Suisse et Vietnam rejettent les accusations des États-Unis de manipuler leur monnaie

La Banque nationale suisse (BNS) maintient sa ligne accommodante et se défend de manipuler sa monnaie, de même que le Vietnam rejette les accusations américaines sur sa monnaie.
Une politique monétaire expansionniste demeure nécessaire pour surmonter la crise, a déclaré Thomas Jordan, le président de la BNS, dans son discours d'ouverture pour la conférence trimestrielle de l'institut monétaire.
"Une politique monétaire expansionniste demeure nécessaire pour surmonter la crise", a déclaré Thomas Jordan, le président de la BNS, dans son discours d'ouverture pour la conférence trimestrielle de l'institut monétaire. (Crédits : © Thomas Hodel / Reuters)

Après avoir été accusés, par les États-Unis mercredi, de manipuler leur monnaie pour en tirer un avantage commercial indu, la Suisse et le Vietnam ont réagi de concert ce jeudi pour démentir ces affirmations.

La Suisse défend sa "politique monétaire expansionniste"

La banque centrale suisse a maintenu ce jeudi les grandes orientations de sa politique monétaire ultra-accommodante dans le "contexte difficile" de la crise sanitaire, se défendant de manipuler sa monnaie après le bras de fer avec le Trésor américain.

Lors de sa réunion trimestrielle de politique monétaire, la Banque nationale suisse (BNS) a laissé son taux négatif inchangé, en place depuis 2015, à -0,75%, a-t-elle indiqué dans un communiqué. Elle a une nouvelle fois assuré être prête à intervenir sur les marchés des changes pour juguler les tensions sur sa devise, précisant que le niveau du franc suisse reste "élevé".

"Une politique monétaire expansionniste demeure nécessaire pour surmonter la crise", a déclaré Thomas Jordan, son président, dans son discours d'ouverture pour la conférence trimestrielle de l'institut monétaire.

"La pandémie de Covid-19 continue de peser lourdement sur l'économie", a-t-il ajouté, faisant valoir que le maintien des taux à des niveaux bas contribue à soulager les entreprises et collectivités publiques qui sont confrontées à un besoin de financement "accru du fait de la crise".

Les interventions sur les marchés des changes contribuent de leur côté à contre-balancer les pressions à la hausse sur le franc suisse, M. Jordan insistant sur le fait que "ces pressions sont particulièrement fortes en période d'incertitude".

Comme d'autres banques centrales, la BNS est intervenue massivement pour aider à stabiliser l'économie face au choc de la crise sanitaire.

Sa marge de manœuvre pour abaisser ses taux était cependant restreinte dans la mesure où sa politique monétaire s'articule déjà depuis plus de cinq ans autour d'un taux négatif de -0,75% visant à désamorcer les pressions sur le franc suisse, qui fait partie des grandes valeurs refuges, à l'image du yen japonais, de l'or, des bons du Trésor américain ou des emprunts allemands.

Pour lutter contre les poussées de fièvre sur le franc suisse, à nouveau sous pression avec la crise sanitaire, la BNS avait accru ses interventions sur les marchés de changes, qui ont culminé à 90 milliards de francs suisses durant le premier semestre.

Récession moins forte en 2020

Mercredi, le pays alpin s'est trouvé dans le viseur du Trésor américain qui a accusé le Vietnam mais aussi la Suisse de manipuler leur monnaie pour en tirer un avantage commercial indu dans un rapport semi-annuel évaluant la situation de ses vingt principaux partenaires commerciaux.

Lire aussi : Washington accuse la Suisse et le Vietnam de manipuler leurs monnaies

L'objectif de cette politique monétaire accommodante "est de garantir la stabilité des prix", a défendu M. Jordan durant la conférence de presse, rejetant fermement ces accusations.

"Nous avons le taux d'inflation le plus faible parmi toutes les grandes devises", a-t-il insisté, ce qui est "la preuve que nous n'utilisons pas la politique monétaire pour en gagner un avantage. Bien au contraire", a-t-il répliqué.

Lors de cette décision trimestrielle de politique monétaire, la BNS a de nouveau ajusté ses prévisions d'inflation face à "une nouvelle dégradation de la situation économique entraînée par la deuxième vague de la pandémie".

Pour 2020, elle s'attend à un recul des prix un peu plus prononcé, de l'ordre de -0,7%, contre -0,6% auparavant. Elle prévoit ensuite une stagnation en 2021, à 0% alors qu'elle tablait encore sur une maigre reprise de 0,1% lors de sa précédente réunion trimestrielle en septembre. Elle a en revanche maintenu son estimation de légère reprise de l'inflation en 2022, à 0,2%.

La BNS s'est en revanche montrée moins pessimiste sur l'ampleur de la récession attendue pour 2020, compte tenu du vif rebond de l'économie suisse au troisième trimestre. Elle table désormais sur une contraction du produit intérieur de 3% (contre 5% auparavant).

"La propagation du virus a repris en octobre", a-t-elle cependant nuancé, estimant que les perspectives conjoncturelles se sont en conséquence "à nouveau assombries". Pour 2021, la BNS s'attend à un rebond de 2,5% à 3%, M. Jordan précisant que la prévision pour la reprise reste "entachée d'une forte incertitude".

Le Vietnam sur la même ligne que la Suisse

Le Vietnam a lui aussi rejeté jeudi les accusations des États-Unis, expliquant agir pour maintenir la stabilité de son économie et non pour en tirer un avantage commercial indu.

Le Trésor américain a accusé mercredi le pays communiste d'intervenir sur les marchés des changes pour affaiblir sa monnaie, rappelant que selon la dernière évaluation du Fonds monétaire international le dong était sous-évalué de 8,4% en 2018.

La Banque d'État du Vietnam a expliqué dans un communiqué que sa politique visait à "contrôler l'inflation et stabiliser la macro-économie, pas à créer un avantage inéquitable pour le commerce international".

"La récente intervention de la Banque d'État dans l'achat de devises étrangères visait à assurer le bon fonctionnement du marché des devises", ajoute la banque centrale vietnamienne.

La porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Lê Thi Thu Hang, a déclaré que le Vietnam attachait "une importance particulière" aux liens commerciaux avec les États-Unis et consultait Washington pour régler "les questions en suspens".

Commentaire 1
à écrit le 18/12/2020 à 9:11
Signaler
Posture diplomatique seulement formelle puisque que pour que les états unis se permettent de montrer du doigt deux de leurs principaux partenaires c'est qu'ils préviennent dans un premier temps leurs alliés amicalement. Mais il y a de fortes chan...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.