Moscou et Ankara suspendent le projet de gazoduc Turkish Stream

Moscou et Ankara en crise diplomatique depuis la destruction d'un chasseur-bombardier russe par l'armée turque, ont annoncé la suspension des négociations pour le projet de gazoduc Turkish Stream. Le rêve de la Turquie de devenir un hub énergétique de premier plan est-il en train de s'évaporer ?
Sarah Belhadi
Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan en conférence de presse le 1er décembre 2014 à Ankara. Ils annoncent la suspension du projet énergétique South Stream.

L'escalade verbale est montée d'un cran mercredi entre la Turquie et la Russie - avec cette fois-ci des attaques ad hominem contre le président Erdogan et sa famille accusés de profiter de la contrebande de pétrole pratiquée par Daech - et la tension a franchi un nouveau cap. Washington a d'ailleurs tenté d'éteindre l'incendie, et démenti fermement les accusations de Moscou sur l'implication de dirigeants turcs dans le trafic de pétrole produit par l'Etat islamique.

Nouveau virage pour Moscou

Mais jusqu'à présent, en dépit des sanctions économiques annoncées la semaine dernière contre la Turquie, le secteur énergétique semblait épargner...même si plusieurs rumeurs avaient fuité dans la presse.

Ce jeudi 3 décembre, le ministre russe de l'Energie, Alexandre Novak, a finalement annoncé que les négociations en cours (déjà laborieuses) sur le projet de gazoduc Turkish Stream étaient suspendues.

Les discussions avaient déjà pris du retard en raison de l'instabilité politique en Turquie. Moscou et Ankara s'étaient entendus pour reprendre les discussions après les élections législatives du 1er novembre.

Ce projet devait relier la Russie à la Turquie par la mer noire, et fournir 63 milliards de mètres cubes par an aux pays européens.

Turquie

De son côté, le Financial Times avançait le chiffre de 16 milliards de mètres cubes de gaz par an pour la consommation intérieure en Turquie, dépendante à 50% du gaz russe.

Il y a encore quelques semaines, une mise en service partielle était annoncée pour fin 2016. Gazprom, le géant gazier russe, avait finalement fait savoir que ces délais ne pourraient être tenus, et que les capacités d'approvisionnement ne dépasseraient pas les ...32 milliards de mètres cubes par an.

Le South Stream, l'autre projet avorté

Mais dans le domaine énergétique, Moscou et Ankara n'en sont pas à leur premier coup d'essai. Le Turkish Stream remplaçait déjà un autre projet similaire, le South Stream initié en 2007, donc bien avant le début du conflit avec l'Ukraine (qui a ravivé les tensions entre la Russie et l'UE).

Ce projet de gazoduc bloqué par l'Union Européenne, a été officiellement annulé par la Russie il y a tout juste un an, le 1er décembre 2014. Bruxelles s'opposait en effet au passage du gazoduc dans les états membres de l'UE, en l'occurrence de la Bulgarie.

Le chantier initié par les groupes Gazprom (russe), ENI (italien) -dont EDF faisait également partie- avait pour objectif de relier sur 3.600 km la Russie à l'Autriche, en passant sous la mer noire, puis par la Bulgarie, la Serbie, la Hongrie.

South stream

Ce pipeline devait également fournir jusqu'à 63 milliards de mètres cubes par aux pays européens, et livrer du gaz au sud de l'Europe sans passer par l'Ukraine. Le coût de réalisation de ce projet titanesque avait été évalué à 40 milliards de dollars (ou 32 milliards d'euros).

 Accord gazier entre la Turquie et l'Azerbaïdjan

Mais la construction du TANAP - le Trans-Anatolian Natural Gas Pipeline- pourrait quant à lui permettre de délivrer la Turquie de sa dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie, et réaffirmer sa fonction de transit.

Le chantier a été lancé en mars, près de Kars (au nord-est), et ce tube de 1.850 km doit permettre d'acheminer le gaz azerbaïdjanais, via la Géorgie et la Turquie, jusqu'à l'Union européenne (UE). Il doit être inauguré en 2019. Officiellement.

En raison des sanctions russes, Ankara doit désormais songer à diversifier ses ressources pour assurer sa sécurité énergétique. Mercredi, l'agence de presse Reuters rapportait que Ankara se préparait à réduire d'un quart ses importations de gaz naturel liquéfié (GNL) en provenance de Russie.

Doha, le plan B d'Ankara ?

La Turquie n'a pas tardé à trouver un plan B... au Qatar. Recep Tayyip Erdogan y était en visite officielle les 1er et 2 décembre, accompagné notamment du nouveau ministre de l'énergie Berat Albayrak, qui n'est autre que le gendre du président turc.

La Turquie et le Qatar ont signé, mercredi, un pré-accord pour l'achat par Ankara du Gaz Naturel Liquide (GNL), rapporte l'agence d'information turque Anadolu.

Sarah Belhadi
Commentaires 15
à écrit le 03/12/2015 à 20:26
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La question à se poser pourquoi les les Turcs ont voulu se venger en abattant cette avion qui a dû toucher au but au cours de sa mission en Syrie .

à écrit le 03/12/2015 à 18:40
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Que recherche la Turquie , de l'argent de l'Europe, ainsi faire pression sur l'Allemagne, mais aussi sur la France, pour négocier la rentrée de la Turquie, dans l'union européenne , c'est un piège pour l'union européenne , la Turquie ne pourra jamai...

le 04/12/2015 à 9:32
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Pour comprendre ce que veux la Turquie, essayez de vous focaliser sur son obsession éternelle à savoir les Kurdes de Turquie et la création d'un état Kurdes au sein ou près des frontières de la Turquie. L'agenda politique et géostratégique des pay...

à écrit le 03/12/2015 à 18:15
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Poutine, un chef que beaucoup de français aimeraient avoir....!

le 03/12/2015 à 23:40
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Qu'ils aillent vivre en Russie. Facile! Pense que l'herbe est plus verte ailleurs ce sont leur droit le plus strict. Mais comme on dit: Se donner les moyens de ses ambitions.

le 04/12/2015 à 10:28
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@LeTsar II: Non, en réalité c'est l'image médiatique de Poutine que beaucoup de français aimeraient avoir comme un chef. La réalité russe est beaucoup moins glorieuse. D'où la question: qui a créé cet image et pour quel but?

le 05/12/2015 à 15:28
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A bon ,

à écrit le 03/12/2015 à 17:39
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Et dire que la Turquie veut rentrer dans l Europe a la bannière islamique,cela donne froid dans le dos!

à écrit le 03/12/2015 à 17:13
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Les photos satellites des camions citernes que le ministre de la défense Russe montraient sont bien celles des citernes du Nord du Iraq. confirmation du ministre Kurde du pétrole du Kudistan Iraquien

à écrit le 03/12/2015 à 15:08
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Bon, c'est une officialisation d'une réalité qui ne date pas de hier ou du 24 novembre. Le projet a été mal pensé et trop rapidement mis en chantier sans conclure des accords sérieux, un genre d'une réaction hystérique des autorités russes après la ...

le 03/12/2015 à 18:49
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Bonne analyse

à écrit le 03/12/2015 à 15:00
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Mouais.... Poutine comme d'habitude perd son sang-froid Il menace à tout va mais ce n'est que de la com destiné au peuple Russe Que ferait ce même Poutine si des bombardiers de l'OTAN viole son espace aérien J'ai ma p'tite idée...

le 03/12/2015 à 16:32
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@Ad68: sauf que le viol de l'espace aérien turc est loin d'être prouvé. Je te signale par ailleurs que c'est pas Poutine qui menace, mais les Occidentaux qui imposent des sanctions :-) un peu d'ojecitvité en se renseignant à partir de plusieurs sourc...

le 03/12/2015 à 21:20
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Vous avez raison l avion ayant été abattu à 4 km à l intérieur de la Syrie il était donc dans l espace aérien turc puisque celui-ci englobe la partie nord de la Syrie de même qu il débordé sur la Grèce. De toute façon il est inutile de polémiquer ...

le 04/12/2015 à 2:41
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Pour votre info la Turquie viole constamment l'espace aérien de la Grèce et donc de l'EU, sans qu’un avion soit abattu. Qui a perdu son sang-froid à votre avis ? Et que pensez-vous de l’achat du pétrole de Daech par la Turquie ? Merci de votre répons...

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