Le fondateur du groupe des télécoms Iliad (Free), Xavier Niel, et le banquier d'affaires Matthieu Pigasse, à la tête du bureau français de la banque américaine CenterView, ont annoncé le lancement d'une SPAC, la deuxième du genre en France, destinée à financer des acquisitions dans le monde de la production et de la distribution de biens responsables (alimentation, santé, hygiène, beauté).

Baptisée 2MX Organic, la SPAC (Special Purpose Acquisition Company) compte lever en Bourse 250 millions d'euros, avec une extension possible jusqu'à 300 millions d'euros. L'opération - qui devrait être ainsi la plus importante introduction de l'année et a reçu le feu vert de l'Autorité des marchés financiers (AMF) -, débute ce lundi pour se clôturer le 7 décembre. Les fondateurs détiendront au maximum 29,6% du capital de la structure cotée.

Une première acquisition dès 2021

Xavier Niel et Mathieu Pigasse avaient déjà créé une première SPAC en 2016, avec Pierre-Antoine Capton, dans le secteur de la production audiovisuelle, et levé à l'époque 250 millions d'euros. La structure a été ensuite dissoute, au début 2017, après l'acquisition d'AB production, pour donner naissance au groupe Mediawan, devenu depuis le numéro un européen du secteur après une série d'acquisitions.

Le tandem s'est associé cette fois-ci avec Moez-Alexandre Zouari, fondateur du groupe Zouari (Picard Surgelés, magasins franchisés du groupe Casino...) Les trois associés comptent profiter du bond de la demande des consommateurs pour le bio. Une première acquisition est prévue dès l'année prochaine, pour un montant significatif, entre 1,5 milliard et 2 milliards d'euros.

Xavier Niel et Matthieu Pigasse sont, pour l'instant, les seuls à promouvoir ce type de structure d'investissement cotée, qui rencontre pourtant un immense succès aux États-Unis. Outre-Atlantique, les SPAC ont ainsi déjà levé en Bourse, depuis le début de l'année, quelque 58 milliards de dollars.

Les avantages d'une structure atypique

De fait, les SPAC sont des animaux étranges à mi-chemin entre la Bourse et le private equity, dont l'usage reste encore très timide en Europe. Ces véhicules cotés, sans activité initiale, n'ont en effet pas d'autre raison d'être que de mener des opérations de croissance externe.

Principal avantage : « permettre à une entreprise de se faire coter sans passer par la procédure classique d'introduction en Bourse, particulièrement lourde aux États-Unis », soulignent Pascal Quiry et Yann Le Fur, dans la dernière édition de la lettre Vernimmen.

En clair, la seule fonction d'une SPAC est de trouver des fonds sur la seule foi de la crédibilité de son management. Pour les investisseurs, il s'agit donc d'un pari sur une personne ou une équipe, une sorte de « chèque en blanc », basé sur la confiance. Environ un quart des SPAC sont liquidés au bout de deux ans, la durée généralement nécessaire pour réaliser la première opération.

Un concept proche du « search fund »

La force de frappe de Xavier Niel et le savoir-faire en fusions et acquisitions de Mathieu Pigasse servent ainsi de rampe de lancement, à laquelle est associée une expertise reconnue dans un domaine d'activité, comme l'audiovisuel (Pierre-Antoine Capton) ou la distribution (Moez-Alexandre Zouari). Le succès du projet Mediawan devrait conforter le nouveau projet auprès des investisseurs.

La SPAC n'est pas très éloignée dans son principe des fonds LBO (mais qui mutualisent les risques sur plusieurs projets) et des « search funds », qui se développent depuis une vingtaine d'année, aux États-Unis et, plus récemment, en France.

Ces fonds identifient un manager de qualité qui cherche lui-même à reprendre une société. Le fonds lui donne alors les moyens de ses ambitions et le manager est co-investisseur. Toutefois, les « search funds » opèrent sur des opérations de petite taille (moins de 50 millions de dollars) alors que la SPAC peut s'attaquer à des projets nettement plus importants.