Jamais l'Autorité de la concurrence française ne s'était autant prononcée sur des opérations de rachat et de fusion d'entreprises. Avec un nombre records d'opérations l'an dernier, le marché des fusions-acquisitions a connu une année exceptionnelle en France et à l'étranger. La pandémie a en effet bouleversé des pans entiers de l'économie, fait naître de nombreuses opportunités de rachats d'entreprises devenues vulnérables par d'autres groupes renforcés par le Covid, ayant un accès à des liquidités abondantes.
L'institution, chargée depuis 2008 de garantir une concurrence loyale entre acteurs économiques, a indiqué avoir rendu 272 avis sur des projets de concentration en 2021, contre 195 en 2020. Dans l'immense majorité des cas, l'Autorité de la concurrence a autorisé les opérations sans exiger d'engagements aux entreprises concernées, jugeant que le respect de la concurrence n'était pas en danger sur leurs marchés respectifs.
Un projet d'ampleur rejeté
Le seul projet de concentration interdit concerne le rachat de la Société du Pipeline Méditerranée-Rhône par le groupe Ardian. L'Autorité de la concurrence y a vu un risque de « monopole » et de « hausses tarifaires » sur le marché. Une autre décision de l'institution est particulièrement attendue autour du projet de fusion entre TF1 et M6, qui devrait être rendue « à la fin de l'été ».
En termes de répression, l'Autorité a imposé un total de 873,7 millions d'euros d'amende en 2021, moins qu'en 2020 (1,79 milliard d'euros) mais plus que les montants de ces dernières années. Le géant du numérique Google a subi 720 millions d'euros de sanctions en 2021 pour deux affaires liées aux droits voisins du droit d'auteur, et à la publicité en ligne.
Dans son rapport annuel, l'Autorité détaille et vante son action. Elle estime sur les dix dernières années (2011-2021) avoir fait gagner 18,5 milliards d'euros à l'économie française. Un chiffre qu'elle avance en additionnant des amendes (7,6 milliards d'euros) et les surcoûts évités pour cause de comportements anticoncurrentiels (10,9 milliards d'euros), qu'elle affirme avoir évité.
La crainte des cartels et des ententes
L'Autorité s'inquiète enfin de l'émergence de cartels et d'ententes entre entreprises pour imposer des hausses injustifiées de prix au consommateur au risque d'aboutir « à des situations de surprix importantes, qui peuvent être lourdes à supporter pour les consommateurs comme les entreprises », note-t-elle. « Pour donner un ordre de grandeur, plusieurs études économiques concluent à des surprix de l'ordre de 17% en moyenne en Europe », alerte le gendarme de la concurrence.
Le respect de la concurrence est également une prérogative de la Commission européenne, qui a le pouvoir de bloquer les fusions et acquisitions d'entreprises européennes comme elle l'avait fait en 2019 entre le français Alstom et l'allemand Siemens. La politique concurrentielle de Bruxelles, centrée sur la protection du consommateur qu'elle veut prémunir des « surprix » fait l'objet de nombreuses critiques qui fustige ce « dogme » de la concurrence. Comme dans le dossier Alstom-Siemens, la Commission bloque parfois - contre l'avis des Etats concernés - des rapprochements qui renforceraient les entreprises européennes dans une compétition mondiale où les autres puissances, Américains et Chinois en tête, ne s'embarrassent plus de considérations sur la concurrence quand il s'agit de protéger leurs champions nationaux.
(Avec AFP)
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