Réforme des retraites : davantage de manifestants mais un nombre de grévistes qui semble en baisse

Alors qu'Emmanuel Macron a affirmé qu'il soutenait sa Première ministre Elisabeth Borne, pour laquelle le report de l'âge de départ à la retraite n'était « plus négociable », les manifestants étaient encore nombreux ce mardi dans les rues de France. Les travailleurs grévistes semblaient toutefois moins nombreux que lors de la précédente journée de mobilisation le 19 janvier.
1,2 million de manifestants sont attendus en fourchette haute dont 100.000 à Paris, selon une source policière.
1,2 million de manifestants sont attendus en fourchette haute dont 100.000 à Paris, selon une source policière. (Crédits : BENOIT TESSIER)

[Article publié le 31 janvier 2023 et mis à jour à 18h30]

Interrogé lors d'une conférence de presse à La Haye sur les propos de sa Première ministre Elisabeth Borne, qui a déclaré ce week-end que le report de l'âge n'était « plus négociable », Emmanuel Macron est une nouvelle fois sorti du bois : « quand elle dit quelque chose, elle le dit avec de bonnes raisons et je la soutiens ». La cheffe de file des députés LFI, Mathilde Panot, lui avait répliqué que « le retrait du texte n'est pas négociable », voyant les manifestations de ce mardi comme une « motion de censure populaire ».

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Et les manifestants étaient nombreux à battre le pavé en ce 31 janvier. Dans plusieurs grandes villes, comme Montpellier, Nantes, Rennes ou Marseille, la participation était même supérieure à celle du 19 janvier, lors de la première mobilisation. Les villes petites et moyennes n'ont, une nouvelle fois, pas défaut à la mobilisation comme Alès (7.000) ou Angoulême (8.500). Certaines préfectures ont toutefois enregistré un moindre nombre de manifestants comme Clermont ou Orléans (8.500 contre 12.000) par rapport au 19.

A Paris, la CGT a fait état de 500.000 manifestants (contre 400.000 le 19). Le chiffre des autorités n'était pas immédiatement disponible. « C'est une des plus grandes manifestations organisées dans notre pays depuis des dizaines d'années », a déclaré Laurent Berger, le numéro un de la CFDT, notant, peu avant le départ du cortège parisien vers 14h00, qu'il y avait « plus de monde » dans la rue que le 19. « Dans tous les retours que j'ai, c'est plus que le 19 », a renchéri son homologue de la CGT Philippe Martinez, tandis que Frédéric Souillot (FO) a mis en avant un « tir de barrage »A l'appel des huit principaux syndicats français, la précédente journée de mobilisation avait réuni 1,12 million de manifestants selon les autorités et  plus de deux millions selon la CGT.

Une intersyndicale doit se réunir à partir de 18H00, ce mardi, au siège de FO pour décider des suites du mouvement, et probablement annoncer au moins une nouvelle journée de mobilisation.

Un taux de gréviste inférieur à celui du 19 janvier

En parallèle des manifestations, de nombreux secteurs connaissaient des mouvements de grèves, dans le public comme dans le privé mais les grévistes semblaient moins nombreux mardi que le 19. Il y avait ainsi 36,5% de grévistes à la SNCF, contre 46,3% le 19 de source syndicale. Dans l'Education nationale, le ministère comptabilisait à la mi-journée un quart de grévistes, en recul par rapport à la précédente journée de mobilisation. Le Snes-FSU, premier syndicat du secondaire, chiffrait à 55% le nombre de professeurs des collèges et des lycées en grève. Mardi matin, des lycéens et des étudiants se sont mobilisés, comme sur le site Saint-Charles de l'université Aix-Marseille ou à Sciences Po Paris.

De son côté, la CGT a annoncé 75 à 100% de grévistes dans les raffineries et dépôts de TotalEnergies. Quant aux grévistes d'EDF (40,3% contre 44,5% le 19, selon la direction), ils ont occasionné dans la nuit des baisses de charges dans les centrales électriques de « près de 3.000 MWH », sans toutefois causer de coupures.

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Le gouvernement sort l'artillerie lourde

Pris en étau entre la mobilisation de la rue et la virulence des oppositions à l'Assemblée, où le projet est débattu depuis lundi, le gouvernement a durci le ton ce week-end. Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur, a dénoncé « le profond mépris de la valeur travail » d'une partie de la gauche, et la volonté de la France insoumise de « bordéliser » le débat.

Élisabeth Borne a exhorté sa majorité à se « mobiliser » et à « porter » la réforme des retraites, un projet qui « demande des efforts » mais « sauve le système », lundi devant les dirigeants du parti Renaissance. « On demande des efforts. Si être perdants, c'est le fait de travailler, à la fin ce sont des gagnants puisqu'on sauve le système. Mais on veille à ne pas demander le même effort à tout le monde ».

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Ne pas laisser « se propager des contre-vérités »

Devant les cadres du parti présidentiel, la cheffe du gouvernement a par ailleurs jugé « important de nous mobiliser à la fois en défendant notre projet et en ne laissant pas se propager des contre-vérités » : « non, on ne partira pas demain à 64 ans. Le décalage de l'âge est progressif. non, cette réforme ne pénalise pas les femmes », a-t-elle insisté.

Un travail d'explications d'autant plus important que, pour l'exécutif, la bataille de l'opinion « est très mal engagée », selon Frédéric Dabi, de l'institut de sondages Ifop. « Au fur et à mesure que les Français entrent dans la connaissance de la réforme, l'adhésion recule » dans les sondages, a-t-il souligné dimanche sur Radio Orient.

Des discussions déjà agitées et houleuses à l'Assemblée nationale

Le projet de réforme est arrivé lundi sur la table de la commission des Affaires sociales de l'Assemblée, première étape d'un complexe parcours parlementaire resserré. Agitées et laborieuses, les discussions ont traîné en longueur jusqu'au vote du premier article, sur la disparition progressive de plusieurs régimes spéciaux de retraite. « Venez aux piquets de grève » pour évaluer la pénibilité de ces métiers, a invité Danielle Simonnet (LFI). « Si on vous coupe le jus 2-3 heures dans vos permanences, je ne veux pas vous entendre pleurer », a lancé le communiste Sébastien Jumel, lors du débat sur le régime des industries électriques et gazières, sous les protestations des macronistes.

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(Avec AFP)

Une grève qui s'annonce très suivie à l'école et dans les transports

Education

Dans les écoles, 50% des enseignants des maternelles et primaires seront grévistes, selon le Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire qui y voit le signe d'un haut niveau de contestation, après le taux de 70% de grévistes le 19 janvier. A Paris, une centaine d'écoles seront fermées. Il n'y a pas de prévisions pour collèges et lycées.

Transports

Dans les aéroports, c'est principalement la grève de contrôleurs aériens qui va provoquer des perturbations et des retards. Un vol sur cinq devrait être annulé à Paris-Orly. Mais à Paris-Roissy, il devrait y avoir suffisamment de personnel non gréviste pour assurer le programme prévu, selon la direction générale de l'aviation civile. Dans le métro parisien, le trafic devrait être moins perturbé que le 19 janvier, selon la RATP. Néanmoins seules les lignes 1 et 14 automatiques fonctionneront normalement, mais avec un risque de saturation.

Sur la plupart des autres lignes, des métros ne passeront qu'aux heures de pointe et en nombre réduit. Certaines stations seront fermées, comme Bastille, Opéra, République ou Montparnasse-Bienvenüe. Les chauffeurs de bus et de tramways assureront 80% du service. Dans les trains, la SNCF prévoit un trafic très fortement perturbé. La mobilisation des cheminots réduira le nombre de TER à 2 sur 10 en régions. Il y aura 25 à 30% de TGV selon les axes et quasiment pas de trains Intercités, ni aucun train de nuit. En Ile-de-France, le mouvement s'annonce suivi, empêchant la circulation de très nombreux RER et trains de banlieue. Côté international, la circulation des Eurostar et Thalys fonctionnera quasi normalement mais le trafic des TGV sera "fortement perturbé" entre la France et la Suisse (Lyria). Dans les grandes agglomérations, Bordeaux, Rennes ou Lyon, les services de bus seront très perturbés.

Fonction publique et secteur privé

Le préavis de grève national interprofessionnel concerne l'ensemble de la fonction publique où la précédente journée d'action du 19 janvier avait mobilisé 28% de grévistes parmi les 2,5 millions d'agents de l'Etat, selon un chiffre du ministère. Des mairies, comme celle de Paris ou Montreuil ont annoncé qu'elles garderaient portes closes. Les crèches municipales de Montreuil fermeront ainsi mardi midi. Dans le privé, des journaux n'étaient pas sortis en kiosques comme Nice-Matin, ou l'édition papier du Dauphiné. La Poste avait recensé 14,64% de grévistes et des entreprises de l'industrie avaient enregistré des débrayages.

Energie

La grève devrait être très suivie dans les raffineries, après déjà deux journées d'arrêt de travail, les 19 et 26 janvier : les raffineries ont fonctionné ces jours-là mais les expéditions de carburants ont été bloquées 24 heures à chaque fois et les débrayages ont pu concerner par moment jusqu'à 100% du personnel sur certains sites de TotalEnergies. Chez EDF, les grévistes devraient faire encore baisser la production d'électricité dans les centrales nucléaires et les barrages, sans toutefois provoquer de coupures de courant, le gestionnaire du réseau RTE encadrant strictement ces actions. Dans l'électricité et le gaz, des actions Robin des bois ou des coupures ciblées chez EDF ou Engie pourraient avoir lieu.

Commentaires 3
à écrit le 01/02/2023 à 7:29
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Bonjour, La réalité s'est que les régimes spéciaux coûte très chère... Donc pourquoi le régime générale devrait travailler plus longtemps pour maintenir les retraites des régimes spéciaux qui partent plus tôt que les autres... Donc premier réforme...

à écrit le 31/01/2023 à 11:58
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La fonction publique et territoriale comme les entreprises "publics" champion mondial des grèves en tête la SNCF, de la plus faible productivité, de l'absentéisme culturel avec à tête l'éducation nationale, CHU malgré leur privilèges sécurité de l'em...

le 01/02/2023 à 0:09
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Toujours les mêmes ! Comme l œuf Ça vous définit bien jaune et baveux ! Les 2/3 des français sont contre cette réforme … et à ce moins d être dans une dictature on ne gouverne pas contre la. Volonté de sa population .. seuls 27 % des. Français on...

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