Redressement de Zodiac  : sans surprise, ça va être sportif pour Safran

Trois mois après la prise de contrôle de Zodiac par Safran, Philippe Petitcolin, le directeur général de Safran, estime qu'il faudra "entre 12 et 18 mois" pour résoudre les problèmes de Zodiac. Si le chantier s'annonce difficile, la performance industrielle s'améliore néanmoins, et les clients commencent à revenir discuter.
Fabrice Gliszczynski
Philippe Petitcolin, directeur général de Safran.
Philippe Petitcolin, directeur général de Safran. (Crédits : DR)

"Philippe Petitcolin a maintes fois démontré qu'il excellait dans le redressement d'activités bancales", fait remarquer un bon observateur de l'industrie aéronautique, peu étonné par l'implication personnelle du directeur général de Safran dans l'intégration de Zodiac Aerospace, racheté en février dernier.

Philippe Petitcolin le reconnaît bien volontiers : le redressement de l'équipementier aéronautique, et plus précisément de l'activité cabine et sièges d'avions, en difficulté depuis trois ans, est, comme il s'y attendait, chronophage.

"Zodiac me prend du temps, c'était prévu (...) Personnellement, j'y vais plusieurs fois par semaine [dans les locaux ou sites de Zodiac, Ndlr], pour essayer d'améliorer très vite la performance et de gagner au niveau des synergies. J'essaye d'avoir des chiffres tous les 15 jours. C'est du boulot", a-t-il indiqué ce mercredi devant les journalistes de l'Association des journalistes professionnels de l'aéronautique et de l'espace (AJPAE).

Objectifs ambitieux

Vu l'ampleur de la tâche, le marathon ne fait que commencer. Pour rappel, Zodiac a connu une crise industrielle majeure il y a trois ans, qui s'est traduite non seulement par des gros retards des livraisons de sièges et autres équipements de cabine d'avion, mais aussi par des problèmes de qualité.

Des mesures d'amélioration ont été prises depuis pour éviter la descente aux enfers, mais, "vu l'état dans lequel on est (sic) aujourd'hui, vu la rentabilité dégagée par Zodiac au premier semestre, clos fin février (de 1,5%)", il va falloir cravacher pour réaliser d'ici à trois ans les 200 d'euros millions d'euros de synergies promis aux actionnaires et pour dégager dans le même temps une rentabilité supérieure à 10%, comme Zodiac l'a fait dans le passé, et comme le font aisément les activités "propulsion" de Safran (plus de 15%) mais aussi "équipements" (+12,5%).

"A court terme, il y a beaucoup d'efforts à faire dans le domaine fonctionnel, organisationnel ou opérationnel pour pouvoir arriver au niveau demandé par nos clients, lequel est un niveau standard tout à fait normal pour l'industrie", a expliqué Philippe Petitcolin.

12 à 18 mois pour régler tous les problèmes

Selon lui, le temps « d'écluser tous les projets qui ont été lancés dans des conditions qui ne sont pas optimales » (...), il faudra « 12 à 18 mois pour régler tous les problèmes ». Zodiac ne travaille pas sur des programmes, mais sur des projets parallèles (en fonction des demandes des compagnies aériennes) qui se situent à des états d'avancement différents, et qui, pour la quasi-totalité d'entre eux, sont en retard.

Pour redresser "cette partie de Zodiac qui n'était pas au niveau de l'état de l'art", Safran "sait ce qu'il faut faire" et infuse "ses processus, ses règles, ses méthodes", notamment dans la phase d'ingéniering. C'est en effet dans cette phase de développement que le décalage avec ses méthodes est le plus grand et que le potentiel d'amélioration est le plus élevé.

La performance s'améliore et les clients reviennent discuter

Si le redressement s'annonce long et difficile, Philippe Petitcolin perçoit néanmoins une amélioration.

« Semaine après semaine, nous améliorons la performance, tant en termes de délais de livraison qu'en termes de qualité », a-t-il assuré. « Nous ne sentons plus du tout la même agressivité de nos clients à propos de la performance de Zodiac », a-t-il ajouté.

Les compagnies aériennes reviennent discuter, même celles qui, échaudées par les retards de livraisons ou les problèmes de qualité, « ne parlaient plus avec Zodiac ». Philippe Petitcolin justifie ce regain d'intérêt par la qualité des produits de Zodiac qu'il estime supérieure à celle de à la concurrence, notamment dans le "design" qualifié d'"exceptionnel".

Book-to-bill supérieur à 1

Pour autant, reconnaît-il, il faudra du temps pour transformer ces discussions sur de nouveaux projets en autant de commandes fermes. Et si Zodiac recommence à engranger un peu plus de commandes que de livraisons, avec un book-to-bill qui est légèrement supérieur à 1 (ratio entre les commandes et les livraisons) depuis trois mois, « nous ne sommes pas encore à un taux qui traduirait un retour des clients ».

Le travail de redressement de Zodiac est si prenant pour Philippe Petitcolin qu'il ne lui laisse pas de temps pour penser à une éventuelle acquisition significative. Interrogé pour savoir si l'idée d'un rapprochement avec Thales était dans un coin de sa tête, il a répondu par la négative.

"Pas à ce jour. Ce que j'ai dans la tête, c'est de réussir Zodiac. Avant de pouvoir envisager toute autre forme de changement de périmètre important du groupe, il faut déjà savoir réaliser ce qu'on a engagé. Zodiac, c'est loin d'être une petite affaire", a-t-il dit.

La question restera posée une fois le redressement de Zodiac terminé.

Fabrice Gliszczynski

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Commentaires 3
à écrit le 01/06/2018 à 17:09
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" je ne m'en fais pas pour cette boite" Sauf que vous n'avez pas bossé dans cette boite pour écrire cela. L'inorganisation est telle que chaque service est un bastion imprenable. Et si je vous parlais des Achats, vous n'en reviendriez pas...

le 02/06/2018 à 10:55
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comme dans beaucoup d'endroits aujourd'hui.

à écrit le 31/05/2018 à 9:12
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Moi avec un patron comme ça (que je ne connais pas du tout, pour les paranos de service... ) je ne m'en fais pas pour cette boite.

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