Les effets de la pandémie sur l'économie européenne risquent de se prolonger. Selon les derniers résultats du cabinet Markit, rendus publics ce mercredi 3 juin, l'indice final de l'activité globale dans la zone euro a augmenté par rapport au mois d'avril, passant de 13,6 à 31,9. S'il affiche son plus haut niveau depuis trois mois, cet indicateur avancé, très scruté par les milieux financiers et les économistes, demeure sous le seuil de 50, qui sépare la contraction d'une expansion de l'activité.
Les mesures mises en oeuvre pour limiter la propagation du virus à l'échelle du continent ont des répercussions profondes et durables sur l'économie du Vieux Continent. Le spectre d'une récession violente et brutale pour le second trimestre s'amplifie avec ces mauvais résultats au cours des mois d'avril et mai. Le chef économiste Chris Williamson s'est montré pessimiste.
« Les dernières données PMI ont mis en évidence une nouvelle baisse marquée de l'activité dans tous les pays couverts par l'enquête en mai, témoignant ainsi de l'ampleur et de l'étendue de la crise actuellement traversée par la région. Le PIB de la zone euro devrait en effet afficher un recul sans précédent au deuxième trimestre 2020, les données PMI suggérant également, sur la même période, la plus forte progression du chômage jamais enregistrée dans la zone de la monnaie unique."
Forte contraction dans le tertiaire
La diffusion de cette maladie infectieuse a fait disjonter le secteur des services en Europe. D'après les économistes de Markit, l'indice mesurant l'activité dans le tertiaire s'est fortement redressé en mai (30,5) par rapport à avril (12) mais reste lui aussi bien inférieur au seuil de 50. Compte tenu du poids des services dans l'économie européenne, l'effondrement prolongé de ce secteur risque de fortement baisser le produit intérieur brut des pays les plus tertiarisés. En France ou en Italie par exemple, le poids des services marchands dans la valeur ajoutée dépasse les 40%, selon de récents chiffres de la direction générale des entreprises (DGE).
L'industrie a également traversé une période très troublée. De nombreux grands groupes industriels européens ont déjà annoncé des destructions de postes par milliers et des fermetures de sites comme Renault en France par exemple. Bien que l'Allemagne affiche un bilan humain et sanitaire moins désastreux que d'autres puissances européennes, son modèle économique fortement industrialisé et exposé au commerce international devrait encore souffrir pendant de nombreux mois après avoir déjà connu une passe difficile en 2019.
Tous les pays sont touchés
Les enquêtes menées par l'institut Markit dans les grandes puissances européennes montrent que tous les pays ont été frappés de plein fouet au mois de mai malgré la levée progressive des mesures de restriction. L'Espagne (29,2), la France (32,1), l'Allemagne (32,3) et l'Italie (33,9) enregistrent des niveaux d'activité encore bien inférieurs à 50. La péninsule, qui avait été touchée très tôt durant la pandémie, affiche le meilleur rebond au mois dernier. Malgré ces chiffres légèrement favorables, l'économie italienne, minée par une croissance atone depuis des années et une productivité au plus bas, risque d'avoir des difficultés à rebondir si la relance prend du temps.
La spirale de la récession
L'économie de la zone euro pourrait rentrer dans une spirale récessive rapidement. Avec l'élimination progressive des mesures de confinement et le durcissement des aides et garanties par les États, beaucoup d'entreprises vont devoir réduire drastiquement leurs activités ou baisser le rideau, entraînant de fortes suppressions de postes sur l'ensemble du continent. Beaucoup de travailleurs précaires en contrats courts, en contrat temporaire ou autoentrepreneurs, qui servent souvent de variables d'ajustement dans les premières semaines, ne bénéficient pas toujours de filets de sécurité en cas de violente crise économique. Les systèmes d'assurance-chômage ne peuvent pas toujours jouer leur rôle d'amortisseur social lors d'une récession, même si les gouvernements assouplissent les règles ou reportent certaines réformes comme en France.
Selon les derniers chiffres d'Eurostat publiés ce mercredi 3 juin, le taux de chômage au sens du bureau international du travail (BIT) a augmenté de 0,2 point entre mars et avril passant de 7,1% à 7,3%. Le nombre de chômeurs a augmenté de 210.000 personnes sur cette période. Une hausse prolongée du chômage pourrait favoriser une spirale récessive avec une baisse de revenus pour une partie de la population active et donc de la consommation, moteur de l'économie européenne.
Les prochaines réunions pour la mise en oeuvre du plan de relance à l'échelle européenne vont être déterminantes pour l'avenir de la zone euro. Si les dernières annonces ont été reçues favorablement dans les milieux économiques, le manque de coordination entre les principaux pays et une relance en ordre dispersé risquent encore d'accroître les fractures dans une zone monétaire déjà bien fragilisée.
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