Bruxelles bouscule Lufthansa avec une enquête sur son rachat d'ITA Airways

Le rachat de la compagnie nationale italienne « pourrait réduire la concurrence (...) pour plusieurs liaisons court-courriers et long-courriers » à destination et au départ de l'Italie, explique la Commission européenne pour justifier l'ouverture de son enquête. De son côté, Lufthansa reste confiante quant à l'issue de cette procédure.
En réponse à l'enquête ouverte par la Commission, la compagnie aérienne allemande affirme ce mardi que son entrée au capital de ITA aura « globalement un effet positif » sur la concurrence en Italie et en Europe.
En réponse à l'enquête ouverte par la Commission, la compagnie aérienne allemande affirme ce mardi que son entrée au capital de ITA aura « globalement un effet positif » sur la concurrence en Italie et en Europe. (Crédits : MICHAELA REHLE)

En matière de règles de concurrence, la Commission européenne veille au grain et n'hésite pas à investiguer s'il le faut. Nouvelle illustration ce mardi avec l'annonce de l'ouverture d'une « enquête approfondie » sur le projet de rachat de la compagnie aérienne italienne ITA Airways (successeur d'Alitalia) par le groupe allemand Lufthansa, actuellement premier transporteur aérien européen.

« L'opération pourrait réduire la concurrence (...) pour plusieurs liaisons court-courriers et long-courriers » à destination et au départ de l'Italie, a ainsi estimé « à titre préliminaire » la Commission européenne, dans un communiqué. Les réserves de Bruxelles concernent en particulier des liaisons entre l'Italie et des pays d'Europe centrale sur lesquelles il y aurait trop peu de concurrence.

En réponse à cette annonce, Lufthansa s'est dit mardi fermement convaincue que la transaction serait autorisée à l'issue de l'enquête. Le groupe a souligné qu'il allait « continuer à travailler étroitement et de manière constructive avec la Commission » en vue d'une conclusion rapide de l'examen en cours. La compagnie aérienne allemande affirme que son entrée au capital de ITA aura « globalement un effet positif » sur la concurrence en Italie et en Europe.

Lufthansa n'a pas encore convaincu Bruxelles

Dans le détail de la procédure, l'opération d'acquisition portée par Lufthansa avait été notifiée à la Commission européenne, gardienne de la concurrence dans l'UE, le 30 novembre dernier. « Le 8 janvier 2024, Lufthansa a présenté des engagements visant à remédier à certains problèmes » mais ils « ne suffisaient toutefois pas (...) à dissiper clairement les craintes exprimées », explique à ce sujet la Commission.

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Celle-ci dispose désormais d'un délai de 90 jours ouvrables, soit jusqu'au 6 juin 2024, pour trancher. « L'ouverture d'une enquête approfondie ne préjuge pas de l'issue de la procédure », rappelle la Commission, qui aura la possibilité d'interdire la transaction ou bien de l'autoriser si elle estime que des garanties suffisantes sont apportées.

Une acquisition stratégique pour la compagnie allemande

Pour rappel, en octobre 2021, Alitalia s'était éteinte pour laisser place à ITA Airways, dans un marché aérien qui peinait à se relever des turbulences de la pandémie de coronavirus. Placée sous administration publique en 2017, Alitalia avait cumulé des pertes de 11,4 milliards d'euros entre 2000 et 2020.

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Bruxelles avait à cette époque donné son feu vert au décollage de la nouvelle compagnie et avait autorisé un nouveau financement public de 1,35 milliard d'euros, à condition que ITA finisse par voler à terme de ses propres ailes. L'entreprise restructurée avait débuté avec une flotte réduite de moitié.

Mais en mai 2023, Lufthansa avait voulu être de la partie en signant un accord d'entrée au capital de la compagnie publique italienne, ce qui inquiète la Commission européenne. Car la compagnie nationale allemande compte acquérir dans un premier temps une part minoritaire de 41% de ITA, se réservant l'option de monter à 100% du capital à moyen terme. Cette acquisition pour 325 millions d'euros se ferait par le biais d'une augmentation de capital, tandis que l'Etat italien injecterait de son côté 250 millions d'euros afin de renforcer le capital d'ITA Airways, selon les termes de l'accord. En terme stratégique, le rachat d'ITA airways par Lufthansa doit permettre au géant allemand d'élargir son accès au marché italien, le troisième plus grand au sein de l'UE. Il apporterait aussi à ITA un actionnaire solide.

Pas les premiers ennuis de Lufthansa avec les instances européennes

Ce n'est pas la première fois que la compagnie allemande est confrontée aux autorités de contrôle bruxelloises. En mai de l'année dernière, le Tribunal de première instance de l'Union européenne a annulé deux vastes plans de recapitalisation de Lufthansa par l'Etat allemand. Celui-ci s'élevait à 6 milliards d'euros et avait pourtant été approuvé en 2020 par la Commission européenne.

Pour justifier sa décision, le tribunal européen avait expliqué dans un communiqué que la Commission « a commis plusieurs erreurs » en considérant que la compagnie allemande « était dans l'incapacité de se financer sur les marchés » pour combler ses besoins. Pour rappel, les fortes restrictions sur le secteur aérien pendant la pandémie de Covid-19 avaient presque paralysé les activités de Lufthansa, la plaçant au bord du gouffre. Une circonstance particulière qui n'a pas influencé les juges européens dans leur décision.

Cette mise au point de la justice européenne n'a pas eu de grandes conséquences sur Lufthansa. La balle est en effet dans le camp de la Commission européenne, qui peut faire appel ou répondre aux exigences du tribunal. Mais depuis mai 2023, il ne s'est rien passé. Lufthansa a de surcroît déjà remboursé la totalité de ses aides d'Etat.

(Avec AFP)

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Commentaire 1
à écrit le 24/01/2024 à 13:31
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Le feuilleton continue. Les séries TV, à côté, c'est de la gnognotte. Des années, des décennies que la compagnie italienne remplit... les journaux !

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