Les faillites contenues, les PGE devraient coûter moins cher à l'Etat que redouté"

Les prêts garantis par l'Etat (PGE) ont joué le rôle d'amortisseur pendant la première partie de la pandémie en limitant drastiquement le nombre de faillites rappelle une étude de l'institut des politiques publiques (IPP). La sortie de crise pourrait être fatale si la détection des entreprises en difficulté annoncée par le gouvernement n'est pas efficace.
Grégoire Normand
(Crédits : Reuters)

Les effets de la crise se prolongent de jour en jour. Au moment de la réouverture de l'économie française et du débranchement progressif des aides, un grand nombre d'entreprises vont devoir commencer à rembourser les prêts garantis par l'Etat (PGE) souscrits depuis le début de la crise. Et les sommes sont colossales. Selon une note de l'institut des politiques publiques (IPP) dévoilée ce 9 juin, plus de 130 milliards d'euros ont été accordés en France jusqu'en août 2020 contre 55 milliards d'euros en Italie et 40 milliards d'euros en Allemagne.

Ce dispositif a ainsi permis d'injecter rapidement d'importantes sommes de liquidité dans les comptes des entreprises afin d'éviter une hécatombe. Beaucoup de défaillances ont été évitées en 2020 en raison du déploiement massif des aides. Il reste que le prolongement de la crise et la multiplication des vagues d'épidémie et de confinements ont clairement assombri les capacités des sociétés à rembourser ces sommes. En outre, beaucoup d'économistes et de décideurs redoutent un report des défaillances d'entreprises dites "zombies", qui étaient déjà en difficulté avant la pandémie.

Malgré ce contexte, les économistes de l'IPP jugent que l'hypothèse d'une défaillance après un PGE est minime à court terme. "Avec une moyenne inférieure à 1 % entre mars 2020 et mars 2021, la probabilité de faillite s'est effectivement révélée très faible sur cette période" expliquent-ils.

Une sélection en amont par les banques, des PGE à des fins "d'assurance"

Comment expliquer un si faible niveau de défaillance ? Le premier facteur avancé par les chercheurs est que les PGE ont eu "un effet protecteur" en limitant le risque d'illiquidité des entreprises. En effet, beaucoup d'établissements ont demandé des prêts garantis par la puissance publique pour faire face au trou d'air d'activité provoqué par la mise sous cloche de l'activité et non pour faire face à des problèmes de trésorerie antérieurs à la crise. Pour celles qui étaient dans cette situation, elles ont eu très peu recours aux prêts garantis par l'Etat.

En outre, même si la puissance publique a pu garantir une grande majorité des prêts, beaucoup d'établissements bancaires ont refusé l'octroi de sommes aux entreprises les plus fragiles. Les économistes évoquent un effet de sélection.

"Les entreprises les plus rentables n'ont pas eu besoin du dispositif, tandis que les entreprises les moins rentables se sont probablement vues refuser des prêts en dépit de la garantie d'État" indiquent-ils.

Enfin, un nombre non négligeable de firmes ont eu recours à ce dispositif par précaution.

"La majorité des entreprises a contracté un PGE principalement à des fins d'assurance, et a donc compensé l'accroissement d'endettement par un stock de liquidités équivalent" ajoutent les auteurs.

Une sortie de crise délicate

Le débranchement des aides annoncé par le Premier ministre Jean Castex il y a un mois pourrait faire, en revanche, des ravages dans les rangs des entreprises. Ce dégel de l'économie française risque de laisser apparaître des situations financières extrêmement tendues et un rattrapage des faillites qui n'ont pas eu lieu en 2020. Dans un récent rapport parlementaire, le sénateur (LR) Jean-François Husson s'interrogent sur les conséquences à plus long terme des PGE. L'élu met notamment en garde sur les différents types de faillites possibles à venir. Il s'agit de distinguer :

"Le rattrapage naturel des défaillances reportées en 2020 et une progression spontanée en raison de la dégradation de la situation financière des entreprises au cours de la crise. D'un point de vue économique, il est crucial de bien différencier ces deux facteurs, dans la mesure où si le premier correspond à un retour au processus normal de réallocation, le second pourrait conduire à une altération de la croissance potentielle, certaines entreprises productives faisant faillite."

Pour répondre aux besoins de fonds propres des entreprises, le gouvernement a voulu mettre l'accent sur les prêts participatifs mais ce dispositif peine à décoller. Face à l'immense défi de la sortie de crise et des PGE, le sénateur préconise d'agir en trois temps :

  • "identifier, afin de repérer le plus en amont possible les entreprises dont la situation financière est trop dégradée pour qu'elles s'en sortent sans un accompagnement "sur-mesure" ;
  • orienter, afin de déterminer la réponse adéquate sur la base d'un diagnostic partagé entre les acteurs à propos de la nature des difficultés rencontrées et des perspectives de l'entreprise ;
  • traiter, afin de mobiliser l'outil le plus adapté pour permettre à l'entreprise viable de se redresser."

Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire et le ministre de la Justice Eric Dupond Moretti ont récemment annoncé la mise en œuvre d'outils pour améliorer la détection des entreprises en situation de détresse. En attendant, beaucoup de TPE et de PME s'interrogent sur leur capacité à rebondir après un tel cataclysme.

Grégoire Normand
Commentaire 1
à écrit le 11/06/2021 à 9:12
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monsieur lagardère peut dire merci a son ami fraîchement élu au conseil d'administration !!!

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