Aviation régionale : le marché chinois s'ouvre enfin à ATR

Six ans après la première demande d'ATR, les autorités de l’aviation civile chinoises ont validé la certification de l'appareil ATR 42-600 du leader mondial de l'aviation régionale. Le constructeur franco-italien s'ouvre le très vaste marché chinois.
Michel Cabirol
Dans sa dernière prévision de marché (2022/2041), ATR prévoit en Chine une demande de 280 turbopropulseurs neufs d'ici à 20 ans, à la fois des 50 places (105 exemplaires) et des 70 places (175). Soit une hausse du trafic régional de 6,9 %.

« A qui sait attendre, le temps ouvre ses portes ». Un proverbe chinois qui illustre parfaitement ce qu'a enduré ATR en Chine durant six ans environ. Le constructeur de turbopropulseurs ATR a attendu six ans pour obtenir la certification de l'ATR 42-600 en Chine. Il avait déposé une demande de certification pour la première fois en 2016. Cette étape clé permet à l'avionneur franco-italien (50/50 entre Airbus et Leonardo) d'entrer à nouveau sur le marché chinois avec une commande ferme de la part d'un client non dévoilé pour trois appareils. ATR avait déjà obtenu la certification pour la gamme des ATR 72 et 42-500.

« Recevoir la validation du certificat de type de l'ATR 42-600 de la part de la CAAC, ainsi qu'une commande ferme, sont deux réussites majeures qui marquent le retour des turbopropulseurs ATR en Chine. L'ATR 42-600 va véritablement changer la donne », a souligné la nouvelle présidente exécutive d'ATR, Nathalie Tarnaud Laude, citée dans le communiqué publié mardi.

Une certification au long cours

Pour ATR, c'est l'éloge de la patience mais aussi de la persévérance. En septembre 2017, l'avionneur franco-italien (50/50 entre Airbus et Leonardo), avait signé deux lettres d'intentions avec Shaanxi Tianju Investment Group (dix ATR 42-600) et Xuzhou Hantong Airlines Co (trois ATR 42-600), qui n'ont jusqu'ici jamais été converties en commandes fermes. « Les clients, qui ont signé des intentions d'engagement, souhaitent toujours prendre nos avions », avait expliqué en février dans une interview accordée à La Tribune l'ancien PDG d'ATR Stefano Bortoli. ATR avait en outre dans ses cartons d'autres accords confidentiels avec des compagnies chinoises.

Les signatures de ces deux lettres d'intention avaient permis aux autorités chinoises, et plus précisément à la CAAC (Administration de l'aviation civile de Chine), de lancer le processus de certification de l'ATR 42-600. Sans commande, la Chine ne voulait pas le lancer. « Tant que nous n'aurons pas une compagnie souhaitant notre avion, les autorités chinoises ne voudront pas travailler sur sa certification », avait d'ailleurs affirmé en 2016 dans une interview accordée à La Tribune, Patrick de Castelbajac, un des prédécesseurs de Nathalie Tarnaud Laude. Pour autant, ATR ne s'attendait pas à une telle course d'obstacles : « Les premiers avions devraient être livrés dès que possible en 2018 », avait d'ailleurs indiqué ATR dans un communiqué daté en juin 2017.

« Les méandres chinois pour obtenir la certification de la version ATR 600 sont frustrants et éprouvants », avait soupiré en juin 2018 le prédécesseur de Stefano Bortoli, Christian Scherer dans une interview accordée à La Tribune.

C'était aussi sans compter sur les nombreux ralentissements qui ont parasité ce processus. A commencer par la très difficile négociation entre la CAAC et l'EASA (Agence européenne de la sécurité aérienne) sur un accord de reconnaissance mutuelle des certifications aéronautiques dans le cadre du projet de partenariat UE-Chine dans le domaine de la sécurité de l'aviation. L'Europe et la Chine se livraient une guerre sur la certification des matériels aéronautiques, qui prenait en otage le constructeur basé à Toulouse. « La Chine reste une nouvelle frontière à percer pour ATR », avait alors rappelé l'ex-patron d'ATR, Christian Scherer.

Un marché très prometteur pour ATR

Pour ATR, ses appareils devraient se révéler être très pertinents pour le marché chinois. « Il existe un réel intérêt des compagnies chinoises pour nos avions », avait confirmé en février Stefano Bortoli. Son prédécesseur Christian Scherer lorgnait lui aussi sur ce gisement : « La Chine est un pays tellement vaste, avec un potentiel énorme ». Pour Nathalie Tarnaud Laude, ce marché pourrait enfin devenir concrètement un jackpot en termes de prises de commandes. ATR devra peut être investir dans une infrastructure de support destinées aux compagnies chinoises (training, pièces de rechange, qualification d'un ou de plusieurs opérateurs qui pourraient faire l'entretien des avions sur place).

Dans sa dernière prévision de marché (2022/2041), ATR prévoit en Chine une demande de 280 turbopropulseurs neufs d'ici à 20 ans, à la fois des 50 places (105 exemplaires) et des 70 places (175). Soit une hausse du trafic régional de 6,9 %. Le constructeur prévoit également des besoins pour le marché de l'aviation générale (30 places) pour lequel il est aussi très bien placé avec l'ATR 42. Un potentiel confirmé par les chiffres de marché : la flotte régionale dans le monde représente 25 % de la flotte mondiale d'avions commerciaux. En Chine, c'est seulement 2,85%.

En outre, ATR anticipe la construction de plus de 150 aéroports supplémentaires en Chine. « Les turbopropulseurs joueront un rôle-clé pour créer un nouveau réseau de liaisons court-courrier à faible flux de passagers, complétant ainsi l'offre de train à grande vitesse », a expliqué dans le communiqué le directeur commercial d'ATR Fabrice Vautier. Il existe un besoin important en matière de connectivité régionale en Chine, où la grande majorité du trafic aérien est concentrée sur une poignée d'aéroports.

Selon Fabrice Vautier, ATR est « idéalement placé pour répondre à cette demande, tout en contribuant à réduire la dépendance envers les subventions publiques et en offrant des émissions de CO2 réduites ». Pour ATR, l'ATR 42-600 semble être l'appareil idéal pour ouvrir de nouvelles routes en Chine, un vaste pays qui cherche à développer des connexions essentielles. Dans ce contexte, l'avionneur espère capter « une part significative de ce marché, en tant que leader » du marché de l'avion régionale.

Michel Cabirol

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Commentaire 1
à écrit le 08/11/2022 à 23:31
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C'est l'ATR 72 qui compte. Encore six ans pour cela?

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