Partage de la valeur  : l'Assemblée nationale impose des obligations aux entreprises, les oppositions sont dubitatives

L'Assemblée nationale a voté mardi l'obligation pour les petites entreprises rentables de mettre en place un dispositif de « partage de la valeur », et pour celles d'au moins 50 salariés faisant des bénéfices exceptionnels de négocier une redistribution. A l'exception du groupe LR, les oppositions plaident pour des revalorisations salariales.
Après un vote des députés, les les petites entreprises rentables seront dans l'obligation de mettre en place un dispositif de « partage de la valeur ».
Après un vote des députés, les les petites entreprises rentables seront dans l'obligation de mettre en place un dispositif de « partage de la valeur ». (Crédits : Reuters)

Les députés veulent des entreprises un peu plus généreuses avec leurs salariés. Ils ont commencé par voter - dans le cadre d'un projet de loi examiné depuis lundi, qui transpose un « accord national interprofessionnel » (ANI) entre quatre syndicats, sans la CGT, et le patronat - l'obligation pour les petites entreprises rentables de mettre en place un dispositif de « partage de la valeur ».

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Plus précisément, l'article adopté mardi (117 voix pour, 17 contre venant de la gauche) rend obligatoire pour les entreprises ayant de 11 à 49 employés, dont le bénéfice net représente au moins 1% du chiffre d'affaires pendant trois années consécutives, de mettre en place au moins un des dispositifs de « partage » existants. Il peut s'agir de mécanismes de participation, d'intéressement, d'abondement d'un plan d'épargne salariale, ou encore de versement d'une prime dite Macron. La mesure prend la forme d'une expérimentation de cinq ans, à partir de 2024.

« Bénéfices exceptionnels »

L'Assemblée a aussi approuvé (125 voix contre 23) une nouvelle obligation pour les entreprises d'au moins 50 salariés. La disposition leur impose, quand elles sont pourvues d'un délégué syndical et qu'elles enregistrent une « augmentation exceptionnelle » de leurs bénéfices, d'engager une négociation sur leur partage. La gauche a pilonné sans succès des retouches apportées par le camp présidentiel à cette mesure telle qu'elle était issue de l'ANI.

« Vous avez opéré un glissement sémantique », a déploré la députée écologiste Eva Sas, regrettant que le projet de loi évoque non pas une situation de « résultats exceptionnels », mais une « augmentation exceptionnelle du bénéfice ». Une formulation qui permettrait, selon elle, de jouer plus facilement sur la période de référence. « Beaucoup d'entreprises qui font des bénéfices importants auront les moyens d'éviter le partage de cette manne » du fait de ce changement, a appuyé le député communiste Hubert Wulfranc.

Des oppositions dubitatives

Le ministre du Travail Olivier Dussopt s'est défendu d'avoir dénaturé l'accord des partenaires sociaux. Il a expliqué que ces changements répondaient à des critiques du Conseil d'Etat. « Le tout a été fait avec l'accord des signataires » de l'ANI, a-t-il insisté. Des amendements du camp présidentiel ont par ailleurs précisé que, pour définir ce qu'est une « augmentation exceptionnelle », il faudra prendre en compte des critères comme la taille de l'entreprise, le secteur d'activité ou encore les bénéfices des années passées. L'ANI ne « prévoyait aucun critère » et « laissait l'appréciation au chef d'entreprise », souligne le ministre du Travail invoquant, là encore, une exigence du Conseil d'Etat. Les groupes de la Nupes ont également critiqué une mesure n'imposant qu'une négociation. « Rien ne dit ce qui se passe si elle échoue, il y a un trou dans la raquette », a martelé l'Insoumis Matthias Tavel.

Mis à part le groupe LR, les oppositions sont dubitatives sur les mécanismes proposés dans le projet de loi, l'ensemble de la gauche, ainsi que le Rassemblement national, appelant à agir d'abord sur les salaires. Les députés de gauche ont ainsi multiplié les tentatives pour engager des revalorisations du SMIC, encadrer les écarts de salaires entre employés et patrons, et sanctifier une « non-substitution des primes aux hausses de salaires ». Invoquant une note de l'Insee selon laquelle les primes Macron pourraient s'être substituées à hauteur « d'environ 30% en moyenne à des revalorisations » de salaire fin 2022, ils ont préconisé d'inscrire dans la loi le fait que des sommes versées au titre de « l'intéressement », de la « participation », ou d'une prime de partage de la valeur, ne peuvent se substituer aux salaires. Au Rassemblement national aussi, on affirme que l'augmentation des salaires « reste le meilleur partage de la valeur ».

La cheffe du gouvernement Elisabeth Borne, lors de la présentation de la feuille de route pour les « 100 jours » avait appelé « à agir collectivement » en demandant aux entreprises une « revalorisation des grilles salariales ». L'examen du texte doit se poursuivre ce mercredi.

 (Avec AFP)

Commentaires 2
à écrit le 28/06/2023 à 20:35
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A quand l'obligation pour un salarié d'investir dans une entreprise pour pouvoir y être embauché et continuer d'y travailler ? C'est pourtant la même logique : soit c'est un salarié et il n'a pas à recevoir autre chose que son salaire (sauf gratifica...

à écrit le 28/06/2023 à 12:36
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Bien entendu qu'ànd il y a des pertes exceptionnelles ca sera aussi partagé...

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