Les bruits de botte à la frontière de l'Ukraine font plonger les Bourses européennes à l'ouverture ce lundi matin. Déjà échaudés par les tensions inflationnistes persistantes et le resserrement de la politique monétaire américaine, les marchés actions ont décroché ce matin avec des reculs significatifs des principaux indices : le CAC 40 cède 3,5% en milieu de matinée, le DAX allemand 3,77% et l'indice Stoxx des 600 premières capitalisations européennes recule de 2,8%. Déjà, les places asiatiques avaient ouverte ce matin le bal de la baisse.
La Bourse de Moscou n'est pas en reste : l'indice RTS (libellé en dollars) chute de près de 5%, soit une perte de 12% depuis le début de l'année, alors même que la Russie devrait profiter des prix du brut au plus haut depuis sept ans. L'économie russe va mal et la dévaluation du rouble aggrave la paupérisation de la population.
Recul des rendements obligataires
Les Etats-Unis ont à nouveau alerté ce week-end sur le risque d'invasion de l'Ukraine par l'armée russe et les ministres des Finances du G7 ont assuré, ce lundi, être prêts à imposer rapidement des sanctions économiques et financières « aux conséquences massives et immédiates sur l'économie russe ». Le principal point de friction entre les pays occidentaux et la Russie concerne l'adhésion ou non de l'Ukraine à l'OTAN, alliance militaire de 30 pays créée en 1949 en pleine Guerre Froide.
Preuve de la grande nervosité des marchés, et d'une aversion au risque grandissante, les rendements obligataires sont clairement orientés à la baisse. Dans une « fuite à la qualité » (fly to quality), les investisseurs recherchent des obligations souveraines jugées sûres, comme le Bund Allemand à 10 ans ou le Bon du Trésor américain. Résultat, le mouvement de hausse des taux souverains a été brisé net et le Bund est repassé en territoire négatif et le 10 ans américain est revenu autour de 1,9% après avoir franchi le seuil des 2%. Pourtant, les anticipations des marchés restent ancrées sur une hausse plus rapide que prévu des taux directeurs de la Fédéral Réserve et même de la Banque centrale européenne malgré un discours qui se veut toujours rassurant. Il est vrai que l'inflation aux Etats-Unis a atteint un niveau jamais atteint depuis quarante ans, soit 7,5% en janvier, en rythme annuel.
Le secteur bancaire touché
Sur les marchés actions, les banques, qui viennent pourtant de publier d'excellents résultats 2021, ont été particulièrement chahutées sous le double effet d'une baisse des taux et des inquiétudes sur la croissance en période de crise aigüe. Ainsi, BNP Paribas recule de plus de 4,5% et Société Générale plus de 6,5%. Cette dernière pâtit aussi de son exposition à la Russie via sa filiale Rosbank, premier groupe bancaire étranger en Russie qui possède quelque 230 agences. Les Américains envisagent même la possibilité d'interdire le réseau interbancaire Swift de gros montants aux banques russes, ce qui aurait pour elles de graves conséquences (les banques russes ne pourraient plus fonctionner à l'international).
Les valeurs cycliques, qui avaient bénéficié d'une puissante rotation sectorielle en début d'année, marquent le pas, notamment celles liées au transport aérien et au tourisme. Air France KLM perd 5 % et le gestionnaire d'aéroports ADP près de 3%. De fait, une escalade du conflit pourrait provoquer une nouvelle flambée du prix des matières premières, alors que la Russie fournit 45% des besoins en gaz naturel de l'Europe (et 25% des besoins en pétrole). L'heure n'est pas vraiment de partir en vacances.
(Avec AFP et Reuters)
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