIB soit 15 milliards de F EN 1980 ,ce ratio est de 20,7 % , 1983 ,26,6 % 1995, 56,1 % 2015 , 95,6 ...

le 19/05/2023 à 4:03
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Mais qui vote pour ces enarques, sinon les francais de ce beau pays (ironie) ? Assumez. Encore 4 longues annees, assez pour le micro presidium pour mettre a sac, ce qu'il reste de regalien. Apres lui le deluge.

à écrit le 18/05/2023 à 18:05
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l'hopital qui se fout de la charité ! combien nous coute le sénat ? et pour quels services ? ils défendent aprement leurs privilèges et votent des lois qu'ils ne s'appliquent pas (retraites) ; c'est vrai qu'il faut faires des économies en réformant l...

à écrit le 18/05/2023 à 14:13
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Pour 2022: Déficit budgétaire USA: 5,5% Dette publique USA: 121% Déficit budgétaire France: 4,7% Dette publique France: 111,6% Les Etas Unis , grâce à leur dollar roi, ne risquent aucunement un scénario a la grecque...même s'ils faisaient dé...

à écrit le 18/05/2023 à 13:03
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Nous avons deux surdoués au gouvernement représentant la ligne politique de Bruxelles, Macron et Bruno Le Maire. Les deux ne s' embarrassent pas de chichis, le plus ils dépensent et neutralisent l' économie, le plus Bruxelles re...

le 18/05/2023 à 15:34
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à 73 ans un scoup ! diversion. ou réalité du futur retraité ?

à écrit le 18/05/2023 à 12:48
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En France la débâcle économique et ses retentissements humains sont portés par le cabinet de l' ombre McKinsey pendant que "macron des GOPE" est chargé de porter le chapeau pour détourner la colère populaire. Sur l' affaire...

à écrit le 18/05/2023 à 12:22
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Pour cuire les ..grenouilles, l' UE nous a fabriqué le .. résident des GOPE, celui qui a collé 600 milliards de dettes supplémentaires pour suivre le plan d' enfermement de davos et son fake covide, macron serait le plus dépen...

à écrit le 18/05/2023 à 10:33
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M.Larcher le Sénat est à la charge de l'état oui à la charge. Vos rémunérations proviennent du budget donc des contribuables que vous êtes mais pas assez pour votre vite de Nabab dans le luxe et une sinon du moins une des meilleure table de la républ...

à écrit le 18/05/2023 à 9:28
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Accompagné d'un gouvernement le plus cher de la cinquième (selon René dossière), il faut admettre que 41 ministres soutenus par quelque 600 conseillers dont une bonne centaine de chasseurs de primes et autre "Faveur" se sont fait la malle.... Et enco...

à écrit le 18/05/2023 à 8:50
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Quel hypocrite ce planque qui court les mandats électoraux depuis des décennies. Il nous faut croire qu'il est est un opposant à Macron alors qui lui mange dans la main ,ex la réforme des retraites tous sauf lui. Foutons les dehors aux prochaines é...

à écrit le 17/05/2023 à 22:09
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J'aimerais tant savoir combien nous coute Larcher et autres sénateurs ?

à écrit le 17/05/2023 à 21:58
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Il est assez impressionnant de voir Larcher critiquer Macron sur sa gestion dispendieuse. Lui, qui refuse de faire part du system de retraite des sénateurs, lui qui plombe la cantine du sénat avec ses 10 repas quotidiens.

le 18/05/2023 à 9:41
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Oui, les LR ont poussé le "faites ce que je dis pas ce que je fais" à un point que les 3/4 des électeurs du parti ont fini par estimer que c'en devenait indéfendable...

à écrit le 17/05/2023 à 21:04
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Et le plus cher pour les français!!! UPR Normandie "LE CHIFFRE OFFICIEL DE L'INFLATION EST TOTALEMENT SOUS-ESTIMÉ Le 20/10, l'Insee annonçait que "la hausse des prix à la consommation a ralenti à 5,6 % sur 1 an". Un mois après, l'INSEE re...

le 17/05/2023 à 21:42
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Le panier inflation de l'Insee est principalement calculé sur l'alimentation, le logement, le transport et la santé. Les smartphones et les écrans plats n'y figurent virtuellement pas...C'est une peu facile de lancer des affirmations que (presque) pe...

à écrit le 17/05/2023 à 21:03
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Gros gras ventru et rouge tous les Stimagtes d un senateur…ça fait penser aux caricatures «  les poires «  de Daumier … tout ressemblance serait une pure coïncidence.. la dépense publique du sénat leurs fonctionnaires payés 6000€ net par mois quand l...

à écrit le 17/05/2023 à 20:59
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Le plus dépensier, surtout pour les classes moyennes françaises. Lisez le CourrierdesStratèges du jour, "ALERTE : Macron a augmenté l’impôt sur le revenu de plus de 30% depuis 2017 !" Je pose ouvertement la question, pourquoi la presse ...

à écrit le 17/05/2023 à 19:25
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Pas de petit commentaire sur le système de retraite des gras sénateurs ? Pas de petit commentaires sur la démocratie sans vote de nos représentants (les députés), ni aucun référendum sur la loi retraite, juste le bon plaisir de son altesse le mutil...

le 17/05/2023 à 20:43
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Les députés avaient la possibilité de renverser le gouvernement par la motion de censure qui n'a pas eu la majorité. Donc la loi a été votée.

à écrit le 17/05/2023 à 18:57
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Il a bonne mine Gérard rien que la cave du sénat représente des millions d'euros en vins fins et autres spiritueux sans parler de son coup de fourchette à lui et ses collègues !!!!

à écrit le 17/05/2023 à 18:56
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Et alors ? G. Larcher est le président du Séant le plus obstructif de la Vième République, et ce n'est pas un cadeau non plus.

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