Salaires : la BCE appelle les syndicats à être raisonnables pour ne pas alimenter l'inflation

Le vice-président de la Banque centrale européenne suggère aux syndicats de modérer leurs revendications salariales face aux hausses de prix afin de ne pas alimenter la courbe de l'inflation et ne pas créer de « spirale salaires-prix ». Pour Luis de Guindos, cela entraînerait encore des augmentations de taux de l'institution, ce qui pèserait sur l'économie. Il préconise plutôt une action des pouvoirs publics afin de soutenir le pouvoir d'achat et atténuer ainsi l'impact de la hausse générale des prix.
Dans un article publié début janvier, la BCE estime que la hausse des salaires en zone euro devrait être « très forte » cette année.
Dans un article publié début janvier, la BCE estime que la hausse des salaires en zone euro devrait être « très forte » cette année. (Crédits : WOLFGANG RATTAY)

Le spectre d'une « spirale inflationniste » pèse sur l'Europe. Depuis plusieurs mois déjà, la Banque centrale européenne (BCE) craint qu'une hausse des salaires, due à la hausse du coût de la vie, entraîne en retour une hausse des coûts de production pour les entreprises qui, pour éviter de réduire leurs marges bénéficiaires, la répercuteraient sur leurs produits, alimentant une nouvelle hausse des prix, et créant ainsi une boucle ressemblant à un cercle vicieux duquel il serait difficile de s'extirper sans une forte hausse des taux.

Pour la BCE, une « spirale salaires-prix » est à craindre...

Bref, une « spirale salaires-prix » qu'il faut « éviter », dixit le vice-président de la BCE, Luis de Guindos, dans une interview au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung ce jeudi 9 février.

Selon lui, « les syndicats pourraient être enclins à demander des augmentations de salaire excessives. Nous devons être prudents », affirme-t-il, ajoutant que « personne n'est gagnant » lorsque s'enclenche une boucle inflationniste entretenue par les hausses de salaires.

Ce discours intervient après la publication début janvier par la BCE d'un article dans lequel elle estime que la hausse des salaires en zone euro devrait être « très forte » cette année. Cette croissance va refléter « un certain rattrapage entre les salaires et les taux élevés d'inflation » observés depuis l'année 2021, note-t-elle.

Au deuxième trimestre 2022, le taux d'évolution annuel réel des salaires était négatif, à -5,2%, en zone euro, selon l'article. Cela pourrait amener les syndicats à « exiger des augmentations salariales plus importantes lors des prochains cycles de négociations », en particulier dans les secteurs à salaires modérés, ajoutent les auteurs.

Lire aussiEn 2023, la hausse des salaires devrait être « très forte » en zone euro (BCE)

... analyse contredite par le FMI, au regard de la situation actuelle

Ce phénomène n'est cependant pas observé pour le moment. Les dernières négociations contractuelles ayant généralement abouti à une augmentation de salaire en moyenne de 3,8% pour 2022 et de 3,5% pour 2023, indiquait Philip Lane dans un blog publié sur le site de la BCE en fin d'année dernière.

Mais si une telle spirale arrivait, « la BCE devra augmenter les taux d'intérêt plus qu'elle ne l'aurait fait autrement », souligne-t-il, ce qui aurait pour conséquence de renchérir encore le coût du crédit et de peser davantage sur l'activité économique.

Reste que, si la crainte de la BCE s'appuie sur des précédents historiques comme la spirale inflationniste née lors du premier choc pétrolier en 1974, elle est contestée, au regard de la situation actuelle, par une étude publiée par plusieurs économistes du Fonds monétaire international (FMI). Ces derniers affirment en effet qu'augmenter les salaires n'induit pas systématiquement une spirale inflationniste.

Pour la BCE, les pouvoirs publics peuvent éviter des revendications salariales excessives

Pour autant, à la BCE, tout en admettant que les salariés sont en droit d'attendre une compensation, Luis de Guindos suggère que c'est aux pouvoirs publics de soutenir le pouvoir d'achat « en introduisant des aides ciblées pour atténuer l'impact de l'inflation ».

« Ainsi, les gens pourraient réduire leurs revendications salariales et la BCE n'aurait pas à resserrer autant sa politique monétaire. Tout le monde y gagnerait », estime le responsable.

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Une spirale des salaires compliquerait la lutte engagée par la BCE contre l'inflation au moment où celle-ci commence à ralentir dans la zone euro. La BCE a drastiquement resserré sa politique monétaire, relevant ses taux à cinq reprises depuis juillet pour un cumul de 3 points de pourcentage, un rythme inédit. Le but est de freiner la demande des consommateurs, en particulier, afin de juguler les hausses des prix.

Une inflation en baisse, mais rien n'est gagné

Ce qui semble porter ses fruits. De 10,4% en octobre, l'inflation a reculé en janvier pour le troisième mois consécutif, s'établissant à 8,5%, grâce à l'accalmie sur les tarifs de l'énergie et le déblocage de chaînes logistiques d'approvisionnement.

Après un nouveau relèvement très probable des taux directeurs de 0,50 point lors de la prochaine réunion de la BCE en mars, « d'autres hausses de taux ne sont pas à exclure », a assuré Luis de Guindos pour qui ce n'est pas le moment de baisser la garde.

Selon le responsable, la réouverture de l'économie en Chine, après les restrictions sanitaires, « entraîne une augmentation de la demande, pour l'énergie, les métaux et les produits de base. Cela peut générer davantage de pressions sur les prix ».

Lire aussiInflation : la lutte sera « longue et cahoteuse » prévient la Fed, la BCE ne prévoit pas plus de « baisser la garde »

(avec AFP)

Commentaires 16
à écrit le 10/02/2023 à 14:49
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Ces gens n’ont pas de honte qu’ils divisent leurs salaires et leurs avantages par 10 ..vite une révolution

à écrit le 09/02/2023 à 23:15
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Il nous fait marrer le mec de la bce .. sur que lui n’a pas été augmenté .. s il veut on a peut échanger nos salaires il fera une bonne expérience sociale/ action à partager en rex et cas d école avec ses collègues …il nous font marrer ces mecs en m...

à écrit le 09/02/2023 à 23:15
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Il nous fait marrer le mec de la bce .. sur que lui n’a pas été augmenté .. s il veut on a peut échanger nos salaires il fera une bonne expérience sociale/ action à partager en rex et cas d école avec ses collègues …il nous font marrer ces mecs en m...

à écrit le 09/02/2023 à 23:13
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Il nous fait marrer le mec de la bce .. sur que lui n’a pas été augmenté .. s il veut on a peut échanger nos salaires il fera une bonne expérience sociale/ action à partager en rex et cas d école avec ses collègues …il nous font marrer ces mecs en m...

à écrit le 09/02/2023 à 21:52
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Ceux qui ont distribué de l'argent à tout va avec leur quantitative easing se permettent de faire la morale aux travailleurs qui aimeraient que leurs salaires suivent l'inflation? De qui se moquent ils?

le 10/02/2023 à 2:49
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Mais, de vous tous. Troupeau de veaux. Ils auraient tord de se gener. Depuis le regne des saigneurs et autres despotes, juste l'appellation a ete changee. Les process sont les meme.

à écrit le 09/02/2023 à 15:43
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Au final, ce serait l'augmentation des dividendes perçus par les actionnaires qui nous protégerait de l'inflation. Décidément on vit une époque où tout est organisé pour que la richesse produite par l'ensemble des travailleurs finisse toujours entre ...

le 09/02/2023 à 18:10
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ouh ouh Valeur Travail où es-tu ? où te caches-tu ?? Coquine !! C'est Blackrock qui t'a kidnappée ???? Ou tu te caches derrière le volume écrasant de l'Héritage ??? La valeur Héritage t'écrase !!!! Eh oui, c'est une vraie valeur, l'Héritage !!...

à écrit le 09/02/2023 à 15:39
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La bce n'a pas compris que les syndicats regardent des intérêts catégoriels, la politique monétaire ils s'en foutent. Va falloir augmenter les taux au lieu de courir encore une fois après le train. L'inflation vient du gonflement du bilan de la bce, ...

à écrit le 09/02/2023 à 15:04
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Quand le laxisme de la BCE generait une flambee du prix des actifs (actions mais surtout immobilier) ils n ont pas demandé aux beneficiaires de se moderer ... Et pourtant +50 % sur le logement fait bien plus de degats economiques que +8 % sur un sal...

à écrit le 09/02/2023 à 13:11
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Depuis quand les salaires sont à l'origine des inflations ? C'est le manque de ressources naturelles qui est le levier inflationniste, qu'elles soient alimentaires, énergétiques ou minières.

le 09/02/2023 à 14:00
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Si les salaires compensent entièrement l'inflation la pompe du mouvement perpétuel est amorcée par les effets de deuxième tour. C'est un effet boule de neige.

le 09/02/2023 à 15:41
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Depuis qu'on vous a appris ça dans vos cours de macroeconomie deuxième année

le 11/02/2023 à 9:23
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L'inflation est toujours causée pas la spéculation, pas par une hypothétique augmentation des salaires qui n'a jamais été supérieure à l'inflation. L'idéologie de la boucle salariale inflationniste n'a aucune réalité dans l'histoire économique : c'es...

à écrit le 09/02/2023 à 13:00
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La BCE est par sa politique de libéralisation du crédit a outrance via les taux d’intérêts négatifs totalement responsable de la situation.En encourageant, ou a tout le moins en laissant faire la hausse des prix des actifs et notamment le plus sensib...

le 09/02/2023 à 14:10
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Je pense que l'erreur des banques centrales c'était de ne pas avoir suffisamment réglementer pour prévenir le crash de 2008. Une fois la crise venue, c'était trop tard et les banques centrales ont fait ce qu'elles ont pu pour tenir en vie l'économie;...

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