Présidentielle : après cinq ans de "en même temps", les maires ruraux entrent en campagne

A cinq jours du premier tour de l'élection présidentielle, l'association des maires ruraux, qui représente 10.000 communes de moins de 3.500 habitants, met sur la table 20 propositions. Si son président Michel Fournier dresse un bilan "mitigé" du quinquennat qui s'achève, il souligne avoir toujours accepté la main tendue du chef de l'Etat sortant.
César Armand
Le président de l'association des maires ruraux de France (AMRF), Michel Fournier, est maire (Sans étiquette) des Voivres (Vosges) depuis 1989.
Le président de l'association des maires ruraux de France (AMRF), Michel Fournier, est maire (Sans étiquette) des Voivres (Vosges) depuis 1989. (Crédits : Hugo Guillemin)

Ils ont l'habitude de se présenter comme des "maires militants". A cinq jours du premier tour de l'élection présidentielle, l'association des maires ruraux de France (AMRF), qui représente 10.000 communes de moins de 3.500 habitants, entre en campagne avec 20 propositions.

Un bilan "mitigé" du quinquennat

La première selon eux consisterait à abonder un fonds spécifique pour accélérer la rénovation du bâtiment - déjà objet de milliards d'euros dans le cadre de France Relance et du budget 2022 -, ou encore de permettre aux communes volontaires de recouvrer tout ou partie des compétences obligatoires transférées aux intercommunalités. Par exemple, dans les domaines de l'eau et de l'assainissement, sur lesquelles les communes n'ont plus la main.

"Il suffisait de nous dire que cette compétence n'était pas obligatoire mais au lieu de ça, les technocrates parisiens l'ont imaginée de façon technique", s'agace le président des maires ruraux, Michel Fournier.

Maire (Sans étiquette) des Voivres (330 habitants, Vosges) et vice-président de l'agglomération d'Epinal (78 communes, 116.000 habitants), l'élu dresse, plus généralement, un bilan "mitigé" du quinquennat qui s'achève. Parmi les motifs de satisfaction, la reconnaissance de "la structure et de l'indépendance" de l'association des maires ruraux.

 "Un mois et demi après son élection, le président de la République nous a reçus à l'Elysée. J'avais déjà échangé avec Emmanuel Macron quand il était ministre de l'Economie, mais là, c'était une première", se souvient Michel Fournier.

La politique de la main tendue de Macron

A la différence de l'Association des maires de France (AMF), de l'Assemblée des départements de France (ADF) et des régions de France (ex-ARF) qui jouent depuis 2018 la carte de l'opposition, les maires ruraux ont toujours accepté la main tendue de l'actuel chef de l'Etat.

"Le président, qui n'avait jamais été élu auparavant, n'avait peut-être pas tout à fait compris que la proximité était quelque chose d'important et que les maires ruraux étaient les médiateurs pour assurer l'équilibre sociétal", justifie Michel Fournier. "Quand nous avons ensuite tiré la sonnette d'alarme et d'alerte, le Premier ministre de l'époque (Edouard Philippe, Ndlr) ne l'a pas sentie alors que le président l'a comprise", ajoute-t-il.

Le président de l'AMRF fait ici référence au mouvement des "gilets jaunes", démarré en novembre 2018 suite à la hausse des prix du carburant. "Nous, on voyait des gilets jaunes sous les pare-brise alors qu'à Paris, ils n'en voyaient pas, sauf quand quelqu'un venait de l'extérieur", poursuit Michel Fournier.  A la différence des populations des grandes villes qui bénéficient d'importants modes de transports, les habitants des villages ont en effet besoin de leur voiture pour faire une course alimentaire ou travailler.

Dans le cadre du "grand débat national", les ruraux ont alors pris l'initiative d'ouvrir des cahiers de doléances en mairie, qu'ils ont ensuite transmis dès janvier 2019 à Emmanuel Macron, ainsi qu'aux présidents de l'Assemblée Richard Ferrand (LREM) et du Sénat Gérard Larcher (LR). Tant est si bien que trois mois plus tard, la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les Collectivités territoriales Jacqueline Gourault charge un député, trois maires et un sénateur de plancher sur un "agenda rural".

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"L'équité et la responsabilité doivent compléter le triptyque liberté-égalité-fraternité"

Dévoilé en juillet 2019 et repris par le Premier ministre Edouard Philippe en septembre 2019, l'agenda rural est aujourd'hui qualifié de "règlement de bonne conduite des décideurs nationaux" par Michel Fournier. Un agenda qu'il appelle à "booster" et à "rendre opérationnel dans tous les départements".

Dans la liste des desiderata ayant obtenu une réponse favorable, l'édile cite par ailleurs la nomination en juillet 2020 par le Premier ministre Jean Castex de Joel Giraud, rapporteur général du budget à l'Assemblée, au poste - très attendu - de secrétaire d'Etat à la Ruralité. Une demande historique de l'association des maires ruraux.

Impliqués par l'actuel exécutif dans les lois "Engagement et proximité" et "3DS" - décentralisation, déconcentration, différenciation et simplification de l'action publique - "qui ont permis d'apporter quelques correctifs" à la loi Nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRé) de 2015, ces derniers espèrent désormais que leur programme sera "le livre de chevet des deux finalistes" de l'élection présidentielle.

"L'équité et la responsabilité doivent compléter le triptyque liberté-égalité-fraternité", martèle Michel Fournier. "Ce n'est pas dû à ce gouvernement, mais nous ne pouvons plus tolérer les déserts médicaux et nous n'acceptons plus les différentes de traitement sur la dotation globale de fonctionnement", insiste le président des maires ruraux.

Une remise à plat de la fiscalité locale

Pour cela, il plaide pour la suppression de l'écart de dotation "et de considération" entre ruraux et urbains dans toute l'action publique "pour un aménagement équilibré du territoire". Depuis la fin de la taxe d'habitation (acquittée par tous les résidents) dans les communes, quoique compensée par la taxe foncière (payée par les propriétaires, Ndlr), tous les maires demandent d'ailleurs une remise à plat de la fiscalité locale.

Mais dans ce domaine, le candidat-président Macron a déjà annoncé 10 milliards d'euros d'économies sur le prochain mandat reposant sur les collectivités territoriales ainsi que la disparition de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Quitte à plaire aux chefs d'entreprise tout se remettant à dos les élus locaux...

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César Armand
Commentaire 1
à écrit le 06/04/2022 à 8:12
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Bah logique vu que l’électorat de macron qui demande aux actifs de toujours plus se sacrifier méprisant abondamment les jeunes est à peu près dans la moyenne d'âge des maires. C'est qu'il est bien fait notre cercle vicieux.

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