Après le missile tactique franco-allemand MAST-F destiné à armer les hélicoptères Tigre allemands et français, Berlin a semble-t-il définitivement torpillé un deuxième programme en coopération entre la la France et l'Allemagne pourtant validé en juillet 2017 par la Chancelière Angela Merkel et Emmanuel Macron. "Paroles, paroles, paroles, encore des mots, toujours des mots, les mêmes mots" (Dalida)... Retour à la triste réalité : lors de la session du 23 juin, le Bundestag a approuvé l'acquisition pour 1,43 milliard d'euros de cinq avions P-8A Poseidon en tant que "solution provisoire" de remplacement de ses vieux P-3C Orion.
Bien sûr, personne ne croit à Paris à la mention "solution provisoire" même si Berlin estime qu'un système d'armes aéroportées maritimes (MAWS) doit être développé avec la France sur le long terme. Le département d'État américain avait pris soin d'expliquer que "la vente proposée permettra à l'Allemagne de moderniser et de maintenir sa capacité d'aéronefs de surveillance maritime (MSA) au cours des 30 prochaines années".
"En 2017, le président Emmanuel Macron et la chancelière allemande Angela Merkel se sont engagés sur plusieurs programmes de coopération, dont le MAWS, qui vise à remplacer nos Atlantique 2, système stratégique qui nous permet d'assurer la crédibilité de notre dissuasion et la protection de nos espaces maritimes, à l'horizon 2035", avait expliqué la ministre des Armées, Florence Parly dans une interview accordée le 14 mai à La Tribune.
Berlin a caché la copie
Le gouvernement américain avait approuvé l'achat de ces cinq avions entièrement équipés en mars à la très grande surprise de la France, qui n'avait pas été avertie par son partenaire allemand. Ce qui avait beaucoup énervé à Paris. Lors de cette interview, Florence Parly expliquait d'ailleurs que Paris avait "récemment découvert que le Congrès américain s'apprêtait à donner une autorisation de FMS pour des avions de patrouille maritime P8, qui ne peuvent pas être, de notre point de vue, un gapfiller dans l'attente du MAWS". Elle avait alors précisé que "nous allons rapidement clarifier ce sujet avec l'Allemagne". "Dès lors que c'est un projet de coopération, cela doit le rester parce que c'est un engagement fort qui a été pris il y a quatre ans", avait affirmé mi-mai Florence Parly.
La réponse de Berlin est désormais claire, très claire avec le vote du Bundestag. Contacté par La Tribune, le ministère des Armées a répondu ce mardi qu'il était "en train de voir quelle sont les suites à donner à ce projet de coopération. Il est cependant évident que ce n'est pas un bon signal. Une décision viendra dans les prochaines semaines".
Le solo de l'Allemagne
Pourtant la France avait proposé une solution de transition pour les forces armées allemandes, pour ne pas compromettre ce programme franco-allemand. Paris proposait à Berlin d'utiliser les Atlantique 2 rénovés, "qui sont ce qu'on peut faire de mieux en termes de capteurs, de senseurs et de moyens électroniques permettant d'assurer une surveillance efficace", avait souligné la ministre des Armées. La France n'a pas eu de réponse non plus. "Nous avons légitimement pensé que cette proposition était intéressante et, qui plus est, s'inscrivait dans une démarche cohérente dans laquelle nous sommes déjà engagés avec les Allemands avec le C-130, dans le cadre de l'escadron franco-allemand de C-130 à Evreux", avait-elle précisé.
Il est donc loin le temps où l'Allemagne et la France, en juillet 2017 à l'Élysée, avaient convenu de chercher "une solution européenne" en matière de système de patrouille maritime "afin de remplacer leurs capacités actuelles respectives". Une feuille de route commune devait être mise au point en 2018. Le programme MAWS était destiné à remplacer les Atlantique 2 à l'horizon 2035 et les P-3C Orion allemands. Il est tombé à l'eau par la faute de l'Allemagne.
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