Russie : le rouble au plus bas depuis près d'un an

La monnaie nationale russe est descendue mercredi 5 avril à son plus bas niveau depuis près d'un an face au dollar. Le rouble est en grande partie fragilisé par la baisse des revenus des exportations russes en raison des sanctions occidentales, mais aussi des sorties de capitaux et de la réorientation d'une partie de l'économie russe vers d'autres devises, notamment le yuan.
Vladimir Poutine a d’ailleurs reconnu cette semaine que les sanctions internationales imposées à la Russie pourraient avoir des conséquences « négatives » à « moyen terme » sur l'économie nationale.
Vladimir Poutine a d’ailleurs reconnu cette semaine que les sanctions internationales imposées à la Russie pourraient avoir des conséquences « négatives » à « moyen terme » sur l'économie nationale. (Crédits : DADO RUVIC)

Une première en un an : la monnaie russe s'est effritée jusqu'à 80,50 roubles pour un dollar mercredi 5 avril, ce qui n'était plus arrivé depuis mi-avril 2022. Un plus bas niveau atteint qui s'explique notamment par la baisse des revenus russes tirés de ses exportations depuis Moscou.

L'énergie et les produits d'extraction minière pèsent plus de la moitié des exportations de la Russie. Or, les exportations de pétrole et produits pétroliers ont chuté de 19% en février comparé à janvier et de 42% par rapport à l'an dernier à la même époque, selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE). La Russie a ainsi tiré 11,6 milliards de dollars de ces livraisons.

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L'effet des sanctions occidentales

Le pétrole est, pour l'essentiel, acheté en dollars, que la Russie convertit ensuite en roubles, ce qui soutient sa devise. Mais puisque les volumes ont peu diminué, le fléchissement des revenus tirés des exportations d'or noir est principalement attribuable aux sanctions imposées par le G7 et l'Union européenne, en particulier le mécanisme de prix plafond sur le pétrole, selon l'AIE.

Vladimir Poutine a d'ailleurs reconnu cette semaine que les sanctions internationales imposées à la Russie pourraient avoir des conséquences « négatives » à « moyen terme » sur l'économie nationale. Le président russe avait pourtant jusqu'à présent, et depuis le début de son offensive en Ukraine, vanté l'adaptation de son économie à cette nouvelle conjoncture. Mais l'effondrement du prix du gaz et du pétrole fait craindre le pire pour l'économie russe au sein du Kremlin.

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De plus en plus de transferts de capitaux

Le plongeon du rouble est aussi imputable à des sorties de capitaux pour Janis Kluge, de l'Institut allemand des affaires internationales et de la sécurité (SWP). Ces mouvements sont liés à la poursuite de l'exode des entreprises étrangères, selon une note de la banque russe Sinara. Vladimir Poutine, lorsqu'il s'est exprimé cette semaine, a d'ailleurs réclamé au gouvernement et aux dirigeants économiques d'« assurer le lancement rapide de nouveaux projets dans les industries manufacturières, en particulier dans la production de produits de haute technologie », un secteur frappé par le départ de nombreux spécialistes à l'étranger.

Dans le même temps, les importations augmentent et, avec elles, les besoins de devises des sociétés qui se fournissent à l'étranger, affaiblissant le rouble, selon une note d'Alor Broker.

Autre facteur expliquant les transferts de capitaux : des conversions en devises de pays dont les gouvernements maintiennent des relations étroites avec la Russie, en premier lieu la Chine, selon Sinara. Ces derniers jours, le volume d'échanges entre roubles et yuans en Russie a égalé, voire dépassé, celui des transactions entre roubles et dollars, selon des données publiées par la Bourse de Moscou (Moex).

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La Bourse de Moscou travaille également, depuis plusieurs mois, à l'ouverture d'échanges entre roupies indiennes et roubles, l'Inde ayant nettement augmenté ses achats de pétrole russe depuis l'invasion de l'Ukraine.

Une situation qui pourrait durer

De nombreux observateurs estiment que le vrai défi de l'économie russe va se présenter dans les prochains mois. « En 2023, il n'y a aucun signe que la Russie bénéficie de revenus supplémentaires comme l'an passé via les recettes pétrogazières » qui avaient explosé parallèlement à la hausse des prix de l'énergie, indique à l'AFP Alexandra Prokopenko, une chercheuse qui travaillait auparavant à la Banque centrale de Russie (BCR).

Or Moscou a un besoin vital de garder ses revenus issus des hydrocarbures à un niveau élevé pour continuer à financer son offensive en Ukraine, au moment où environ un tiers du budget fédéral annuel est destiné aux dépenses militaires et sécuritaires, d'après des chiffres officiels. « Les sanctions ne sont pas indolores mais les équilibres macro-économiques ne sont pas menacés à ce stade », considère Arnaud Dubien, le directeur de l'Observatoire franco-russe à Moscou.

« La Russie peut financer son effort de guerre pendant encore trois ou quatre ans. (...) Mais elle a déjà perdu l'équivalent d'une décennie de développement depuis 2014 et là, elle pourrait en perdre une deuxième », estime-t-il.

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Le dollar se reprend

Ailleurs sur le marché des changes, le dollar se reprenait mercredi face à l'euro et à la livre, malgré une volée de nouveaux indicateurs américains jugés décevants. Vers 19h30 GMT, le billet vert gagnait 0,43% sur la monnaie unique, à 1,0904 dollar, et 0,33% face à la devise britannique, à 1,2457 dollar pour une livre.

« Beaucoup d'opérateurs se demandent ce qu'un ralentissement (aux États-Unis) signifie pour les autres économies », explique Matthew Weller, de StoneX. « Et l'adage veut que quand les États-Unis toussent, le reste du monde attrape un rhume. Donc ce pourrait être favorable au dollar ».

(Avec AFP)

Commentaires 2
à écrit le 06/04/2023 à 15:10
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Les oligarques Russes ne doivent pas en posséder beaucoup sur leur compte en banque.

à écrit le 06/04/2023 à 13:22
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Comment avoir confiance dans une monnaie dont on tiré le mot: Roublard.🤣

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