Neuf milliards d'euros... C'est le montant des investissements (hors spatial militaire, selon le CNES : 4,3 milliards d'euros dans l'actuelle loi de programmation militaire) que la France va réaliser dans le spatial dans les trois prochaines années, a révélé dimanche la Première ministre lors de la cérémonie d'ouverture du 73ème Congrès International d'Astronautique (IAC). « Au total, ce sont plus de 9 milliards d'euros que la France s'apprête à investir sur le secteur spatial dans les trois prochaines années, pour la recherche et notre industrie spatiale », a claironné Élisabeth Borne au Paris Convention Centre à la Porte de Versailles à Paris
Mais à y regarder de plus près, trois milliards par an en moyenne est un montant qui ne reflète pas réellement les ambitions qu'exigent tous les nouveaux enjeux liés au spatial (climatique, numérique, sécuritaire et scientifique) même si au CNES, on se félicite des annonces financières de la Première ministre. « La trajectoire financière annoncée par Élisabeth Borne est en croissance et va nous permettre de bien préparer les enjeux de la conférence ministérielle de l'ESA (Agence spatiale européenne, ndlr) », assure-t-on au sein du Centre national d'études spatiales. Dans un communiqué publié dimanche, le CNES indique que la trajectoire financière annoncée par Élisabeth Borne, "représente par rapport à la triennale précédente une augmentation de 24% de l'investissement".
ESA : la France va-t-elle décrocher ?
En 2022, le budget du CNES s'élève à 2,56 milliards d'euros, dont 1,18 milliard pour la contribution à l'Agence spatiale européenne (ESA). La Première ministre a également évoqué le plan France 2030, qui prévoit 1,5 milliard d'euros pour le spatial. Si la France a l'ambition d'atteindre les « trois premières ambitions » (autonomie d'accès à l'espace, constellations, climat) évoquée par la Première ministre, « nous avons besoin de moyens forts et d'une recherche de pointe », a-t-elle avancé. Le budget sera certes en croissance ces prochaines années comme le souligne le CNES mais les montants annoncés par Élisabeth Borne dénotent pourtant un manque d'ambitions de la France dans le spatial alors qu'elle est la nation pionnière dans le spatial en Europe. Pourtant, le diagnostic de la Première ministre sur les enjeux liés au spatial est le bon :
« Nous vivons une période de bouleversements majeurs, a expliqué Élisabeth Borne. Je pense aux bascules géopolitiques, bien sûr, mais aussi aux lames de fond que sont les changements climatiques et numériques. Et pour les surmonter, l'espace sera crucial ».
La conférence ministérielle des États membres de l'ESA en novembre déterminera en partie la place que la France souhaite jouer dans le spatial européen. La Première ministre a prévu fin octobre une réunion avec toutes « les parties prenantes du secteur pour partager nos priorités et nos leviers de financements ». Selon les premières fuites qui circulent, elles indiquent que la France devrait légèrement augmenter sa participation alors que l'Allemagne et l'Italie vont quant à elle accélérer au moment où le directeur général de l'ESA Josef Aschbacher demande une hausse de 30% du budget de l'ESA (18,7 milliards d'euros).
La France va-t-elle décrocher par rapport à l'Allemagne et l'Italie et rejoindre l'orbite des nations de complément ? C'est la crainte de beaucoup d'acteurs industriels interrogés par La Tribune après les premières réunions de préparation de la conférence ministérielle de l'ESA. « On va mesurer l'influence française à la conférence de l'ESA à l'aune du budget français, estime-t-on au CNES. Mais ce n'est pas le bon indicateur. Le bon indicateur est le budget total investi par la France dans le domaine spatial ». Mais est-ce que la France serait en train de revoir sa stratégie au sein de l'ESA ? Ce serait majeur.
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