Ils sont 101 et tous les Français les connaissent. Il s'agit des départements. Leur mission principale: l'action sociale. L'enfance d'abord, via l'aide sociale à l'enfance (ASE), la protection maternelle et infantile (PMI), l'adoption... Les personnes handicapées aussi, avec les politiques d'hébergement et d'insertion sociale. Les personnes âgées également, avec la création et la gestion de maisons de retraite (EHPAD). Les prestations légales d'aide sociale enfin, comme le revenu de solidarité active (RSA).
Ce revenu est payé en majorité par le conseil départemental via la Caisse d'allocations familiales (CAF), mais son montant reste fixé au niveau national. Ce 1er avril 2022, le RSA, versé à toute personne d'au moins 25 ans sans ressources, vient d'être augmenté de 15,78 euros. Autrement dit, 575,52 euros par mois pour une personne seule et sans enfant, 1.035,94 euros pour un couple avec un enfant à charge, et 836,28 euros pour une personne seule avec deux enfants.
Dialogue de confiance "à renouer"
"J'ai découvert cette revalorisation dans le journal ce matin. Nous n'avons pas été informés. C'est une curieuse façon de procéder. Il faut renouer un dialogue de confiance", s'agace auprès de La Tribune François Sauvadet, président de l'Assemblée des départements de France (ADF).
Neuf jours avant le premier tour de l'élection présidentielle, l'association d'élus vient d'ailleurs de transmettre 18 propositions aux candidats. Parmi lesquelles, autoriser le cumul d'un salaire et du RSA à hauteur du SMIC pour une période de six mois maximum dans les secteurs en tension pour favoriser l'insertion et la reprise d'activité, ou encore, instaurer un revenu de base pour les moins de 25 ans.
La relance de la décentralisation en priorité
En réalité, la première préoccupation des patrons de conseil départemental reste la relance de la décentralisation, malgré déjà 40 ans de lois dans ce domaine. La dernière en date étant la "3DS" pour décentralisation, déconcentration, différenciation et simplification de l'action publique, promulguée par le président Macron en février 2022.
Il n'empêche, les présidents de département persistent et signent: il faut donner aux départements les moyens de mettre en œuvre les politiques publiques que la loi leur confie, écrivent-ils aux postulants des 10 et 24 avril prochains. Ils espèrent par exemple récupérer la clause de compétence générale, supprimée par la loi Nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRé) en 2015, pour soutenir "directement" l'économie de proximité. Une compétence qu'ils n'ont plus depuis cette loi.
"Les grandes régions ont la compétence du développement économique et nous ne cherchons pas à tout faire, mais est-ce qu'on ne pourrait pas redonner de la souplesse ?", s'interroge François Sauvadet.
"Sur le soutien aux cafés et aux restaurants, sur les commerces, sur l'organisation de circuits courts ou même sur l'agriculture, qui structurent la vie locale, nous pouvons agir", insiste le président de l'Assemblée des départements.
"Un quinquennat d'un recul sans précédent" sur les finances locales
Les patrons de conseil départemental espèrent également que le prochain locataire de l'Elysée assurera leur autonomie fiscale, c'est-à-dire leur donnera des leviers fiscaux. Ou encore que le futur chef de l'Etat inscrive dans la Constitution une disposition qui interdise au gouvernement de présenter une mesure aggravant les dépenses locales sans augmenter d'autant leurs ressources ni réduire de façon équivalente leurs charges.
"On [le ministre des Comptes publics, Olivier Dussopt, Ndlr] nous parle d'encadrer les dépenses, mais qu'est-ce que ça veut dire ?", s'énerve François Sauvadet. "Nous n'avons déjà plus de ressources propres. Ce quinquennat a déjà été synonyme d'un recul sans précédent", martèle le porte-parole des conseils départementaux.
Depuis la suppression de la taxe d'habitation (que payaient tous les habitants, Ndlr), les départements ne touchent plus en effet leur part de taxe foncière (dont s'acquittent les propriétaires, Ndlr) car elle sert à compenser cette absence de recette aux communes. En revanche, les conseils départementaux continuent de percevoir différentes dotations de l'Etat, dont les droits de mutation à titre onéreux (DMTO), dits "frais de notaire", dont s'acquittent tous les acheteurs de biens immobiliers.
Candidat à sa réélection, Emmanuel Macron a, lui, déjà annoncé 10 milliards d'euros d'économie supplémentaires pour les collectivités territoriales sur le prochain quinquennat ainsi que la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), que reçoivent, en partie, les départements.
« Cela s'appelle une asphyxie ! C'est l'investissement public qui va être pénalisé », tonne encore le président de l'ADF, François Sauvadet.
La garantie de moyens pour entretenir et développer les routes
Enfin, les présidents de département plaident pour la garantie de moyens de financement pérenne afin d'organiser l'entretien et le développement des infrastructures de transport. "J'étais dans le Cantal aujourd'hui. Il y a 4.000 kilomètres de routes à entretenir...", pointe le porte-parole des conseils départementaux.
En attendant les résultats de l'élection dans trois semaines, les départements assurent déjà la construction, l'entretien et l'équipement des collèges, la gestion de l'eau et de la voirie rurale, le transport des élèves handicapés, les ports maritimes et intérieurs, les aérodromes, ou encore, les services départementaux d'incendie et de secours.