Malgré une inflation modérée, la Suisse n'échappe pas à un resserrement de sa politique monétaire, une première depuis 2015

Si l'inflation reste modérée en Suisse, au regard de celle qui sévit dans l'Union européenne et aux Etats-Unis, le pays tient à réagir vite. C'est pour cette raison que la banque centrale helvète a annoncé un resserrement de sa politique monétaire qui s'accompagne d'une hausse de son taux directeur d'un demi-point, tout en le maintenant en terrain négatif à -0,25%.
La Suisse, qui connaît une légère inflation, n'avait pas resserré sa politique monétaire depuis 2015.

Etats-Unis, Canada, Union européenne...C'est maintenant au tour de la Suisse de resserrer sa politique monétaire, pour la première fois depuis 2015, en relevant son taux directeur. Comme un peu partout dans le monde, le pays est soumis à l'inflation. La Banque centrale suisse table sur une hausse des prix de 2,8% pour 2022, après l'avoir déjà relevé à 2,1% en mars, et à 1,9% pour 2023, contre 0,9% auparavant. Des chiffres qui restent bien moins élevés qu'ailleurs dans le monde, en particulier en Europe. Elle a atteint 8,1% le mois dernier sur un an dans la zone euro.

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Grâce à la force du franc suisse, qui jusqu'à présent a permis d'atténuer le renchérissement des produits importés, le pays est donc parvenu à contenir l'inflation. Mais depuis février, elle dépasse l'objectif de la banque nationale suisse (BNS) qui fixe le seuil de stabilité des prix entre 0% et 2% et a accéléré mois après mois. En mai, l'inflation a en effet grimpé à 2,9%. « Depuis mars, l'inflation s'est de nouveau nettement accentuée sur un large front dans de nombreux pays », a souligné la BNS face à la guerre en Ukraine, aux mesures de confinement en Chine et aux difficultés d'approvisionnement.

Lutter contre l'inflation

« Ce resserrement des rênes monétaires doit empêcher l'inflation de s'étendre en Suisse », a expliqué la BNS. Evoquant « une pression inflationniste accrue », la Banque centrale Suisse a ajouté que sans le relèvement de taux décidé aujourd'hui, la prévision d'inflation serait « nettement plus élevée ». Dans ce contexte, la banque centrale helvète a annoncé jeudi un relèvement de son taux directeur d'un demi-point, tout en le maintenant en terrain négatif à -0,25%. « Il n'est pas exclu que de nouveaux relèvements de taux soient nécessaires dans un avenir proche pour stabiliser à moyen terme l'inflation », a prévenu la BNS dans son communiqué. Elle rompt ainsi avec la ligne qu'elle appliquait depuis plus de sept ans pour limiter la pression sur sa monnaie. Ce resserrement de taux, qui s'appliquera aussi aux avoirs que doivent lui confier les banques et institutions financières, sera effectif à compter du 17 juin.

Concernant la croissance du pays, la banque centrale suisse a maintenu sa prévision à 2,5% pour la Suisse en 2022. L'institution note que la guerre en Ukraine a « jusqu'ici relativement peu pesé sur l'activité économique en Suisse », les conséquences les plus visibles étant l'augmentation des prix de l'énergie et les difficultés d'approvisionnement. Mais comme à l'étranger, « des risques importants grèvent les prévisions pour la Suisse». « Une perturbation de l'approvisionnement énergétique en Europe pourrait affecter sensiblement l'économie de notre pays », a-t-elle argumenté.

Hausses des taux européens et américains

De son côté, l'Union européenne ne peut pas se targuer d'afficher la même confiance en l'avenir. En témoigne, la réunion exceptionnelle organisée en urgence mercredi matin par la Banque centrale européenne (BCE) à l'issue de laquelle elle a annoncé de nouvelles mesures pour éloigner le spectre d'une crise des dettes souveraines et ne pas compromettre sa politique de lutte contre l'inflation.

Le Conseil des gouverneurs de la BCE s'est engagé sur deux mesures : d'une part, « appliquer une certaine flexibilité dans le réinvestissement » des obligations détenues au titre de son programme d'urgence lancé pendant la pandémie (PEPP) et, d'autre part, concevoir un nouvel instrument « anti-fragmentation » pour lutter contre cette divergence des taux au sein de la zone euro. Une semaine plus tôt, l'institution monétaire avait annoncé une hausse des taux directeurs de 25 points de base en juillet, puis en septembre.

Outre-Atlantique, la banque centrale américaine (Fed) a relevé mercredi ses taux directeurs de trois quarts de point, la plus forte hausse depuis 1994. Une hausse « inhabituellement importante », a souligné le patron de la Fed, Jérôme Powell, lors d'une conférence de presse.

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Il s'agit de la troisième hausse d'affilée de ces taux, qui se situent désormais dans une fourchette comprise entre 1,50 à 1,75%, et donnent le ton pour les crédits accordés aux particuliers et entreprises. D'autres relèvements du même ordre pourraient survenir dans les mois à venir : «Dans la perspective d'aujourd'hui, une augmentation de 50 points de base ou de 75 points de base semble très probable lors de notre prochaine réunion », fin juillet, a-t-il ajouté. Alors que l'inflation a atteint un nouveau record en 40 ans, à 8,6% sur un an, selon les derniers chiffres, les Etats-Unis visent toujours de la ramener à 2%.

 (Avec AFP)

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