Emmanuel Macron tente de reprendre la main dans un contexte social explosif

Alors qu'il doit s'exprimer aujourd'hui dans les 13 heures de TF1 et France 2 pour apaiser la colère qui s'exprime dans la rue, le chef de l'Etat a estimé devant les parlementaires du camp présidentiel que la « foule » n'avait pas de « légitimité » face aux élus. Il n'a ni l'intention de dissoudre l'Assemblée, ni de remanier le gouvernement, ni de convoquer un référendum sur la réforme reculant l'âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans mais il devrait donner des gages d'appaisement en parlant de futures réformes comme celles autour du travail.
Le chef de l'État répondra à 13H00, en direct à l'Elysée, aux journalistes Marie-Sophie Lacarrau de TF1 et Julian Bugier de France 2.
Le chef de l'État répondra à 13H00, en direct à l'Elysée, aux journalistes Marie-Sophie Lacarrau de TF1 et Julian Bugier de France 2. (Crédits : STEPHANE MAHE)

À la veille d'une nouvelle journée de mobilisation, Emmanuel Macron va prendre la parole sur TF1 et France 2, ce mercredi, pour rappeler que la réforme des retraites s'appliquera - la date choisie est 1er septembre -  car elle a été approuvée par le Parlement et qu'elle est donc « légitime ». En choisissant les journaux de 13 heures, il  fait, selon les observateurs, le « choix des territoires » et s'adresse « à la France péri-urbaine qui travaille », comme il a déjà pu le faire au marché de Rungis le 21 février dernier. De plus, si le format de l'interview a été choisi, c'est qu'il apparaît bien moins formel que celui d'une allocution. L'enjeu : convaincre que cette réforme est indispensable et calmer la colère des manifestants.

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« Un changement de méthode » et un nouvel « agenda des réformes »

Voilà pour la forme. Sur le fond, il ne faut s'attendre à rien de spectaculaire. On sait déjà ce qu'il ne va pas dire :  Il ne faut évidemment pas s'attendre à ce qu'il retire le texte ni, comme il l'a annoncé à son entourage, retirer sa confiance à Elisabeth Borne, sa Première ministre, ou convoquer un référendum. Sans doute prendra-t-il le temps d'expliquer pourquoi la France ne pas faire l'économie de cette réforme. Néanmoins, on peut s'attendre de la part du chef de l'Etat qu'il donne des gages d'apaisement face à la « colère » des Français qu'il faut écouter.

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Vers un nouveau projet de loi sur l'emploi

Ainsi, selon l'un des participants aux réunions qui se sont tenues hier, le chef de l'Etat a demandé à ses troupes de faire « d'ici à deux à trois semaines » des « propositions » en vue d'un « changement de méthode et d'agenda des réformes ». De nouvelles lois explosives vont ainsi être débattues. Le ministre du Travail, Olivier Dussopt, a ainsi annoncé au micro du Sud Radio que des « mesures qui ne relèvent pas de la réforme des retraites » étaient en préparation dans un nouveau projet de loi sur l'emploi. Des ministres plaident pour des mesures plus sociales alors que le débat autour de la loi sur l'immigration, qui devait avoir lieu à partir du 1er mars, a été reporté.

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La contestation se poursuit un peu partout en France

Cette prise de parole et les gages d'apaisement seront-t-ils suffisants pour apaiser la colère de la foule à qui il conteste toute « légitimité » ? Rien n'est moins sûr : la contestation se poursuit un peu partout en France, avec de nouvelles manifestations, parfois émaillées de tensions. À Paris, un face-à-face tendu avec échanges de jets de projectiles et de gaz lacrymogènes a opposé quelques centaines de personnes aux forces de l'ordre place de la République, mardi soir, à l'issue d'un rassemblement syndical qui a réuni jusqu'à 3.500 manifestants, selon la préfecture de police. Des manifestants ont également joué au jeu du chat et de la souris avec les forces de l'ordre dans le quartier de la Bastille. Au total 46 personnes ont été interpellées, selon un bilan policier donné avant minuit. D'autres manifestations ont eu lieu à Grenoble, Rennes, Lille ou Nantes où des incidents, dégradations et échauffourées ont été recensés, notamment au fil de cortèges sauvages. Lors des manifestations de lundi soir, près de 300 personnes ont été interpellées, dont 234 à Paris.

Selon le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, « plus de 1.200 » manifestations non déclarées, « parfois violentes », se sont ainsi déroulées sur tout le territoire depuis jeudi. Il a annoncé que « 12.000 policiers et gendarmes » seraient mobilisés demain, lors de la nouvelle journée de mobilisation, dont « 5.000 à Paris ». Entre 600.000 et 800.000 manifestants, dont 40.000 à 70.000 à Paris sont attendus par les autorités.

En outre, des permanences politiques ont fait l'objet de dégradations, dont celles de LR à Amiens, du député Horizons de la Marne, Xavier Albertini, à Reims ou de son homologue LR Xavier Breton dans l'Ain. Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, s'est dit inquiet de la « colère » et des « violences » qui pourraient s'exprimer du fait de l'adoption d'une loi qui n'avait « pas de majorité à l'Assemblée ».

Des incidents ont éclaté devant le dépôt pétrolier de Fos-sur-Mer après la réquisition de salariés

En parallèle des manifestations, les mouvements de grève se poursuivent dans certains secteurs. Outre la grève reconductible des éboueurs dans plusieurs villes dont Paris, environ 12% des stations-service de France sont à court d'essence ou de gazole et 6% à sec. Les pénuries touchent particulièrement le Sud-Est, notamment le Gard (48% de stations en difficulté) et le Vaucluse (42%). Le manque de carburants touche également quelques départements de l'Ouest, comme la Loire-Atlantique ou l'Ille-et-Vilaine.

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De plus, des incidents ont éclaté mardi devant le dépôt pétrolier de Fos-sur-Mer, où les autorités ont procédé aux premières réquisitions de personnels en grève contre la réforme. Plusieurs centaines de syndicalistes, principalement de la CGT, ont bloqué un des accès au site et allumé des feux de palettes. Selon la préfecture de police, trois des CRS déployés sur les lieux ont été « sérieusement blessés », dont deux au moins ont été transférés à l'hôpital de Martigues. En début d'après-midi, les manifestants ont finalement reculé, le calme est revenu et, selon la préfecture de police, le dépôt fonctionnait normalement.

Les forces de l'ordre sont également intervenues dans la nuit de lundi à mardi pour débloquer le terminal pétrolier de Donges (Loire-Atlantique), occupé depuis une semaine par des grévistes, pour faciliter le déchargement d'une cargaison de gasoil. Au Havre, tous les accès à la zone industrielle ainsi que celui du port ont été bloqués mardi matin.

En ce qui concerne les raffineries, seule une sur les quatre de TotalEnergies est actuellement en fonctionnement, à Feyzin près de Lyon - mais d'où les grévistes empêchent d'ailleurs tout carburant de sortir. Sa plus grande, en Normandie, s'est arrêtée ce week-end, et deux autres (Donges, La Mède) sont arrêtées pour des raisons autres que la grève. La seule raffinerie française de la société Petroineos à Lavéra (Bouches-du-Rhône) s'est également arrêtée à cause de la grève.

Les deux raffineries d'Esso-ExxonMobil tournent encore : celle de Fos-sur-Mer fonctionne en débit minimal; celle de Port-Jérôme-Gravenchon, qui commençait à manquer de pétrole à raffiner, en a reçu lundi, selon la CGT, mais les expéditions restent selon lui bloquées.

Un jeudi noir dans les transports

Par ailleurs, à la veille de la nouvelle journée de mobilisation, jeudi 23 mars, réserver un train dans les prochains jours se révèle aussi très compliqué, sinon impossible tant ceux qui circulent ont été pris d'assaut. La RATP prévoit, de son côté, un trafic « très perturbé » dans les transports de la capitale et de sa proche banlieue. Les compagnies aériennes sont aussi contraintes d'annuler une partie de leurs vols. « Rien n'entame la détermination des travailleurs », a prévenu la CGT.

Politiquement aussi la pression ne retombe pas, après l'utilisation du 49.3 pour faire passer la réforme sans vote. Le rejet de la motion de censure à seulement neuf voix près a redonné de l'énergie aux oppositions. Jean-Luc Mélenchon (LFI) a estimé mardi soir qu'Emmanuel Macron « a mis le feu et fermé toutes les issues » en « passant en force » la réforme. « Il y a à l'Elysée un artificier qui se balade sur les tonneaux de poudre avec une torche », a réagi sur Twitter le chef des socialistes Olivier Faure, qui signe avec 2.500 élus PS une lettre ouverte au président publiée sur le site du JDD pour réclamer le retrait de cette réforme qui « dynamite notre contrat social ». « Le problème, c'est le président de la République », a aussi estimé le chef des députés LR, Olivier Marleix.

La gauche demande notamment un référendum d'initiative partagée (RIP), dont les Sages doivent examiner la recevabilité. Elle compte aussi sur le Conseil constitutionnel, saisi de la réforme. Le Rassemblement national a déposé mardi son propre recours pour que ce texte « soit mis à la poubelle » et Marine Le Pen a prévenu qu'elle ne participerait pas à « éteindre le feu » de la contestation.

(Avec AFP)

Commentaires 17
à écrit le 22/03/2023 à 14:01
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la guerre de l'information contre le président Macron n'est-elle pas celle justement de la Presse (Télévisée) qui dans sa manie de l'instanté déteste le Macron des tweets et autres modes d'expression que Macron utilise au grand dam de ces messieurs d...

à écrit le 22/03/2023 à 13:16
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Avec 2P à a(p)paisement , ça va apaiser plus vite. Les 35 heures ET la retraite à 60 ans ont été des avancées sociales malheureusement non pérennes dans un Monde où la France reste un petit pion et pas le plus fort.

à écrit le 22/03/2023 à 13:06
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Ne jamais oublier que la gauche dont fait partie LFI et les écolos ont appelé à voter Macron contre le RN par pure haine idéologique et ceci à deux reprises. Ajourd'hui ces irresponsable gauchiste viennent pleurer parce que leur protégé fais des dégâ...

à écrit le 22/03/2023 à 12:59
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La pratique habituelle des banquiers: après t'avoir mis un suppositoire, il te propose de suite une nouvelle opportunité évidemment bien plus attractive que la précédente...mais qui se finira de la même façon:.ton argent au chaud chez lui et un nouve...

à écrit le 22/03/2023 à 12:40
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Comme un gosse, il a voulu prouver à "ses parents" que cela n'était pas possible...! Mais, avec une "très" mauvaise volonté ! En fin de compte, c'est un patriote ! ;-)

à écrit le 22/03/2023 à 12:20
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C'est sur que la FRANCE Péri-urbaine qui travaille va se précipiter à la maison pour voir le président pendant la pause déjeuner avec 1h de trajet aller-retour. Surtout qu' y a plus de carburant On peut prendre les gens pour des cons mais faut quand...

à écrit le 22/03/2023 à 12:10
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C'est curieux qu'un jeune président soit si peu enclin à réformer vraiment le pays . Une liste non exhaustive de ce qui ne fonctionne pas du tout Justice Universités Fiscalité confiscatoire Prisons Immigration Régimes spéciaux Écoles Insé...

le 22/03/2023 à 12:45
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Si vous connaissiez la définition du mot "Réforme", vous sauriez que ne n'est pas une adaptation au réel !;-)

à écrit le 22/03/2023 à 11:17
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Depuis une cinquantaine d'années ces politiciens n'ont de cesse de nous expliquer que c'est normal qu'une poignée de milliardaires possèdent autant que la moitié de l'humanité la plus pauvre. En France 5 milliardaires possèdent autant que les 27 mill...

le 22/03/2023 à 12:25
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La vraie question est que les vrais riches et leurs activités n'ont plus aucune nationalité. La libre circulation des capitaux (et des personnes: tous les pays sont près a donner un passeport à un riche citoyen étranger!) rend contre-productif pour u...

à écrit le 22/03/2023 à 11:16
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Tout le monde pense que Macron est nul. Mais alors il faudrait protester contre toutes les oppositions qui l'ont fait réélire. Si un nul gagne ce n'est pas sa faute, c'est la faute de ses adversaires et du peuple infantilisé et assisté incapable de...

le 22/03/2023 à 12:50
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Quand on voit comment on élimine les adversaires par le médiatique pour faire élire quelqu'un sans expérience, on ne se pose pas la question ! ;-)

à écrit le 22/03/2023 à 10:50
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Ils sont insupportables !!! Manuel Valls qui déclarait que la réforme avait été très mal expliquée ! Mais qu'ils arrêtent de nous prendre pour des imbéciles , dés qu'on s'oppose à leurs idées politiquement très orientées, ces gens-là ont une répons...

le 22/03/2023 à 11:13
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Le décalage vient du fait que les français ne connaissent rien en économie. Quand il y aura 1.3 actif pour 1 retraité comment financer ? Sans cette réforme les taux d'intérêts sur la dette française s'envoleraient et la charge de la dette serait insu...

le 22/03/2023 à 12:52
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@marc469 "Sans cette réforme les taux d'intérêts sur la dette française s'envoleraient et la charge de la dette serait insupportable." Entendu 1 million de fois , vous êtes un député LREM? Le problème avec les gens comme vous c'est que vous allez a...

à écrit le 22/03/2023 à 10:11
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"Macron tente de reprendre la main" Il vient de montrer son majeur à la plèbe.

à écrit le 22/03/2023 à 10:05
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Toujours en recherche d'excuse et de bouc émissaire pour nier le résultat de sa politique ! Attendrait il un conflit majeur pour jouer les "matadors"? Pour effacer les déboires antérieurs ? Cela ne serait pas étonnant !

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