Fiscalité : après Emmanuel Macron et Elisabeth Borne, Bruno Le Maire continue de cajoler le patronat

À l'occasion de l'université d'été du Medef, le ministre de l'Economie a mis l'accent sur les mesures mises en œuvre en faveur des entreprises. S'il a indiqué que la suppression définitive de la CVAE pourrait intervenir avant 2027, il assure qu'une telle décision ne serait pas dans l'intérêt des entreprises.
« Nous continuerons à baisser les impôts, je ne veux laisser aucun doute sur ce sujet », a martelé le locataire de Bercy.
« Nous continuerons à baisser les impôts, je ne veux laisser aucun doute sur ce sujet », a martelé le locataire de Bercy. (Crédits : KEN CEDENO)

[Article publié le mardi 29 août 2023 à 12h09 et mis à jour à 14h11] L'opération de câlinothérapie se poursuit. Après Elisabeth Borne, le ministre de l'Economie est intervenu lors de l'université d'été du Medef, la Rencontre des entrepreneurs de France (REF), ce mardi 29 août. À cette occasion, il est, une nouvelle fois, revenu sur la fiscalité portant sur les entreprises, sujet épineux en cette rentrée.

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« Nous continuerons à baisser les impôts des entreprises dans les années qui viennent, je ne veux laisser aucun doute sur ce sujet », a martelé le locataire de Bercy, dès le début de son intervention, déclenchant des applaudissements polis au sein de l'assemblée.

Le ministre de l'Economie n'a pas hésité à provoquer l'assistance. « Votre taux d'impôt sur les sociétés, (...) il a augmenté ou baissé depuis six ans ?, a-t-il interrogé, le sourire aux lèvres. Il me semble qu'il a baissé de 33,3% à 25% ! (...) Je n'ai jamais dévié de ligne. (...) Baisser les impôts, c'est bon pour tout le monde ».

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« Si on peut supprimer la CVAE définitivement plus tôt que 2027, nous le ferons »

La semaine passée, le ministre de l'Economie a annoncé le report de la suppression définitive de la Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, un impôt de production, qui se fera de façon étalée jusqu'à la fin du quinquennat et non plus en une seule fois, dès 2024, comme prévu.

« Si on peut supprimer la CVAE définitivement plus tôt que 2027, nous le ferons sans hésitation, mais ce n'est pas dans votre intérêt d'avoir des comptes publics mal tenus », a asséné Bruno Le Maire, évoquant la nécessité d'un budget équilibré afin de garantir la crédibilité de la France sur les marchés mais douchant quelque peu les espoirs du patronat.

La veille, la Première ministre a, elle aussi devant les chefs d'entreprise, assuré l'ambition du gouvernement de le faire « le plus vite possible » mais « avec la nécessité de maintenir notre trajectoire de maîtrise de nos dépenses publiques ». Autrement dit : à un « rythme le plus rapide et compatible avec notre trajectoire de finances publiques ».

« On a aujourd'hui un contexte macro-économique plus incertain que celui que nous pouvions attendre et dont on doit tenir compte », a rappelé à la cheffe du gouvernement, ajoutant que : « Chacun doit prendre sa part, comme l'Etat avec notamment la baisse de 3% des dépenses de l'Etat en volume, pour maintenir notre trajectoire de finances publiques et donc on demande à chacun d'entendre la nécessité de participer à cet effort ».

« Un très mauvais signal » pour le Medef

Mais du côté du patronat, on fustige la décision du gouvernement. « Un nouvel étalement de la suppression de la CVAE serait un très mauvais signal », a ainsi lancé tout de go Patrick Martin, patron du Medef à la Première ministre, assise au premier rang, lundi.

« Nos entreprises, singulièrement nos entreprises industrielles, ont un impérieux besoin de cette suppression immédiate, au moment où la concurrence internationale s'intensifie et où nous devons investir massivement sur la décarbonation », a-t-il ajouté.

Cette suppression annoncée pour 2024 a été intégrée par les entreprises « notamment en termes de décisions d'investissement et d'embauche », et « elle doit intervenir en temps et en heure », a-t-il martelé.

Faire évoluer les normes européennes

Outre la fiscalité, le ministre français de l'Economie, Bruno Le Maire, a appelé mardi à faire « évoluer » les règles européennes pour permettre à l'Union européenne de devenir un « grand continent économique » capable de concurrencer la Chine et les Etats-Unis.

« L'Europe peut être le grand continent économique du 21e siècle avec un modèle économique décarboné, juste, solidaire, plus enviable que le modèle centralisé chinois ou que le modèle américain », a-t-il estimé.

Pour se hisser à « la première place économique », le Vieux Continent se doit de saisir les opportunités offertes par l'intelligence artificielle générative et la nécessaire décarbonation de l'économie face au changement climatique, a-t-il poursuivi devant les patrons réunis à l'hippodrome parisien de Longchamp. « Si nous voulons qu'au 21e siècle la partie se joue entre Etats-Unis, Chine et Europe, et pas dans un face à face dangereux entre le continent chinois et le continent américain, c'est maintenant que ça se joue », a soutenu Bruno Le Maire, estimant primordial que l'UE défende ses « intérêts ».

Il a cité en exemple les subventions pour les voitures électriques, qui devraient bientôt être subordonnées en France à un « score environnemental » susceptible de limiter les importations chinoises. « C'est assez complexe. J'aurais préféré qu'on puisse dire, le bonus européen est réservé à des produits industriels à contenu européen. C'est ce que fait la Chine, c'est ce que font les Etats-Unis, c'est ce que je ne peux toujours pas faire en Europe à cause des normes européennes », a déploré Bruno Le Maire.

« Faisons évoluer les règles européennes pour valoriser le contenu européen, la production européenne, les technologies européennes et l'emploi européen », a-t-il plaidé.

« Soyons transgressifs ! », a-t-il lancé. « On a intérêt à se dépêcher de changer nos normes, de les simplifier et de valoriser le contenu européen si on veut faire pièce à la montée en gamme des Chinois » dans le secteur automobile. Bruno Le Maire a également estimé qu'il y avait « une urgence absolue » à créer l'union des marchés des capitaux au sein de l'UE afin de favoriser les investissements.

(Avec AFP)

Commentaires 5
à écrit le 29/08/2023 à 14:42
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Lorsque j'étais chef d'entreprise jamais je n'ai fait confiance dans la parole de l'Etat, le meilleur et le pire exemple que j'ai vécu du temps de Mitterrand: être taxé rétroactivement en plus value après une cession, car seuls les finances (lois et ...

à écrit le 29/08/2023 à 14:25
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toutes ses promesses ne seront crédibles que lorsque qu'elle seront financées par la diminution des gaspillages !!!!!! pourquoi toujours faire des cadeaux aux entreprises qui ne donnent rien en retour exemple la restauration qui a obtenu une baisse ...

à écrit le 29/08/2023 à 13:56
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Les gouvernements gagneraient à ne pas se rendre aux universités d'été du medef pour écouter les lamentations et les revendications des représentants du patronat qui sur le fond font honte à la grande majorité des chefs d'entreprises .Depuis le début...

le 29/08/2023 à 14:49
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Les affidés de la finance (les gouvernements) ne veulent pas entendre la vérité et pour cause. Totalement fondu dans le moule "mainstream" de l'économie financiariée, ils ont fait fi des avertissements de l'économiste W. Lazonick en 2014 sur les "pro...

à écrit le 29/08/2023 à 13:11
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Mais comment faire confiance à une troupe qui se rêve, cette fois-ci, en "Chicago boys" français? L'utilisation outrancière de la face sombre d'une discipline des sciences économiques par le pouvoir en place - pourtant louable à la base et issue de l...

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