Baisse des taux : la patronne du FMI appelle les banques centrales à ne pas lâcher les vannes trop vite

Interrogé jeudi sur la baisse des taux directeurs, la directrice générale du FMI a tenu à temporiser. Alors que l'inflation mondiale n'est pas revenue au niveau attendu, la remontée précipitée des taux représenterait, à ses yeux, un « risque plus élevé » pour l'économie.
« Notre équipe a regardé dans l'histoire et sa conclusion est qu'un desserrement prématuré représente un risque plus élevé pour l'économie, que s'il intervient un peu trop tard », a déclaré ce jeudi la directrice générale du FMI.
« Notre équipe a regardé dans l'histoire et sa conclusion est qu'un desserrement prématuré représente un risque plus élevé pour l'économie, que s'il intervient un peu trop tard », a déclaré ce jeudi la directrice générale du FMI. (Crédits : Reuters)

Ne pas aller trop vite sur la baisse des taux directeurs. C'est ce qu'a préconisé jeudi, devant la presse, la patronne du Fonds monétaire international, Kristalina Georgieva. Alors que l'inflation n'est pas revenue au niveau attendu, la remontée précipitée des taux représenterait un « risque plus élevé » pour l'économie.

« Notre équipe a regardé dans l'histoire et sa conclusion est qu'un desserrement prématuré représente un risque plus élevé pour l'économie, que s'il intervient un peu trop tard », a déclaré la directrice générale du FMI. Ces propos interviennent alors que la pression monte sur les banques centrales, appelées à atténuer leur politique monétaire.

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S'exprimant plus particulièrement sur le cas des Etats-Unis, la haute cadre a souligné que « le moment est effectivement très important. Si vous observez la position de la Fed, ils reconnaissent que le travail n'est pas encore terminé, mais que l'on s'en rapproche ».

« Ne les gardez pas élevés si ce n'est pas nécessaire » a-t-elle nuancé, tout en soulignant que « nous sommes en route pour un atterrissage en douceur » de l'économie, « mais ce n'est pas fait. Nous sommes encore 15 mètres au-dessus du sol et nous devons continuer jusqu'à l'atterrissage complet ».

Pas de baisse des taux en mars, selon la Fed

Mercredi, la Réserve fédérale (Fed) a en effet laissé ses taux d'intérêt inchangés à 5,25%-5,50%, pour la quatrième fois consécutive. L'institution semble fermer la porte à une possible baisse lors de sa prochaine réunion, prévue mi-mars, comme l'espéraient pourtant les marchés.

« Presque tous » les membres du comité monétaire de la Fed sont favorables à « une baisse des taux cette année », avait ainsi déclaré son président, Jerome Powell, lors d'une conférence de presse récente.

« Mais il est peu probable que le Comité atteigne, d'ici la réunion de mars, un niveau de confiance suffisant pour l'envisager ».

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Si la banque centrale américaine avait indiqué en décembre dernier qu'elle prévoyait plusieurs baisses des taux en 2024, elle a encore besoin de certitudes macro-économiques consolidées. Notamment sur un point crucial : un repli de l'inflation vers la cible des 2%. Aux Etats-Unis, l'inflation sous-jacente, qui exclut l'énergie et l'alimentation, est au plus bas depuis près de trois ans, à 2,9% sur un an.

La Fed pourrait aussi différer sa hausse, car les derniers indicateurs montrent que l'inflation n'a pas empêché les Etats-Unis d'enregistrer une croissance économique plus vigoureuse que prévu en 2023, s'accélérant même par rapport à 2022, à 2,5%. Quant au taux de chômage, il est toujours à ses niveaux les plus bas depuis 50 ans, à 3,7% en décembre, mais se rééquilibre progressivement.

Malgré ces signaux, certains analystes parient toujours sur une baisse des taux dès mars prochain. D'autres acteurs du marché tablent plutôt sur le mois de mai, selon l'évaluation des experts du groupe de courtage américain CME.

La BCE prête à dégainer la première

En Europe, l'humeur est un peu différente. Alors que l'économie européenne s'enlise dans une stagnation, le scénario d'une baisse des taux directeurs, de nature à relancer la croissance de l'activité, se confirme. Une semaine après avoir maintenu une nouvelle fois les taux inchangés, Christine Lagarde, la présidente de la BCE a assuré mardi sur la chaîne américaine CNN que la prochaine évolution des taux serait une baisse.

« Il peut y avoir plusieurs pauses, mais le prochain mouvement se fera à la baisse », a-t-elle déclaré, en précisant que les membres du Conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE) étaient sur la même ligne. « Si nous avons le choix entre augmenter et réduire, ce sera de les réduire », a-t-elle ajouté.

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Pour rappel, après 10 hausses consécutives pour ralentir l'inflation qui s'était envolée après le début de l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022, la BCE a enchaîné trois pauses consécutives concernant la variation de son principal taux d'intérêt, actuellement à un niveau record de 4%. Des pauses justifiées par le ralentissement de l'inflation qui se dirige progressivement en Europe vers l'objectif de 2%, synonyme de stabilité des prix. En décembre dernier, l'inflation n'était plus que de 2,9%.

Reste donc à fixer le calendrier de cette première baisse des taux par la BCE. Si Christine Lagarde a récemment évoqué la probabilité d'une baisse des taux « aux alentours de juin », plusieurs analystes tablent sur « avril ». Les investisseurs « ont interprété son absence de forte opposition aux suggestions de baisses de taux à partir d'avril comme un signal » renforçant ainsi les attentes d'une première réduction en avril, expliquait cette semaine à l'AFP Patrick Munnelly, analyste chez Tickmill.

Deux autre dossiers chauds pour le FMI : l'Egypte et l'Argentine

La directrice générale du FMI a par ailleurs profité de ses échanges avec la presse pour faire le point sur deux des principaux dossiers du Fonds, l'Egypte et l'Argentine. Pour le pays proche-oriental, la situation sécuritaire dans la région et les attaques de la milice yéménite Houthi contre le trafic maritime dans la mer Rouge ont un impact sur une économie déjà en souffrance.

L'Egypte « reste une vraie priorité » alors que le pays « doit gérer des problèmes complexes ».

« Nous discutons actuellement pour augmenter notre programme (d'aide) compte tenu des développements de ce dernier mois », a expliqué Kristalina Georgieva, « ils envisagent des ajustements systémiques de leur politique et nous travaillons sur ces détails ».

Concernant le pays du cône sud-américain, la patronne du FMI a confirmé qu'« à ce point, nous ne discutons pas d'un nouveau programme », se félicitant du travail "d'une bonne équipe économique en place, avec un président (Javier Milei, ndlr) très pragmatique, qui cherche comment son pays peut se sortir de ces difficultés ». Jeudi, le FMI a confirmé le versement d'une nouvelle tranche d'aide de 4,7 milliards de dollars à l'Argentine dans le cadre du programme actuellement en cours.

(Avec AFP)

Commentaires 4
à écrit le 02/02/2024 à 12:33
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Le banquier d'affaire US (euh pardon, le président de la Fed), comme je l'écrivais le 31, s'est montré prudent lors du FOMC [=> la Fed a supprimé la phrase suivante de la déclaration :"Le système bancaire américain est solide et résilient." => Je dis...

à écrit le 02/02/2024 à 8:58
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Première priorité: faire en sorte que les cigales (françaises) puissent continuer à emprunter des montants colossaux pour financer leurs gabegies (285 milliards en 2024 pour la France) et c’est pas gagné! Heureusement, Bruno va trouver les sous!

le 02/02/2024 à 9:39
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Oui, sous la tutelle de la troika.

le 02/02/2024 à 19:01
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La situation française n'est pas brillante, mais la situation de certains pays s'est dégradée bien plus rapidement suite à la crise de 2008, des montagnes de mauvaises dettes privées s'étant muées en mauvaises dettes publiques... D'expérience les pou...

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