La Banque Postale repousse et peaufine son offre mobile

La filiale de la Poste prépare le lancement de sa propre banque mobile l’an prochain, ciblant les moins de 35 ans urbains et connectés. Un projet qui a pris du retard mais à l’objectif ambitieux : plus d'un million de clients d’ici à 2025, dans un paysage en plein bouleversement, avec Compte Nickel et Orange Bank.
Delphine Cuny
La filiale de la Poste avait annoncé en février dernier son projet d'une offre "mobile first" pour 2017 : ce sera finalement pour l'an prochain, soit après l'arrivée d'Orange Bank.

Tout le monde s'y met ou presque : la banque mobile, c'est l'avenir de la banque, aux yeux de nombreux professionnels du secteur, qui voient les usages de consultation et d'opérations sur smartphone grimper en flèche, pendant que la fréquentation des agences chute. La Banque Postale prépare le lancement de sa propre banque mobile pour l'an prochain, entre mai et septembre 2018, selon un document interne cité par nos confrères des Echos. Le public visé serait « les moins de 35 ans, urbains, actifs et connectés ». Pas tout à fait le cœur de clientèle de la filiale à 100% de la Poste, qui compte plus de 10,8 millions de clients particuliers actifs.

Le projet avait été évoqué il y a un an et a en fait pris du retard : la Banque Postale avait annoncé en février dernier le lancement d'une offre bancaire « mobile first » début 2017, sous une marque distincte, pour rompre avec l'image un peu poussiéreuse du bon vieux compte chèque postal et du mandat.

« Nous visons une clientèle la plus large possible et les jeunes. Nous en attendons beaucoup », avait alors déclaré le président du directoire, Rémy Weber.

Il devrait en dire un peu plus lundi prochain lors de la présentation des résultats annuels. Projet somme toute logique, pour l'entreprise publique, dans la continuité de La Poste Mobile, un opérateur virtuel utilisant le réseau de SFR, qui existe depuis plus de cinq ans.

L'arrivée imminente d'Orange Bank, « dans quelques semaines », l'a peut-être conduit à repousser le lancement de sa propre banque mobile, qui se ferait finalement sans recours à un partenaire (la filiale de la Poste avait même un temps discuté avec l'ex-France Télécom). Piloté par une ancienne d'Orange, Alice Holzman, responsable du numérique et de la communication à la Banque Postale, ce projet ressemble fort à celui de l'opérateur télécoms : une banque du quotidien sur mobile, facilitant le paiement entre particuliers et la gestion de son budget.

« Ce compte simple sera un compte pour tous et une première banque pour les jeunes», avait décrit l'an dernier Alice Holzman.

Entre Orange Bank et Compte Nickel

La banque pour tous, c'est un créneau sur lequel le nouvel entrant Compte Nickel a réalisé une sacrée percée : en trois ans, le « compte sans banque » gérable depuis une application mobile, qui s'ouvre en quelques minutes chez un buraliste pour 20 euros par an, a séduit un peu plus de 500.000 Français et devrait atteindre le million dans un an. La "néobanque" aurait « pris beaucoup de clients à la Banque Postale » selon une source bien informée du secteur et a aussi lancé une offre pour les 12-18 ans. La Financière des Paiements Électroniques à l'origine de Compte Nickel est venue chatouiller la Banque Postale sur son terrain de l'inclusion bancaire : la filiale de la Poste est en effet « la seule banque française à s'être vu reconnaître la mission d'accessibilité bancaire par la loi » comme elle le rappelle elle-même.

Avec son compte sans possibilité de découvert, au solde consultable en temps réel sur smartphone, Compte Nickel a répondu à un besoin qui n'était visiblement pas couvert par les grandes banques de réseaux, y compris la filiale de la Poste, qui s'engage à une « politique tarifaire raisonnable » mais ne ressort pas comme la moins chère, le titre revenant à Boursorama, devant d'autres banques en ligne. Face à ces nouvelles concurrences, la Banque Postale va devoir se hâter dans un paysage bancaire qui évolue rapidement et trouver un positionnement différenciant entre une Orange Bank surfant sur l'image geek et connectée de l'opérateur et le Compte Nickel low-cost, ainsi qu'une pléiade d'autres néobanques ambitieuses comme la banque mobile allemande N26 qui revendique déjà plus de 30.000 clients en France.

Clientèle stratégique

« Les utilisateurs des services en ligne de La Banque Postale représentent une clientèle stratégique » indique d'ailleurs la filiale de la Poste dans son document de référence. Stratégique à l'heure de l'effondrement de la fréquentation des bureaux de poste qui limite considérablement ses opportunités de conquête commerciale, stratégique parce que ce profil est davantage susceptible de changer de banque et parce qu'il lui faut rajeunir sa base de clientèle, même si plus de 1,2 million de jeunes sont « bancarisés principaux » à la Banque Postale.

Créée il y a dix ans, la banque publique héritière des services financiers de la Poste n'est pas complètement hors du coup lorsqu'il s'agit du mobile et du numérique : elle a évidemment ses applis pour smartphone et tablette, elle possède même son courtier en ligne, Easy Bourse, et elle a son « agence bancaire 100 % à distance » baptisée « La Banque Postale Chez Soi » : LBPCS n'est pas une banque en ligne proprement dite comme Boursorama, filiale autonome de la Société Générale, mais « un nouveau canal de relation », à l'image d'Hello Bank! chez BNP. A fin 2015, cette offre avait séduit près de 100.000 clients, qui peuvent se rendre au bureau de poste pour des opérations en espèces mais ne bénéficient pas de tarifs moins chers : les avantages mis en avant sont les horaires élargis (même si ces derniers le sont déjà dans les bureaux des villes) et « une forte expertise des conseillers », par rapport aux postiers multitâches.

La Banque Postale aurait pour objectif de conquérir « un peu plus d'un million de clients d'ici à 2025 » avec sa banque mobile, un objectif qui semble très ambitieux. Boursorama a mis plus de dix ans à dépasser ce cap, tandis qu'Orange Bank vise les 2 millions « à terme », dans dix ans. Comme l'opérateur télécoms, la filiale de la Poste pourrait mettre en avant l'imbattable maillage de son réseau de distribution  - plus de 9.000 bureaux de poste - pour les clients qui apprécient le côté rassurant d'un conseiller en chair et en os en cas de besoin, y compris les plus jeunes selon les dernières études sur le sujet.

Delphine Cuny

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Commentaires 2
à écrit le 15/02/2017 à 8:51
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Étant client de la banque postale a lyon 4ème depuis 20 ans et constatant qu'une depreciation de la relation client d'année en année, 4 points de contacts différents entre un conseiller financier absent , un conseiller pretimmobilier pas coordonne av...

à écrit le 14/02/2017 à 19:36
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Et les synergies "industrielles", les économies d'échelle ? On n'en parle pas ? Parce que sinon, une industrie automobile implantée au Pays-Basque pourrait aussi bien se lancer dans le jambon de Bayonne : avec quelques véhicules mis à disposition pou...

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