Les effets de la pandémie continuent de faire trembler l'économie française. Depuis le printemps, des milliers d'entreprises sont confrontées à une chute spectaculaire de leur chiffre d'affaires. Les vagues d'épidémie ont mis des secteurs entiers en situation de détresse. Dans une note rendue publique ce lundi 14 décembre, le conseil d'analyse économique (CAE) rattaché au Premier ministre a dressé plusieurs scénarios noirs pour l'année prochaine. Si les économistes ne prévoient pas de risques de "zombification" de l'économie tricolore, ils redoutent néanmoins une hausse importante des faillites dans des secteurs très exposés aux différentes mesures de confinement depuis le printemps.
Une hausse importante des défaillances à prévoir dans le commerce
La persistance et le prolongement de la crise économique et sanitaire amplifient les risques de défaillances en 2021. Plusieurs simulations récentes (DG Trésor et OFCE) prévoient des hausses jusqu'à 25% dans les secteurs les plus touchés par rapport à 2018 et 2019. L'hébergement et la restauration apparaissent en première ligne. Dans le secteur du commerce, les économistes du CAE ont pris en compte le rattrapage des défaillances en 2021 qui n'ont pas eu lieu cette année, la baisse de l'activité moyenne en 2020 et 2021 et la montagne de dette accumulée depuis le début de la crise. En faisant tourner leur modèle économétrique, les auteurs de la note estiment que "le surcroît de défaillances à attendre à l'issue de la crise du Covid‐19 dans les entreprises du commerce irait de +2,2% pour les secteurs les moins touchés et jusqu'à plus de 25% dans les secteurs du commerce les plus affectés par la crise". La baisse de la productivité au travail et la hausse du ratio d'endettement pourraient amplement contribuer à cette vague de faillites.
Des défaillances retardées par les interventions publiques
Au cours de cette année, le nombre de défaillances d'entreprises a considérablement diminué par rapport à 2019. Si la suspension de l'activité des tribunaux de commerce au printemps a pu en partie expliquer cette baisse en trompe l'oeil, la reprise des procédures à l'été n'a pas entraîné de fortes hausses des procédures. Par ailleurs, beaucoup d'observateurs ont fait remarquer que certaines mesures techniques permettaient aux entreprises de ne pas se mettre en situation de cessation de paiement sur le plan légal. Ce qui a permis de limiter les hausses de défaillances jusqu'à la fin du mois d'août. Avec le recul, il semble que ces facteurs soient insuffisants pour appréhender ce paradoxe.
Pour les économistes du CAE, ce sont principalement les interventions publiques (Prêts garantis par l'Etat, chômage partiel, fonds de solidarité), les moratoires mis en place par les banques et l'arrêts des assignations en procédure des Ursaff qui ont joué un rôle prépondérant. Plusieurs études récentes menées par la Banque de France ou l'OFCE ont montré que la grande majorité des pertes de revenus liées à la crise (environ deux tiers) avaient été encaissées par les administrations publiques depuis le début de la crise. Dans une très vaste enquête menée auprès de 8.000 entreprises, l'Insee avait montré qu'une forte majorité de dirigeants avaient fait appel aux mesures d'urgence. "Lors du premier confinement, un tiers des entreprises ont connu une baisse d'activité supérieure à 50%. Dès le mois de mars, le gouvernement a mis en place les PGE, le chômage partiel, un moratoire sur les échéances fiscales et sociales, un rééchelonnement des dettes. Près de 4 sociétés sur 5 ont fait appel à des mesures d'urgence" rappelait Sylvain Moreau, directeurs des statistiques d'entreprises lors d'un point presse. Ce vaste soutien pourrait dans les mois à venir diminuer. Ce qui pourrait entraîner un bon nombre d'entreprises dans des situations d'insolvabilité ou de dépôt de bilan.