« Il est crucial que les PME et les TPE enclenchent une transition ». À la veille du coup d'envoi de la COP28 à Dubaï, le gouvernement veut mettre la pression sur les entreprises tricolores. Après dix mois de travail, les ministres Olivia Grégoire (PME) et Christophe Béchu (Ecologie) ont lancé la plateforme Mission Transition Écologique.
« Le but est simple : permettre aux entreprises de mieux connaître les aides existantes et d'activer les opérateurs de l'Etat pour les mettre en œuvre », a déclaré la ministre lors d'un point presse au ministère des Finances.
Une semaine après la signature des contrats de transition avec les 50 sites les plus polluants, l'exécutif tente « d'embarquer » les plus petites structures. « Nous remporterons la transition écologique à condition de remplir de certains défis [...]. Il faut éviter d'éviter d'encourager une économie à deux vitesses entre les grandes entreprises et les petites », a insisté Olivia Grégoire.
Au printemps, les deux ministres avaient annoncé en avant-première dans les colonnes de La Tribune les grandes ambitions de cette feuille de route dans une ambiance tendue. A l'époque, le vote de la motion de censure à l'Assemblée nationale contre la réforme contestée des retraites pouvait faire imploser l'exécutif. Désormais, l'ambiance est plus apaisée dans les rangs de la Macronie. En revanche, les chantiers pour réussir la transition écologique demeurent titanesques.
Plus de 300 aides pour un total de 2 milliards d'euros
Subventions, crédits d'impôts, aides directes, accompagnement, conseils... La liste des dispositifs pour accompagner les entreprises dans la transition écologique n'a cessé de s'allonger ces dernières années. Dans un rapport très fouillé de l'Inspection générale des finances (IGF), dévoilé il y a quelques jours, les fonctionnaires ont recensé près de 340 aides différentes pour un montant global de 2 milliards d'euros.
« C'est beaucoup ! s'est exclamée la ministre. Est-ce adapté aux PME et TPE ? Les entrepreneurs nous ont fait part que les aides n'étaient pas à portée de clic ».
Et pour cause, « la multiplication des "guichets uniques", facteur de complexité, peut générer un phénomène de non-recours », souligne la haute administration.
Interrogée sur la proportion de non-recours aux aides, la ministre des PME a botté en touche. « Nous ne sommes pas au rendez-vous d'un comptage précis. Il n'existe pas de chiffrage sur le taux de recours et de non-recours. Nous avons simplement une vision approximative », a affirmé l'ancienne députée La République en marche. Derrière « ce maquis » dénoncé par le patronat, le gouvernement a insisté sur sa volonté de « simplifier ». Mais la tâche semble colossale.
« La neutralité carbone loin d'être atteinte en 2050 »
Pour parvenir à l'objectif de baisse des émissions inscrit dans l'Accord de Paris, la France va devoir accélérer ses efforts. « On doit faire en sept ans, ce qu'on a fait en 33 ans », a répété le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu. Pour rappel, l'Hexagone doit diminuer ses émissions de CO2 de 55% d'ici 2030 par rapport au niveau de 1990 (Plan fit for 55) et atteindre la neutralité carbone en 2050. Une cible difficilement réalisable, selon les services statistiques du ministère de l'Energie. Dans un récent document dévoilé par le site d'informations Contexte, il est clairement écrit que « la neutralité carbone [serait] loin d'être atteinte en 2050 ».
Aux manettes de la transition, Antoine Pellion, secrétaire général de la planification écologique interrogé par La Tribune estime que « les entreprises font partie de la solution. Il y a bien sur 50 les grands sites avec les contrats, mais chacun doit faire sa part. L'idée est de rendre ces outils accessibles à tous ». Une gageure à un moment où le gouvernement ne veut absolument pas froisser les entreprises.
Une grande partie des PME et entreprises de taille intermédiaire (ETI) européennes accusent un sérieux retard. Selon un baromètre réalisé par le Boston Consulting Group (BCG) et le fonds d'investissement Argos Wityu, « seuls 11% » des dirigeants interrogés ont une approche structurée comprenant « la mesure de leurs émissions de GES, la conception d'une feuille de route et le déploiement d'investissements substantiels ». « Le chemin vers une approche structurée et globale, permettant de saisir la complexité de ce processus sera long », a averti Fabien Hassan du cabinet de conseil lors d'un point presse en septembre.Décarbonation : le retard inquiétant des PME en Europe