Fed : nouvelle hausse des taux en vue pour ralentir l'économie et l'inflation aux Etats-Unis

Patrick Harker, le président de l'antenne régionale de la Réserve fédérale américaine à Philadelphie, a pris position sur les futures décisions de la Fed. Il préconise que les taux devront continuer à être relevés, et rester à un niveau élevé, afin de s'assurer que l'inflation ralentisse durablement aux Etats-Unis. La prochaine réunion de la Fed aura lieu les 2 et 3 mai.
La Fed devrait monter ses taux entre 5% et 5,25% puis les maintenir pendant plusieurs mois avant de les rebaisser, estime Patrick Harker, le président de l'antenne régionale de la Fed à Philadelphie.
La Fed devrait monter ses taux entre 5% et 5,25% puis les maintenir pendant plusieurs mois avant de les rebaisser, estime Patrick Harker, le président de l'antenne régionale de la Fed à Philadelphie. (Crédits : Leah Millis)

La Réserve fédérale américaine (Fed) veut maintenir la pression sur l'économie. C'est en tout cas l'avis de Patrick Harke, le président de l'antenne régionale de l'institution à Philadelphie, alors que La prochaine réunion de la Fed aura lieu les 2 et 3 mai. Ce dernier a, en effet, estimé jeudi soir que les taux devront continuer à être augmentés, et rester à un niveau élevé, afin de s'assurer que l'inflation ralentisse durablement aux Etats-Unis.

« Je prévois qu'un resserrement supplémentaire pourrait être nécessaire », afin d'atteindre un niveau suffisamment restrictif pour faire effectivement ralentir l'activité économique et s'assurer que la forte inflation rentre dans les clous, a-t-il affirmé.

Lire aussiBCE : jusqu'où porter les taux pour ramener l'inflation à 2% ? Et faut-il s'accrocher à cet objectif ?

La Fed en est déjà à dix hausses de taux consécutives depuis le printemps 2022. En mars, l'institution a d'ailleurs relevé de 0,25 point de base ses taux, les portant sur une fourchette comprise entre 4,75% et 5%. Une hausse rapide qui vise à ralentir l'accès au crédit et les activités économiques dans le pays et qui pourrait être maintenue pendant un certain temps. « Une fois que nous aurons atteint ce point, ce qui devrait arriver cette année, je m'attends à ce que nous maintenions les taux à ce niveau et laissions la politique monétaire faire son travail », a notamment détaillé Patrick Harker, qui dispose en 2023 du droit de vote tournant lors des réunions du FOMC, l'organe de décision de la Fed.

Les marchés financiers se réjouissent d'ailleurs de cette fin probable de hausse de taux et misent sur une seule nouvelle hausse de taux de la Fed de 25 points de base, lors de la prochaine réunion début mai. Cela porterait le taux terminal américain à 5 % (contre une anticipation à 6 % fin février). « Cela est possible si la baisse de l'inflation se confirme, ce qui est d'ailleurs notre conviction », avance Frédéric Rollin, conseiller en investissement chez Pictet Asset Management.

Lire aussiRebond des Bourses : le CAC 40 atteint un nouveau record

Une inflation qui ralentit à 5% aux Etats-Unis

Si la Fed maintient la pression, c'est pour ralentir l'inflation. Et ce freinage de l'économie commence à porter ses fruits. Après un pic à 9,1% en juin dernier, selon l'indice CPI, l'inflation aux Etats-Unis a ralenti à 5% sur un an en mars, au plus bas depuis presque deux ans. Un chiffre toujours trop élevé par rapport à l'objectif de 2% de la Fed. L'institution privilégie cependant une autre mesure, l'indice PCE, dont les chiffres pour mars seront publiés le 28 avril.

« Les données récentes montrent que l'inflation continue de reculer, mais lentement », a encore relevé Patrick Harker lors de ce discours devant la Wharton School de l'université de Pennsylvanie, à Philadelphie. Ce responsable de la puissante Fed a par ailleurs jugé que les récentes tensions sur le secteur bancaire devraient conduire à « des conditions de crédit plus strictes pour les ménages et les entreprises, ce qui pourrait ralentir l'activité économique et l'embauche », et ainsi contribuer à calmer l'inflation. « Mais l'ampleur n'est pas encore claire. Ce qui est clair, c'est que la Fed reste pleinement attachée à son objectif d'inflation de 2% », a-t-il assuré.

Le président de la Fed, Jerome Powell, avait indiqué, à l'issue de la dernière réunion le 22 mars, qu'un resserrement des conditions de crédit était susceptible d'avoir le même effet qu'une hausse des taux. La prochaine réunion de la Fed aura lieu les 2 et 3 mai.

La BCE en retard sur les hausses de taux

Du côté du Vieux continent la situation est moins claire. Si le taux d'inflation annuel au sein de la zone euro (les vingt pays à avoir adopté la monnaie unique) a reculé en mars pour le cinquième mois consécutif, à 6,9% sur un an, après 8,5% en février, grâce à l'accalmie des prix de l'énergie, selon Eurostat, l'inflation alimentaire encore élevée. « En Europe les salaires augmentent, contrairement aux Etats-Unis où ils commencent à se stabiliser. Il y a donc un risque de boucle prix-salaire qui maintiendrait l'inflation », prévient Alexandre Hezez, stratégiste chez la Banque Richelieu. L'inflation devrait atteindre 5,3% en 2023, contre 6,3% prévu fin décembre, puis 2,9% en 2024 et 2,1% en 2025. La zone euro devrait connaître une croissance de son PIB de 1,0% cette année, contre 0,5% prévu auparavant, avant 1,6% en 2024 et 2025.

Face à ses anticipations encore élevées d'inflation dans la zone euro, la BCE a relevé ses taux entre 3% et 3,75% en mars. Et les investisseurs tablent désormais sur deux dernières hausses de 25 points de base avant l'été, soit des taux terminaux entre 3% et 4,25%. Même si ces anticipations peuvent encore s'ajuster, les marchés ont désormais la conviction que 2023 sera l'année pivot des politiques monétaires.

Mais les minutes de la réunion de politique monétaire du mois dernier mettent en évidence des divergences entre les membres du Conseil des gouverneurs sur la suite à donner à la politique monétaire après une série sans précédent de relèvements des taux pour combattre l'inflation. Une « très large majorité » des participants à la réunion de mars souhaitait s'en tenir à la hausse de 50 points de base qui avait déjà été annoncée depuis plusieurs semaines par l'institution, selon le compte rendu. Cet engagement devait être tenu, ont-ils plaidé, pour « instiller la confiance et éviter de créer davantage d'incertitude sur les marchés financiers ». Mais « certains membres auraient préféré ne pas augmenter les taux directeurs jusqu'à ce que les tensions sur les marchés financiers se soient apaisées », montre aussi le compte rendu.

Les hausses des taux font baisser le volume des crédits aux Etats-Unis

La hausse des taux directeurs s'avère cependant un lourd traitement pour l'économie. Face à la remontée des taux qui a fait chuter le cours des anciennes obligations d'Etat, la Silicon Valley bank (SVB) a dû mettre la clé sous la porte. Une faillite qui a effrayé les institutions bancaires qui ont décidé en conséquence de freiner le nombre de crédits accordés outre-Atlantique. C'est ce qu'a révélé la Réserve fédérale américaine (Fed) dans son Beige Book (livre beige), publié mercredi 19 avril. Les volumes de prêts et la demande d'emprunts ont diminué pour les types de prêts aux particuliers et aux entreprises, a ainsi écrit l'institution dans ce baromètre d'activité réalisé auprès des douze régions du système de la banque centrale américaine. Plusieurs régions ont noté que les banques ont resserré les normes de prêt dans un contexte d'incertitude accrue et de préoccupations concernant les liquidités, détaille le document. « La plupart des contacts au sein du secteur bancaire ont confirmé un durcissement des normes de prêts (...), à la suite des faillites de Signature Bank et de Silicon Valley Bank », précise notamment le rapport.

Cela aurait le même effet qu'un relèvement des taux : réduire la consommation pour faire ralentir l'inflation. « La baisse de crédits renforce la probabilité de récession. Mais ce n'est pas forcément négatif pour les marchés financiers à court terme car cela va calmer l'inflation dans un premier temps », anticipe d'ailleurs Jean-Jacques Friedman, Directeur des investissements chez Natixis.

(Avec AFP)

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.