Enquête européenne sur l’éolien chinois : Pékin s’inquiète des « tendances protectionnistes croissantes » de Bruxelles

La Chine s'est dite ce mercredi « très inquiète » après le lancement par l'Union européenne d'une enquête visant des fabricants chinois d'éoliennes. Elle dénonce les « tendances protectionnistes croissantes » de Bruxelles, qui estime de son côté que Pékin les a subventionnés, ce qui aurait faussé la concurrence sur le marché européen.
La porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Mao Ning, a dénoncé le « protectionnisme » et les « mesures discriminatoires » de l’UE contre les fabricants chinois d’éoliennes (photo d'archive).
La porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Mao Ning, a dénoncé le « protectionnisme » et les « mesures discriminatoires » de l’UE contre les fabricants chinois d’éoliennes (photo d'archive). (Crédits : YEW LUN TIAN)

L'enquête lancée mardi par l'Union européenne contre des fabricants chinois d'éoliennes n'est pas du goût de Pékin. « La Chine est très inquiète des mesures discriminatoires prises par les Européens contre des entreprises et même des industries chinoises », a indiqué face à la presse Mao Ning, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, ce mercredi.

« Je pense que le monde extérieur s'inquiète des tendances protectionnistes croissantes de l'Union européenne », a-t-elle ajouté.

Une politique qui n'est pas la bonne à ses yeux. « Le protectionnisme ne peut pas régler les propres problèmes » de l'UE, a-t-elle jugé, « il protège les retards de développement (...) et provoque des pertes multilatérales »« Nous demandons instamment à la partie européenne de respecter les règles de l'OMC [l'Organisation mondiale du commerce, ndlr] et les principes du marché, et la Chine préservera fermement les droits et les intérêts légitimes des entreprises chinoises », a-t-elle ajouté.

Pour rappel, Bruxelles reproche à la Chine d'avoir accordé des subventions à des fabricants chinoises d'éoliennes et d'avoir ainsi faussé le marché européen. Dans l'UE, les éoliennes chinoises sont vendues à des prix jusqu'à 50% inférieurs à ceux des concurrents européens, selon WindEurope, le lobby européen du secteur. « Il n'est pas possible de faire cela sans subventions publiques injustes », assure Giles Dickson, son directeur général, qui a salué l'annonce de l'enquête. Cette dernière vise « les conditions de développement de parcs éoliens en Espagne, en Grèce, en France, en Roumanie et en Bulgarie », comme l'a indiqué la commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager, sans plus de détails.

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Suite à cette annonce, la Chambre de commerce chinoise dans l'UE avait déjà réagi mardi, dénonçant « un acte de coercition économique » et le « déploiement continu de nouveaux outils contre les entreprises chinoises ».

« Rétablir l'équité »

Ce n'est d'ailleurs pas la première enquête que l'UE lance contre le soutien financier de Pékin à ses entreprises. Deux autres ont été ouvertes depuis février, dans le cadre de nouvelles règles européennes entrées en vigueur à la mi-2023 pour empêcher les subventions de pays tiers, soupçonnées de créer une concurrence déloyale lors d'appels d'offres. La première a visé un constructeur ferroviaire et la seconde deux consortiums candidats pour concevoir, construire et exploiter un parc photovoltaïque en Roumanie.

Margrethe Vestager a affirmé mardi que les mesures européennes n'avaient « pas pour but de limiter le succès de la Chine ». Il s'agit de « rétablir l'équité dans nos relations économiques », a-t-elle justifié. Elle a appuyé son propos en accusant la Chine d'être parvenue à dominer l'industrie des panneaux solaires en « accordant des subventions massives à ses fournisseurs nationaux, tout en fermant simultanément et progressivement le marché chinois aux entreprises étrangères ». Selon la commissaire, Pékin exporte « à bas prix » vers le reste du monde pour compenser son propre ralentissement économique.

« Le résultat est qu'aujourd'hui, moins de 3% des panneaux solaires installés dans l'UE sont produits en Europe. Cette stratégie est désormais déployée dans tous les domaines des technologies propres, dans celui des semi-conducteurs traditionnels et au-delà », a-t-elle souligné.

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Une dépendance aux produits chinois dont veut se défaire l'UE, tout comme les États-Unis d'ailleurs. Et eux aussi voient les subventions chinoises d'un mauvais œil. Ces dernières semaines, la secrétaire américaine au Trésor Janet Yellen a régulièrement mis en garde contre les vastes subventions du gouvernement chinois dans les technologies, qu'il s'agisse des énergies vertes, des véhicules électriques ou encore des batteries.

Des inquiétudes encore formulées vendredi dernier, lors d'une visite à Pékin« Les aides directes et indirectes du gouvernement sont en train de conduire à une capacité de production qui excède largement la demande intérieure de la Chine, ainsi que ce que le marché mondial peut supporter », a-t-elle dit à des entrepreneurs américains travaillant dans ce pays. « Les surcapacités peuvent conduire à de gros volumes d'exportations à des prix en baisse » et à une « surconcentration des chaînes d'approvisionnement, posant un risque pour la résilience économique mondiale », a-t-elle ajouté. Ce qui représente, selon elle, une menace pour la viabilité des entreprises américaines et d'autres pays.

Les subventions américaines aussi dans le viseur de l'UE

Reste que l'UE s'affiche aussi critique envers les États-Unis. Margrethe Vestager a ainsi déploré les distorsions de concurrence causées par les subventions américaines massives du plan climat du président Joe Biden - le fameux « Inflation Reduction Act » ou IRA - et a proposé à Washington de faire front commun face à Pékin. Pour rappel, ce plan, adopté à l'été 2022, prévoit 370 milliards de dollars d'investissements pour financer la construction d'usines, d'éoliennes et de panneaux solaires, ou encore des primes pour l'achat de véhicules électriques à condition qu'ils sortent d'une usine nord-américaine.

La commissaire à la Concurrence a, en effet, proposé que « des partenaires aux vues similaires, à commencer par les pays du G7 », favorisent la sécurité de leurs approvisionnements en établissant des « critères de fiabilité » communs (empreinte environnementale, droit du travail, cybersécurité...) pour les technologies propres essentielles. Ces critères pourraient être utilisés pour favoriser des producteurs, même s'ils sont plus chers, « par exemple dans le cadre d'appels d'offres publics ».

Coordonner les positions pour « renforcer la compétitivité et la productivité de l'industrie européenne » est d'ailleurs l'objectif que se sont fixés les ministres de l'Économie français, allemand et italien. Ils se sont réunis lundi dernier pour plancher sur cette question et accorder leurs violons pour résister à la concurrence croissante de la Chine et des États-Unis. Le Français Bruno le Maire voudrait ainsi imposer une préférence européenne pour 50% des achats publics, quand l'Allemand Robert Habeck s'est déclaré ouvert à l'imposition de critères « qualitatifs » sur les normes qui pourraient de facto aider l'industrie européenne. Les trois ministres ont aussi évoqué la nécessité de simplifier les normes et règles européennes.

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Commentaires 10
à écrit le 11/04/2024 à 8:20
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Croyez vous vraiment que la Chine soit inquiète...!? Que neni ! Bruxelles s'inquiète justement du contraire et médiatise "la faute des autres" ! ;-)

à écrit le 10/04/2024 à 22:57
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OMC (occidental manipulation commerciale) Des règles édictées par les américains pour les non américains. La liberté des échanges à géométrie variable datant de l'êre Reagan et de son vice-président, George H. W. Bush ou la doctrine était que l'état ...

à écrit le 10/04/2024 à 18:28
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Il faudra mettre 60% de droits de douane sur tout ce qui vient de Chine ou au moins sur tout ce que le gouvernement chinois voit comme strategique comme les panneuax solaires, les éoliennes, les batteries, les voitures électriques, les semiconducteur...

à écrit le 10/04/2024 à 16:43
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"Nous demandons instamment à la partie européenne de respecter les règles de l'OMC..." : un peu abusé venant d'un pays qui n'a jamais respecté ces règles ! os: idem pour les USA

à écrit le 10/04/2024 à 16:29
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Exiger de la chine des coentreprises à 49 % pour eux avec transfert obligatoire de technologie serait le max que l'on devrait accepter. Encore faudrait que tous intérêts européens soient alignés et ce n'est ABSOLUMENT pas le cas : les allemands ont d...

à écrit le 10/04/2024 à 13:25
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Vive la mondialisation heureuse! Il est temps d'appuyer sur les freins. Le mur se rapproche. De toutes façons on va le prendre le mur, autant faire en sorte de s'assurer avoir bouclé sa ceinture et du bon état de ses freins.

à écrit le 10/04/2024 à 13:06
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EUROPE: APRES LES MOTS L ACTION !! LES INTERETS PRIVES ET PARTICULIERS OUT PLACE A LA SECURITE ECONOMIQUE COLLECTIVE CA CHANGERA.. LES COMMISSIONS MONTI ET BARROSO DEVRAIENT ETRE CONVOQUEES POUR JUSTIFIER LA VENTE DE NOTRE INDEPENDANCE COLLECTIVE A C...

à écrit le 10/04/2024 à 13:04
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EUROPE: APRES LES MOTS L ACTION !! LES INTERETS PRIVES ET PARTICULIERS OUT PLACE A LA SECURITE ECONOMIQUE COLLECTIVE CA CHANGERA.. LES COMMISSIONS MONTI ET BARROSO DEVAIET ETRE CONVOQUEES POUR JUSTIFIER LA VENTE DE NOTRE INDEPENDANCE COLLECTIVE A CES...

à écrit le 10/04/2024 à 13:02
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Dans kes années 70 ça a été étudié sous le nom de prix prédateurs... bon, ka Chine met tt le monde dehors ferme ses frontières avec le covid, puis le moment venu explique qu'elle doit bénéficier de régimes des pays en développement... s'ils veulen...

à écrit le 10/04/2024 à 12:12
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la Chine ne joue et n'a jamais joué le jeu de la mondialisation. Il est grand temps que l'europe se protège. D'ailleurs l´arrogance et le sentiment de toute puissance des Chinois ne dit rien de bon pour l'avenir.

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