
« Fini la naïveté, maintenant c'est l'action. » C'est avec un ton volontariste que le commissaire européen au Marché intérieur, le Français Thierry Breton, présentait ce jeudi aux côtés de Valdis Dombrovskis, le vice-président de la Commission, et commissaire en charge du Commerce, les grandes lignes de la Loi sur les matières premières critiques (Critical Raw Materials Act), à l'issue d'un travail de 18 mois. Celle-ci vise à réduire les importations des pays européens de 18 métaux considérés comme stratégiques et à sécuriser leur approvisionnement pour développer les filières industrielles locales permettant de décarboner l'économie de l'Union européenne.
La demande va exploser
En effet, la demande de certains métaux comme le lithium, le nickel, les terres rares ou encore le cobalt va exploser. Ainsi, « d'ici 2030, les besoins de terres rares pour produire des turbines éoliennes vont être multipliés par cinq d'ici 2030, ceux du lithium, indispensable pour produire des batteries pour véhicules électriques, vont être multipliés par 12 d'ici 2030 et par 21 d'ici 2050 », a rappelé Valdis Dombrovskis.
Outre la mise en place d'une plateforme d'achat commune, la stratégie européenne se déploie sur trois plans selon le document : assurer 10% de l'offre minière localement contre 3% aujourd'hui, développer des capacités de raffinage à hauteur de 40%, incorporer d'ici 2030 au moins 15% de métaux recyclés dans les produits.
Pour la Commission européenne, il s'agit de ne pas se faire distancer par la Chine, qui domine largement depuis des années ces marchés et ces activités. Thierry Breton a rappelé que nous dépendons pour 97% de nos besoins en magnésium et de 90% pour ceux d'aimants magnétiques de la République populaire. Le Vieux continent doit aussi composer avec les Etats-Unis dont le plan d'aides massif (Inflation Reduction Act) du président Joe Biden risque d'attirer nombre d'entreprises européennes pour investir outre-Atlantique.
Aussi, le texte de la loi fixe comme limite de ne pas dépendre d'un pays tiers unique pour plus de 65% des importations européennes de chacune des dix-huit matières premières définies comme stratégiques (y compris cobalt et nickel).
Simplifier les procédures
L'une des préconisations, notamment pour les projets d'activités extractives, est de simplifier et accélérer les procédures et les octrois de permis pour ouvrir des sites ou favoriser les implantations industrielles. L'ouverture d'une mine en Europe nécessite en moyenne cinq ans, le texte vise à réduire cette période de moitié tout en protégeant la biodiversité et l'environnement. Nombre de projets ont fait l'objet de contestation de la part de la population locale comme en Serbie pour l'ouverture d'une exploitation de lithium. « Nous avons des ressources minières. Il faut se donner les moyens de les extraire tout en respectant l'environnement. La technologie va nous y aider », a souligné Thierry Breton.
Comme l'Europe ne peut pas devenir indépendante sur l'approvisionnement en métaux, l'accent sera mis sur le développement de partenariats avec des pays producteurs. Thierry Breton a ainsi évoqué des discussions avec la Namibie sur des projets pour développer la production de terres rares et de lithium, avec la République démocratique du Congo (RDC) sur la production de cobalt.
Mais contrairement à la politique menée par d'autre pays, la Chine en l'occurrence, l'Europe compte sur des coopérations avec ces pays partenaires, que ce soit en particulier en Afrique et en Amérique latine, en proposant un meilleur partage de la valeur, en finançant le développement de chaînes de valeur locale, à condition de respecter les normes européennes en matière d'environnement, de biodiversité et de social.
Sujets les + commentés