Fiscalité, reprise, climat : le G7 Finances veut préparer la sortie de crise

Les ministres des Finances du G7 et les gouverneurs des banques centrales, qui se réunissent ce vendredi et samedi à Londres, doivent soutenir la mise en œuvre d'un impôt minimal sur les sociétés à travers toute la planète.
Grégoire Normand
Cette année, le G7 est sous la présidence du Royaume-Uni.
Cette année, le G7 est sous la présidence du Royaume-Uni. (Crédits : Reuters)

Fiscalité internationale, réchauffement climatique, relance économique, vaccination mondiale... les sept ministres des Finances des sept plus importantes puissances de la planète, qui doivent se réunir à Londres vendredi 4 et samedi 5 juin, ont un programme copieux de discussions.

Accompagnés des banquiers centraux, les grands argentiers se réunissent pour la première fois en face-à-face depuis le G7 de Chantilly sous la présidence française à l'été 2019.  Ce sera aussi une première depuis que Joe Biden a remplacé Donald Trump à la présidence des États-Unis, ce qui suscite en France l'espoir d'une plus grande coopération entre Washington et le reste du monde.

"La présidence britannique du G7 est  plus active que l'ancienne présidence américaine. Elle est marquée par une volonté de coopération. L'état d'esprit a beaucoup changé depuis l'arrivée de l'administration Biden au pouvoir", assure un proche du ministre de l'Economie Bruno Le Maire.

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G7 Bruno Le Maire Janet Yellen

[La secrétaire au Trésor américain Janet Yellen et Bruno Le Maire doivent avoir une rencontre bilatérale lors de ce G7 finances. Crédits : Reuters.]

La fiscalité internationale au centre des discussions

Les débats sur la taxation internationale ont accéléré depuis l'annonce au mois d'avril du président américain Joe Biden de muscler la fiscalité sur les multinationales. La pandémie a vidé les caisses des États venus à la rescousse des économies frappées de plein fouet par ce virus planétaire.

Si la mise en place d'un impôt minimal sur les grandes sociétés fait moins débat depuis le lancement des discussions à l'OCDE il y a déjà plusieurs années, le niveau du taux et le périmètre des entreprises visées sont au centre des discussions.

En première ligne sur ce dossier explosif, la secrétaire au Trésor américain Janet Yellen a, dans un premier temps, exprimé sa volonté de mettre en place un taux minimal mondial sur les sociétés de 21%... avant de reculer.

L'administration outre-Atlantique plaide désormais pour "un taux plancher" de 15% qualifié de moins ambitieux par plusieurs observateurs. Sur le plan politique, cette position a l'avantage d'être plus consensuelle, notamment en Europe, mais elle évite surtout au gouvernement américain un bras de fer avec les géants du numérique présents sur leur territoire.

Dans l'Union européenne, les positions divergentes risquent encore de freiner la possibilité d'un accord. Des paradis fiscaux présents sur le Vieux Continent, comme l'Irlande, ont fait part de leurs réticences à augmenter la pression fiscale sur les multinationales. En France, l'entourage du ministre de l'Économie Bruno Le Maire est optimiste. "On a jamais été aussi proches d'un accord", assure un conseiller du ministre en amont du G7.

De son côté, le ministre français a exprimé sa position en faveur d'un taux de 21% plusieurs fois publiquement. Un tel niveau de taux promet encore quelques batailles, même si l'arrivée de Joe Biden dans le jeu multilatéral a changé la donne.

"On partait de très très loin avec la précédente administration américaine. Les points de vue se sont rapprochés. Les États-Unis ont avancé plusieurs versions. Il s'agit de s'assurer que ce taux passe au Congrès. Sur le périmètre, il faut s'assurer que tous les géants soient bien concernés", ajoute Bercy.

Sur le Vieux Continent, un taux de 15% rapporterait environ 50 milliards d'euros chaque année, contre 171 milliards d'euros selon une récente étude de l'Observatoire européen de la fiscalité lancé il y a deux jours, mardi 1er juin. Dans les colonnes du Financial Times, l'économiste américain Joseph Stiglitz a plaidé en faveur d'un taux à 21% appelant "les États européens à rejoindre les États-Unis en prenant un engagement ambitieux afin de retrouver la reprise".

> Lire aussi : A quel taux taxer les multinationales ? La bataille fait rage

Taxe sur les géants du numérique : un accord espéré dans les six mois

La fiscalité des géants du numérique devrait également occuper une large part des pourparlers déjà engagés dans le cadre de l'OCDE. L'enjeu qui concerne le pilier 1 des discussions à l'OCDE porte sur la possibilité pour les États de taxer les bénéfices de ces sociétés là où elles vendent véritablement leurs services.

La crise a remis au centre des débats ce sujet qui traîne depuis des années en raison notamment de l'ancienne présidence Trump et du poids des mastodontes de la Tech dans l'économie planétaire. Cette longue bataille avait d'ailleurs donné lieu à la mise en place de prélèvements fiscaux sur les services numériques à l'échelle nationale adoptés en France ou au Royaume-Uni, par exemple.

En signe de représailles, les États-Unis avaient durci leurs droits de douanes à l'égard de quatre pays européens. De son côté, l'administration démocrate a montré des signes d'apaisement ces derniers jours en annonçant la suspension de ces droits pour une durée de six mois pour six pays pays (le Royaume-Uni, l'Espagne, l'Autriche et l'Italie, la Turquie et l'Inde).

"L'essentiel du G7 Finances est de parvenir à un accord global sur la taxation des géants du numérique. Ils ont fait des profits considérables. Ils doivent payer leur juste part d'impôt. La France, seule contre beaucoup d'États, a porté cette position", a expliqué Bruno Le Maire.

Pour y parvenir, le périmètre des entreprises concernées est essentiel. En effet, le choix de taxer uniquement les géants de la tech a souvent donné lieu à des échecs juridiques des États. Pour mettre plus de chance de leur côté, les États-Unis ont proposé de taxer les 100 plus grandes entreprises les plus profitables à l'échelle de toute la planète.

"Sur le pilier 1, il faut se mettre d'accord sur le périmètre des entreprises concernées et sur les seuils de chiffre d'affaires ou de profitabilité. Il faut également s'entendre sur les secteurs qui ne seraient pas concernés. Il faut absolument que les géants du numérique soient dans le pilier 1", indique-t-on à Bercy.

La publication du communiqué samedi en fin de journée devrait être particulièrement surveillée.

Grégoire Normand
Commentaire 1
à écrit le 05/06/2021 à 9:43
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