Mer Rouge : les Etats-Unis accusent l'Iran d'être « très impliqué dans la planification » des attaques des Houthis

Alors que les Houthis mènent des attaques ciblant des navires marchands « traitant avec Israël » en mer Rouge, Washington estime que l'Iran, qui accorde son soutien politique aux Houthis mais dément leur fournir du matériel militaire, leur apporte bien un soutien en équipements, renseignement et financier. Et si les Etats-Unis ont, pour l'heure, opté pour la dissuasion, Joe Biden réfléchirait désormais à déclencher des frappes directes contre les Houthis, selon des médias américains.
En réponse aux attaques, les Etats-Unis ont lancé, la semaine dernière, une coalition navale de désormais vingt pays pour défendre le trafic maritime en mer Rouge.
En réponse aux attaques, les Etats-Unis ont lancé, la semaine dernière, une coalition navale de désormais vingt pays pour défendre le trafic maritime en mer Rouge. (Crédits : Sipa USA via Reuters Connect)

« Nous n'avons aucune raison de croire que l'Iran essaie de dissuader les Houthis de poursuivre leurs actions irresponsables », estime la Maison Blanche. Vendredi, la porte-parole du Conseil de sécurité nationale de cette dernière a, en effet, pointé du doigt l'implication de l'Iran dans les attaques récentes de navires par des rebelles Houthis du Yémen en mer Rouge. Le pays a été « très impliqué dans la planification » de ces attaques, a-t-elle ainsi dénoncé.

« Le soutien iranien aux Houthis est solide et se traduit en livraisons d'équipements militaires sophistiqués, en aide en matière de renseignement, en aide financière et en formation », a précisé la porte-parole, Adrienne Watson, en affirmant que Téhéran avait « rendu possibles » ces attaques tout en « déléguant les décisions opérationnelles aux Houthis ». Et d'ajouter que sans aide de l'Iran, les rebelles yéménites « auraient du mal à repérer et frapper » les bateaux circulant en mer Rouge. « Nous savons que les renseignements qu'utilisent les Houthis dans l'espace maritime reposent sur des systèmes de surveillance fournis par les Iraniens », a encore insisté Adrienne Watson. Selon elle, les informations fournies par Téhéran ont joué un rôle « déterminant » dans le repérage de navires commerciaux par les Houthis. D'après le Wall Street Journal, les rebelles utilisent des renseignements fournis en temps réel par un navire espion lié au régime iranien.

Pour rappel, si l'Iran reconnaît son soutien politique aux Houthis, en guerre depuis 2014 contre le gouvernement yéménite reconnu par la communauté internationale, le pays dément toutefois fournir du matériel militaire aux rebelles.

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Pour appuyer ses accusations, le Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche a diffusé quelques exemples. Le renseignement américain a par exemple relevé « des caractéristiques quasiment identiques » entre les drones iraniens de modèle KAS-04 (ou Samad-3) et ceux utilisés par les Houthis cet automne. Washington a révélé par ailleurs que, le 27 novembre, les rebelles yéménites ont lancé des missiles balistiques de conception iranienne, qui sont tombés à proximité d'un navire de guerre américain.

Pour autant, si les Américains et leurs alliés s'interrogent sur le degré d'entente opérationnelle entre le régime iranien et les Houthis, ils ne sont pas parvenus à déterminer dans quelle mesure le groupe rebelle agit ou non pour le compte de Téhéran. « De tous les groupes proches de l'Iran dans la région, ce sont les Houthis qui ont le lien le plus faible avec Téhéran. Et il est difficile de voir en quoi leurs attaques servent leurs intérêts ou ceux de l'Iran », a d'ailleurs récemment noté un diplomate d'un pays allié des Etats-Unis. Il a souligné par exemple que le Hezbollah, groupe libanais dont la proximité avec l'Iran ne fait elle aucun doute, n'avait pas entrepris d'attaques d'une ampleur comparable.

Perturbation du trafic maritime international

Selon le Pentagone, les Houthis ont lancé plus de 100 attaques, ciblant 10 navires marchands liés à plus de 35 pays. En novembre, ils se sont emparés du Galaxy Leader, prenant en otage ses 25 membres d'équipage. Le navire et son équipage se trouvent toujours au Yémen. Des attaques qui visent, selon les Houthis, les navires « traitant avec Israël ». Les Houthis, qui contrôlent une grande partie du Yémen, mais qui ne sont pas reconnus par la communauté internationale, répètent qu'ils continueront tant que la nourriture et les médicaments ne rentreraient pas en quantité suffisante dans la bande de Gaza, le territoire palestinien bombardé et assiégé par Israël, en réaction à l'attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre sur le territoire israélien.

Les attaques menées par les rebelles houthis du Yémen se déroulent dans le détroit de Bab el-Mandeb. Situé au large du Yémen, il relie l'océan Indien à la mer Rouge, puis la mer Méditerranée via le canal de Suez. Or, il s'agit d'une zone stratégique par laquelle transite 12% du commerce mondial, selon l'International Chamber of Shipping (ICS). Les rebelles yéménites « attaquent la prospérité et le bien-être économique des nations à travers le monde », avait ainsi dénoncé quelques jours plus tôt le porte-parole du Pentagone, les qualifiant de « bandits sur l'autoroute internationale qu'est la mer Rouge ».

De fait, plusieurs bateaux ont fait le choix de changer d'itinéraire à l'instar de l'armateur de Hongkong Evergreen et du pétrolier britannique BP qui ont renoncé à transiter par la zone. Une décision similaire à celle prise depuis le 15 décembre par Maersk, CMA CGM (propriétaire de La Tribune), Hapag-Lloyd et MSC. Tous contournent désormais l'Afrique par le Cap de la Bonne Espérance, un itinéraire qui allonge la durée de transport de deux à trois semaines pour un tanker, d'une semaine pour un navire de commerce moyen, et augmente les coûts. De même, Ikea a indiqué que certains de ses produits en provenance d'Asie seraient livrés avec du retard ou même absents des rayons de l'enseigne à cause de ce changement d'itinéraire.

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« La situation dans le canal de Suez va entraîner des retards et pourrait entraîner des contraintes de disponibilité pour certains produits Ikea », a ainsi écrit le géant suédois du meuble dans un message à l'AFP. « Nous sommes en dialogue étroit avec nos partenaires de transport afin de garantir la sécurité des personnes travaillant dans la chaîne logistique d'Ikea. Nous évaluons d'autres options d'approvisionnement pour garantir la disponibilité de nos produits et nous continuons à suivre la situation de près », a précisé le groupe suédois.

Coalition internationale

En réponse aux attaques, les Etats-Unis ont lancé, la semaine dernière, une coalition navale de désormais vingt pays pour défendre le trafic maritime en mer Rouge. Elle rassemble notamment la France, la Grèce, le Royaume-Uni, Bahreïn, le Canada, l'Italie, les Pays-Bas, la Norvège, l'Espagne, ou encore les Seychelles. Cette coalition militaire « doit faire office de gendarme routier, patrouillant en mer Rouge et dans le golfe d'Aden pour répondre aux (appels de) bateaux commerciaux qui passent par cette voie internationale vitale, et les aider si besoin », a détaillé le porte-parole du Pentagone. Les Etats-Unis mènent des « consultations intensives avec (leurs) alliés et partenaires » sur la manière de répondre à ces attaques, a également précisé la porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche.

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Jusqu'ici, le président américain Joe Biden, qui veut éviter une propagation régionale du conflit entre Israël et le Hamas, a opté pour la dissuasion, en particulier via l'envoi de navires de guerre au Moyen-Orient. Mais selon plusieurs médias américains, il réfléchirait désormais à déclencher des frappes directes contre les Houthis.

Ces derniers n'entendent toutefois pas mettre fin à leurs attaques. Un haut responsable de ce groupe a, en effet, indiqué cette semaine qu'elles s'arrêteraient seulement « si Israël cesse ses crimes et que la nourriture, les médicaments et le carburant parviennent à la population assiégée » de la bande de Gaza, dans le cadre du conflit entre Israël et le mouvement palestinien Hamas. Mercredi, le chef des rebelles yéménites, Abdel Malek al-Houthi, a par ailleurs menacé de riposter en cas de frappe américaine contre le Yémen, après l'annonce par Washington de la formation d'une coalition. « Si l'Amérique veut l'escalade ou va commettre l'idiotie de prendre pour cible notre pays, nous ne resterons pas les bras croisés », a déclaré le chef Houthi dans un discours diffusé par la télévision Al-Massirah contrôlée par son mouvement. « Nous l'attaquerons alors et nous ferons des unités navales américaines, des intérêts américains et de la marine marchande américaine la cible de nos missiles et de nos drones », a-t-il ajouté.

(Avec AFP)

Commentaires 2
à écrit le 23/12/2023 à 21:06
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Bonjour, bien sur , ils y a un état qui arme ses individus pour attaquer les pétroliers et autre navire en mer rouge... la liste est longue a vrais dire. Cela vas des iranien, au russe en passant par les chinois. Dans notre monde multipolaire, t...

à écrit le 23/12/2023 à 16:54
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Pauvres usa, plus rien ne fonctionne pour faire la guerre, avec la GIFFLE en Ukraine depuis le coup monté de Maydan et 2014 ils passent pour des charlots wokistes ! LIRAN fait désormais parti des BRICS alors l'affaire est réglée, l'occident n'a plus ...

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