Pétrole : pas de pénurie en vue en France malgré les tensions en mer Rouge

Les attaques en mer Rouge perturbent fortement le commerce maritime mondial. Les cours du pétrole augmentent depuis lundi portés par la crainte des investisseurs de voir ces incidents perdurer. Pour autant, ils ne devraient avoir qu'une portée limitée sur les prix de l'or noir ainsi que sur le risque de pénurie.
Les attaques en mer Rouge de ces dernières semaines commencent sérieusement à porter un coup au commerce maritime mondiale.
Les attaques en mer Rouge de ces dernières semaines commencent sérieusement à porter un coup au commerce maritime mondiale. (Crédits : Reuters)

Les attaques en mer Rouge de ces dernières semaines commencent sérieusement à porter un coup au commerce maritime mondial. Les grands armateurs Maersk, CMA CGM (propriétaire de La Tribune), Hapag-Lloyd, MSC et plus récemment le Hongkongais Evergreen et le pétrolier britannique BP ont décidé d'arrêter d'emprunter ce passage pour une durée temporaire. Les rebelles Houthis du Yémen, soutenus par l'Iran, s'en prennent à des navires commerciaux qui ont des intérêts avec Israël dans le détroit de Bab el-Mandeb. Ce point de passage stratégique qui relie la mer rouge au golfe d'Aden est surtout situé juste avant le canal de Suez. De par sa position stratégique, le détroit voit alors passer un peu plus de 10% du commerce maritime mondial.

Mais au-delà des porte-conteneurs, c'est le passage des tankers qui inquiète. Une grosse partie de l'or noir circule par cette voie, située proche du golfe Persique. Rien qu'au premier semestre 2023, d'après les chiffres de l'agence d'information sur l'énergie des États-Unis, environ 12% du total du pétrole négocié pour le commerce maritime et près de 8% du commerce mondial de gaz naturel liquéfié (GNL) ont transité par cette zone au premier semestre 2023.

La multiplication des attaques - deux ont encore eu lieu ce lundi - et la décision de BP ont fait bondir le prix du pétrole. Ce mardi, le prix du baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en février prenait encore 1,19%, à 78,88 dollars vers 15h55, heure de Paris. Son équivalent américain, le baril de West Texas Intermediate (WTI) pour livraison en janvier, est monté de 1,12%, à 73,28 dollars.

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Un détour qui coûte cher

Une hausse qui traduit l'inquiétude des investisseurs sur l'approvisionnement de l'Europe. En effet, le changement d'itinéraire oblige les navires à contourner l'Afrique par le Cap de Bonne-Espérance, ajoutant en moyenne deux semaines environ de temps de transport aux pétroliers. Un crochet qui coûte cher : « Un pétrolier passant par le canal de Suez coûte en moyenne 32.00 dollars par jour », explique Paul Tourret, directeur de l'institut supérieur d'économie maritime (ISEMAR), « avec un détour équivalent à quinze jours, le coût d'un voyage se chiffre donc aux alentours de 500.000 dollars ».

Comme les bateaux doivent réaliser des trajets plus longs, ils sont dès lors mobilisés plus longtemps. Moins de navires sont disponibles, une situation qui tend à augmenter le prix du transport d'hydrocarbures. Le stock pétrolier est également immobilisé sur une plus longue période en mer, ce qui peut créer un « appel d'air le temps de constituer des stocks liés à la durée de transport supplémentaire », note Olivier Gantois, président du conseil d'administration chez UFIP Energies et Mobilités. Les prix du pétrole augmentent donc légèrement « à cause de la nervosité des marchés et de la demande supplémentaire à cause de trajets plus longs », résume l'expert.

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Des conséquences à minimiser

Pour autant, il n'y a pas de quoi s'alarmer. C'est surtout la guerre en Ukraine, la Russie étant le deuxième producteur mondial, qui maintient des cours élevés. Les pays de l'Opep se sont également entendus avec la Russie pour augmenter la réduction de leur production afin de soutenir les prix et d'éviter les à-coups sur le marché, ce qu'on appelle « la discipline de l'Opep ». Du côté de la demande mondiale, elle continue d'augmenter malgré le ralentissement de la Chine.

« Ces principaux déterminants de l'offre et de la demande de brut depuis décembre 2022 ne sont pas affectés par les événements en mer Rouge », indique Olivier Gantois. « Les rebelles du Yémen n'ont donc pas d'impact majeur sur le marché du pétrole », tranche-t-il, estimant que les prix allaient rester dans une fourchette comprise entre 75 et 85 dollars le baril.

Pas d'inquiétude également à avoir du côté des stocks en France, puisque le pays possède d'avance l'équivalent de trois ou quatre mois de réserves. « Le fait qu'on décide de ne pas passer par le canal de Suez est une situation que l'on a connue par le passé, et ne crée pas de risque de pénurie », rassure Olivier Gantois.

Les pays empruntant le détroit stratégique ont déjà commencé à riposter pour mettre fin aux attaques. « Les Houthis, en agressant les intérêts économiques occidentaux, s'apprêtent à recevoir un coup de bâton », commente Paul Tourret. Les Etats-Unis ont annoncé lundi lancer « Prosperity Guardian », une opération navale multinationale composée d'une coalition de dix pays dont la France, pour protéger le transport maritime. De quoi calmer les marchés. Mais malgré cette annonce, le pétrole remontait après les menaces des rebelles Houthis de poursuivre leurs attaques.

Commentaires 2
à écrit le 20/12/2023 à 14:06
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La notion de terrorisme commence comme cela, par des insinuations ! ;-)

à écrit le 20/12/2023 à 9:03
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C'est pour dire comme la crise économique fait du mal en ce moment et partout dans le monde.

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