La rémunération des patrons américains s'assagit

Les patrons américains se sont montrés plus raisonnables en matière de rémunération en 2011, selon une étude provisoire du cabinet Hay Group. Celle-ci n'a progressé que de 1,4% l'an passé après une hausse de 11% en 2010
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Au moment où les grandes banques mondiales semblent résolues à maîtriser l?inflation des bonus de leurs traders et des principaux dirigeants (même si quelques exceptions font encore grincer des dents), les grands patrons ont manifestement entendu différentes requêtes appelant cette même modération. Premier témoignage allant dans ce sens : Les résultats provisoires d?une étude réalisée par le cabinet américain de conseil en gestion Hay Group et relayée par le Wall Street Journal ce matin indiquent que la rémunération des grands patrons aux Etats-Unis a progressé de 1,4% en 2011, après avoir crû de 11% en 2010. Evolution d?autant plus symptomatique que pendant le même temps, l?activité et les profits de ces entreprises ont connu d?assez sensibles progressions.

Les grands patrons américains plus vertueux ?

Les grands patrons américains sont-ils devenus vertueux ? Ont-ils préféré jouer le long terme en prévision de jours moins porteurs ? La réalité est sans doute moins romanesque. Selon toute vraisemblance, les dirigeants des grandes entreprises subissent de plus en plus la pression de leurs actionnaires, pas forcément hostiles à de fortes rémunérations mais soucieux de les voir corrélées aux performances de celle-ci. Dans ce sens, le processus du « say on pay », donnant aux actionnaires un avis consultatif sur les émoluments des dirigeants se développe allègrement outre Atlantique.

Procédé qui commence à faire quelques émules aussi en France. De même, la Securities and Exchange Commission (SEC), le gendarme de la Bourse américaine n?est-elle pas étrangère à cette modération. Depuis un an, elle réclame en effet "plus de détails" sur la manière dont les sociétés rémunèrent leurs dirigeants. Ce que préconise également l?AMF, le gendarme boursier français dans son dernier rapport sur la gouvernance d?entreprise, celui-ci recommandant que toutes les conventions réglementées soient clairement stipulées et commentées par les administrateurs.

La rémunération médiane des patrons américains est de 9,4 millions de dollars en 2011.

L'étude partielle, réalisée par le cabinet de conseil en gestion Hay Group, se base pour l'instant sur 75 entreprises américaines, dont le bénéfice net a progressé de 17% en 2011.L'étude complète, qui concerne 300 entreprises, sera publiée un peu plus tard. D'après les premiers résultats, la rémunération médiane des patrons est de 9,4 millions de dollars en 2011, contre 9,3 millions de dollars. La rémunération du patron d'Apple, Tim Cook, est estimée à 378 millions de dollars en 2011. Celle du patron du groupe de médias Viacom, Philippe Dauman, est passée de 84,3 millions de dollars, à 42 millions de dollars l?an passé.

En France, très peu de dirigeants influencent la conception de leur propre rémunération

Plus près de nous, un article rédigé par Guillaume Garnotel, enseignant-chercheur à l?INSEEC Business School et Viviane Neiter, administratrice et présidente de comités spécialisés de sociétés cotées démontre, étude à l?appui auprès de 88 entreprises du SBF 120, réunissant les plus grandes entreprises Françaises après celles du CAC 40 sur la période de 2004 à 2009, que très peu de dirigeants influencent la conception de leur propre rémunération. Et ce, même s?ils sont majoritaires au sein de leur société, présidents du conseil d?administration ou en l?absence d?administrateurs indépendants.

«Sans doute, est-il possible de trouver çà et là des exemples dans l?actualité où la rémunération de certains dirigeants semble totalement déconnectée de la performance de l?entreprise et qu?à ce titre, ces dirigeants auraient exercé leur pouvoir d?influence sur les membres du conseil d?administration dans l?élaboration de leur propre rémunération. Si les résultats de cette étude montrent qu?en moyenne, les dirigeants n?exercent pas un rôle actif dans la conception de leur rémunération, le vaste sujet de la rémunération des dirigeants n?est toutefois pas épuisé.

« De quoi alimenter le débat éthico-financier pour de nombreuses années »

De nombreuses questions méritent toujours l?attention des spécialistes : jusqu?à quel point les écarts de rémunération entre les dirigeants et employés appartenant à des niveaux hiérarchiques inférieurs sont-ils légitimes ? La rémunération des dirigeants est-elle suffisamment liée à la performance de l?entreprise ? La rémunération des dirigeants doit-elle être majoritairement reliée à des objectifs de performance comptables et financiers ?« De quoi alimenter le débat éthico-financier pour de nombreuses années », soulignent les auteurs de l?article. Et lorsque l?on sait que cette question de la rémunération des dirigeants est l?un des thèmes principaux que comptent regarder les actionnaires lors des prochaines assemblées générales, on comprend mieux pourquoi de très nombreuses organisations et de non moins nombreux organes de régulation tentent de faire avancer le sujet vers un meilleur équilibre.
 

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