Les nuages s'accumulent au-dessus de l'économie française. Entre les tensions sur les prix de l'électricité, l'inflation soutenue et les déboires de la Chine, les chocs s'accumulent sur les ménages et les entreprises. Dans sa dernière enquête de conjoncture dévoilée ce mercredi 11 janvier, la Banque de France table sur une maigre croissance du produit intérieur brut (PIB) de 0,1% au premier trimestre, après 0,1% au dernier trimestre 2022. « Nous confirmons notre précédente prévision de décembre, » a déclaré le directeur des études, Olivier Garnier, lors d'une réunion avec des journalistes. Les chiffres de la Banque de France pour les trois derniers mois de l'année sont plus optimistes que ceux de l'Insee. L'institut public tablait sur un recul de -0,2% au dernier trimestre 2022.
En revanche, les économistes des deux institutions se sont accordés sur le premier trimestre (+0,1%). Lors d'une audition au Sénat ce mercredi en fin de matinée, le gouverneur de la banque centrale, François Villeroy de Galhau, a déclaré : « jusqu'à présent l'activité nous a plutôt surpris en bien et l'inflation nous a surpris en mal [...] 2023 devrait marquer un fort ralentissement mais échapper à l'atterrissage brutal redouté il y a quelques mois. La croissance devrait être faiblement positive à 0,3% en 2023. »
Dans ses voeux aux acteurs de l'économie il y a quelques jours, le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire a une fois de plus affirmé que « l'économie française résiste, » soulignant que la croissance du PIB avait progressé de 2,5% en 2022. En revanche, il n'a pas donné de chiffre pour 2023 en précisant simplement qu'elle serait « positive ». Pour rappel, l'exécutif tablait sur une croissance de 1% cette année dans le budget 2023. Un chiffre qui semble de moins en moins crédible aux yeux de beaucoup d'économistes.
Crise énergétique : « pas d'aggravation »
Sur le plan énergétique, la guerre en Ukraine a provoqué une onde de choc partout en Europe. Les économies dépendantes du gaz et du pétrole russes ont dû rapidement trouver des moyens de substitution à des coûts exorbitants. A cela se sont ajoutées les pannes et les problèmes de maintenance sur le parc nucléaire français. Avec les températures clémentes de l'hiver, la consommation ne s'est pas envolée et les craintes de coupures du mois de janvier se stabilisent. Dans les différentes enquêtes menées par la Banque de France, « il y a assez peu d'évolution sur la crise énergétique. Il n'y a pas d'aggravation du côté des entreprises, » a constaté Olivier Garnier.
Sans surprise, la part des entreprises déclarant être affectées « fortement » en décembre par la crise énergétique est bien plus élevée dans l'industrie (8%) que dans le bâtiment (4%) ou les services (3%). Au niveau global, l'impact de cette crise si l'on prend en compte tous les secteurs est en légère diminution au cours des trois derniers mois de l'année, passant de 25% à 23%.
Concernant les mois à venir, le pourcentage des entreprises anticipant un impact « significatif » de la crise énergétique sur leur activité est en baisse. En revanche, les entreprises industrielles (16%) sont bien plus nombreuses à redouter des répercussions « fortes » que dans le bâtiment (8%) ou les services (6%).
Le pic d'inflation attendu au premier semestre 2023
S'agissant de l'inflation, elle reste « beaucoup trop élevée » a affirmé le gouverneur de la Banque de France devant les sénateurs ce matin. « Les ménages et les entreprises le ressentent fortement. L'inflation devrait atteindre son pic au cours de ce premier semestre avant de redescendre autour de 4% en fin d'année, » a-t-il poursuivi. Il a annoncé que l'inflation devrait revenir à 2% entre la fin de l'année 2024 et la fin 2025. « C'est notre mandat », a-t-il martelé.
L'augmentation spectaculaire des prix de l'énergie depuis la fin de l'année 2021 est venue grignoter le pouvoir d'achat des ménages et percuter l'activité des entreprises en dépit des mesures de bouclier tarifaire et la remise sur les carburants. Même si les prix de l'énergie ont commencé à marquer le pas, le bouclier tarifaire moins généreux depuis le premier janvier et la fin de cette ristourne risquent de repousser l'échéance d'une inflation plus modérée. Reste savoir si le resserrement monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) ne va pas précipiter l'économie européenne dans une spirale récessive.