"Puissance coloniale", "rideau de sang", Paris change de ton contre Moscou qui installe sa guerre d'influences

Après Emmanuel Macron la veille en Afrique qui a accusé la Russie de "colonialisme", sa secrétaire d'Etat chargée de l'Europe a confirmé un changement de ton plus radical vis-à-vis du Kremlin. Plus de cinq mois après le début du conflit en Ukraine, les sanctions occidentales ont ralenti la Russie mais ne l'empêchent pas de nouer de nouvelles alliances pour compenser la rupture avec l'Europe.
(Crédits : Benoit Tessier)

La référence au "rideau de fer" qui, pendant cinquante ans, a symbolisé le mur culturel et économique entre l'Europe de l'Ouest et l'ex-URSS est évidente. Plus de trois ans après la chute de l'ancien empire soviétique, la secrétaire d'Etat française chargée de l'Europe Laurence Boone a utilisé les termes de "rideau de sang" pour qualifier l'état des relations entre les Etats membres de l'Union Européenne et la Russie en guerre en Ukraine.

Pour renforcer ces nouveaux blocs exacerbés par le conflit, la représentante française a tenu à encourager les statuts de candidats de l'Ukraine et de la Moldavie, toutes deux en lice pour une adhésion à l'UE :"il ne peut pas y avoir de demi-mesure quand la Russie choisit d'établir un rideau de sang entre elle-même et son voisinage", a déclaré Laurence Boone mercredi.

L'Ukraine, théâtre de "crimes innommables" des forces russes, est prise dans "une guerre qu'elle doit gagner parce qu'il y va de son avenir et du nôtre", a-t-elle déclaré lors d'un débat sur la présidence française de l'UE qui s'est achevée fin juin.

En creux, se jouent surtout des enjeux énergétiques majeurs pour l'UE dont les entreprises subissent de plein fouet la hausse des prix de l'énergie. Mais pour l'administration Poutine, les ressources en gaz ou les infrastructures de l'Ukraine sont autant de moyens de pression possibles pour imposer sa lecture du continent.

Aussi, les troupes russes ont pris le contrôle de la deuxième plus grande centrale énergétique d'Ukraine, a déclaré mercredi un conseiller du président ukrainien Volodimir Zelensky, ajoutant que Moscou redéployait "massivement" ses troupes dans trois régions du sud du pays.

"La Russie est l'une des dernières puissances impériales coloniales" en décidant "d'envahir un pays voisin pour y défendre ses intérêts", a d'ailleurs affirmé Emmanuel Macron la veille lors d'une conférence de presse avec son homologue béninois Patrice Talon à Cotonou.

"Je parle sur un continent (l'Afrique, NDLR) qui a subi les impérialismes coloniaux", a-t-il tenu à souligner.

Au même moment, le ministre des affaires étrangères russes Sergueï Lavrov effectuait lui aussi une tournée en Afrique pour nouer des alliances et s'assurer du soutien de pays contre des livraisons de denrées.

Devant la Ligue arabe, Sergueï Lavrov a même salué des "positions équilibrées, justes et responsables", et évoqué un sommet "au plus vite" avec les chefs de diplomatie arabes ainsi qu'un autre avec les pays africains mi-2023.

L'UE va financer des armes pour l'Ukraine

Pourtant, l'Europe et ses alliés occidentaux s'est engagée à une riposte basée sur des sanctions pour affaiblir le régime de Vladimir Poutine. Laurence Boone s'est félicitée que les 27 aient "répondu collectivement par des sanctions inédites, sans précédent par leur ampleur" à l'invasion russe.

L'objectif, a-t-elle poursuivi, est de "rendre la guerre économiquement, financièrement et militairement insoutenable pour la Russie".

Une conclusion pourtant largement tempérée par les derniers chiffres du FMI sur le PIB attendu en 2022 de la Russie, beaucoup moins que prévu.

Lire aussiL'économie russe résiste mieux que prévu (celle de l'UE moins bien), selon le FMI

Elle a aussi estimé que l'UE avait "brisé un tabou majeur" en finançant des armements pour Kiev. Pour l'UE, "le temps de l'innocence stratégique est révolu", a souligné Mme Boone.

Gaz russe : se préparer au pire

Dans le même temps, l'Europe est confrontée à un risque majeur, celui de ne pouvoir contrôler l'explosion des prix de l'énergie avec la fermetures des robinets de gaz russes. Si la Russie souhaite "couper le gaz" à l'Union européenne, elle "n'attendra pas l'automne ou l'hiver", a estimé jeudi le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, jugeant "qu'elle ne nous permettra pas de remplir nos stocks pendant l'été".

Pour Josep Borrell, il est néanmoins peu probable qu'il y ait "une rupture brutale" dès "demain" de l'approvisionnement, même si Moscou est déjà en train d'annoncer que les livraisons de gaz seront "moins élevées que prévu".

La Russie veut vendre son gaz et recherche "des clients alternatifs" à ceux de l'UE, car elle sait que nous allons nous passer à terme complètement du gaz russe, a souligné le chef de la diplomatie européenne.

Moscou est d'ailleurs en train de construire à la hâte d'autres gazoducs, "reliés à d'autres clients". Mais la mise en service de ces gazoducs "prendra du temps", a-t-il rappelé.

La Russie a fortement réduit ces dernières semaines ses livraisons de gaz à l'Europe - notamment via le gazoduc Nord Stream, qui ne fonctionnait mercredi qu'à 20% de ses capacités - en évoquant des nécessaires travaux de maintenance.

Pour tenter de prévenir les risques de pénuries cet hiver, les 27 membres de l'UE se sont accordés mardi sur un plan prévoyant que chaque pays fasse "tout son possible" pour réduire, d'ici à mars 2023, sa consommation de gaz d'au moins 15% par rapport à la moyenne des cinq dernières années sur la même période.

(Avec AFP)

Commentaires 6
à écrit le 29/07/2022 à 14:24
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L'OUA ( organisation des états africain ) n'a de cesse de dénoncer partout ( la France condamnée à l'ONU ) et depuis 50 ans jusqu'à ce jour, l'occupation et la colonisation illégale de Mayotte. Macron aurait quelque chose à dire ? Accessoirement la c...

à écrit le 29/07/2022 à 14:24
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L'OUA ( organisation des états africain ) n'a de cesse de dénoncer partout ( la France condamnée à l'ONU ) et depuis 50 ans jusqu'à ce jour, l'occupation et la colonisation illégale de Mayotte. Macron aurait quelque chose à dire ? Accessoirement la c...

à écrit le 28/07/2022 à 21:13
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Si "Paris" pouvait la fermer un peu et se servir de ce qu il a " j espere" entre les deux oreilles .. la politique etrangere de " Paris" serait mieux gérer Merci en même temps de dire que c est " Paris" qui parle et pas la France .. ouf

le 28/07/2022 à 23:28
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Qu en savez- vous c est votre opinion qui est peut être minoritaire … on n a pas vu de manif monstre pour la Russie …

à écrit le 28/07/2022 à 19:30
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Pourquoi la Russie ne tenterait pas de faire ce qu'ont fait (et font encore), en Afrique et ailleurs, plein d'autres pays importants ?

le 28/07/2022 à 23:27
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Parce que la Russie est une dictature …

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