La Banque de France débloque le crédit immobilier en modifiant le calcul du taux d'usure

Sous la pression de Bercy, le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau a finalement accepté de procéder à un « ajustement technique » temporaire du taux d’usure en réactualisant ce dernier tous les mois et non plus chaque trimestre. L’idée est de permettre aux banques de remonter plus vite leur taux de crédit immobilier et de mieux s’ajuster aux conditions de refinancement. Les courtiers alertaient depuis des mois les pouvoirs publics sur les risques de blocage du marché immobilier.
Le ralentissement du marché du crédit immobilier qui s'accélère en fin d'année 2022 commence à inquiéter les pouvoirs publics.
Le ralentissement du marché du crédit immobilier qui s'accélère en fin d'année 2022 commence à inquiéter les pouvoirs publics. (Crédits : Reuters)

C'est un retournement spectaculaire après des mois de mobilisation et de lobbying des courtiers en crédit immobilier. Après avoir convaincu le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, des risques de blocage du marché du crédit immobilier, en raison d'une montée trop rapide des taux de marché, les professionnels du crédit immobilier ont obtenu aujourd'hui le feu vert de la Banque de France pour une réforme - temporaire - du taux d'usure. Ce dernier a été remonté au 1er janvier à 3,57% pour un crédit immobilier de plus de 20 ans.

Il ne s'agit pas de modifier le mode de calcul du taux d'usure mais de trouver les moyens techniques pour assurer, le temps que les taux de marché se stabilisent, une actualisation du taux d'usure chaque mois et non plus chaque trimestre. Ce qui permettrait aux banques de faire remonter leur taux de crédit plus vite, et d'ouvrir un peu plus le robinet de crédit.

Soutien de Bercy

Une idée qui a clairement reçu le soutien de Bercy, inquiet du ralentissement du marché observé depuis septembre, mais qui semble s'accélérer ces dernières semaines. « Le taux d'usure existe pour protéger l'emprunteur mais il ne doit pas être un outil de rationnement du crédit », résume une source proche de Bercy. Toutefois, ce n'est pas au ministre de l'Economie de décider de changer les règles mais bien au gouverneur de la Banque de France de le faire.

Longtemps fermement opposé à tout changement dans le mode de calcul de taux d'usure, le gouverneur François Villeroy de Galhau a sensiblement revu sa position, comme il l'a d'ailleurs confirmé lors de son audition annuelle aujourd'hui devant la Commission des finances du Sénat. « La loi dit que ce taux d'usure est fixé trimestriellement à 4/3 des taux observés dans le trimestre précédent. Il y a eu des pressions de la part de divers représentants des prêteurs pour faire remonter nettement plus vite le taux d'usure. Je ne crois pas que ce soit souhaitable : il faut une remontée progressive et ordonnée pour protéger les emprunteurs », a-t-il rappelé devant les sénateurs, sans se déjuger donc sur le fond de sa pensée. Mais, il a admis un simple « ajustement technique ».

Ajustement technique

Explications du gouverneur : « au lieu de faire cette hausse une fois en fin de trimestre avec une grosse marche... On ferait trois plus petites marches mois par mois en regardant les trois mois précédents à chaque fois. Cet ajustement technique peut être justifié s'il est souhaité par les professionnels du crédit que nous consulterons à cet égard ».

Pourtant, il y a encore quelques jours, la Banque de France expliquait que le marché du crédit immobilier se normalisait mais qu'il restait toujours dynamique. Elle expliquait aussi que la mise en place d'une mensualisation de la réévaluation du taux d'usure est complexe compte-tenu du nombre de données à remonter des banques en quasi temps réel, et ce pour des dossiers de crédit signés. La mensualisation reposera donc forcément sur des projections ou des barèmes commerciaux des banques, qui ne sont pas forcément des sources très fiables de la réalité du terrain.

Pourtant, ce nouveau dispositif doit être rapidement mis en place, sans doute pour le 1er mars prochain, le temps que les banques s'organisent pour faire remonter les données à la banque centrale. Reste à connaître les modalités techniques qui seront mises en œuvre par les réseaux bancaires et la Banque de France. C'est en tout cas une demi-victoire pour les courtiers immobiliers, dont le modèle d'affaires est certainement menacé par la hausse des taux (et l'effondrement des renégociations de prêts). Ils ont réussi à faire opérer un virage à 180 degrés à la fois à Bercy et à la Banque de France sur cette question du taux d'usure. Rendez-vous au prochain épisode...

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Commentaires 4
à écrit le 12/01/2023 à 12:05
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Et naturellement la révision du taux d'intérêt du livret A se fera aussi cordialement et aussi fréquemment? J'ai comme un doute.....

à écrit le 12/01/2023 à 1:56
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Avec la rénovation énergétique il n'y a jamais eu autant de vente de biens. La preuve les agences immobilieres fleurissent un peu partout. L'état se gave grave avec les taxes de mutation qui en découlent.

à écrit le 11/01/2023 à 23:59
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Pas assez riches ces courtiers et professionnels du bâtiment. Cela fait 24 ans qu'il gonflent la bulle l'Immobilière au détriment des gogos qui viennent leur emprunter de l'argent. Voir le spectre d'un crash immobilier venir casser leur business lucr...

à écrit le 11/01/2023 à 20:05
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Et oui plus de vente, Notaires en détresse et plus de taxes pour l'état, ballot.

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