Carlos Tavares s'est-il définitivement converti aux watts ? Le patron de Stellantis, le groupe issu de la fusion entre PSA et Fiat Chrysler, a annoncé de fortes ambitions dans la voiture électrique. Dans son plan stratégique annoncé le 1er mars dernier, il a promis de vendre 100% de voitures électriques en 2030 en Europe... Pour rappel, il avait annoncé, il y a tout juste un an, 70% de voitures électrifiées (hybrides compris) sur le Vieux Continent sur ce même horizon. En quelques mois, il a changé son fusil d'épaule.
Des voitures dédiées, des marques transformées...
Il lancera pas moins de 75 modèles roulant sans moteur thermique d'aucune sorte d'ici 2030. Et plusieurs marques seront totalement électriques comme Opel, Alfa Romeo ou DS, que ce soit en Europe ou ailleurs. L'enveloppe allouée à cette électrification à marche forcée est conséquente : 30 milliards d'euros. Une somme colossale pour cet adepte de la « frugalité » (sic), son expression favorite pour décrire son impitoyable chasse aux coûts.
Pour autant, Carlos Tavares n'a pas toujours été le plus grand défenseur de la voiture électrique... Au contraire, il a même été l'un de ses plus grands contempteurs. Arrivée chez PSA en juin 2014, la voiture électrique ne figurera pas au menu de ses réformes internes... C'est tout juste s'il finit par se lancer dans la technologie hybride. C'est l'affaire des moteurs truqués qui va accélérer le resserrement réglementaire CO2, et le contraindre à lancer des voitures 100% électriques.
Les autorités ont renoncé à la "neutralité technologique"
Cela n'empêche pas Carlos Tavares de s'insurger dès qu'il le peut contre le parti pris technologique de « technocrates ». Il estime que la technologie thermique n'a pas encore offert tout son potentiel de progrès en termes d'émissions de gaz. Il juge que la Commission devrait se limiter à la neutralité technologique. Oui mais Bruxelles ne veut pas réduire les émissions de CO2, il veut les réduire à zéro. « Seule la voiture électrique offre cette possibilité », lui répond-on.
Il dénonce alors une analyse qui ne tient pas compte de l'ensemble du cycle de production de la voiture électrique que ce soit dans la production de batteries, et le bilan environnemental désastreux de l'exploration des terres rares comme le cobalt ou le lithium, ou encore, la production d'électricité dans certaines pays qui est encore trop carbonée comme l'Allemagne (40% au charbon).
Carlos Tavares toujours aussi virulent...
Interrogé par des journalistes en marge de la conférence de présentation du plan stratégique mardi 1er mars, le patron de Stellantis a rappelé qu'il n'avait absolument pas changé d'avis sur la question de la voiture électrique en dépit de ses annonces très volontaristes en la matière.
« Il manque une approche à 360 degrés de la voiture électrique qui analyse son bilan du puit à la route (...) aujourd'hui, nous constatons que la question de l'énergie nous revient à la tête », a-t-il déclaré.
« Il y a deux semaines, j'ai pris connaissance d'une nouvelle étude interne sur la comparaison entre voiture électrique et thermique, et celle-ci montre qu'il faut rouler 85.000 kilomètres en voiture électrique pour être aussi efficace que le thermique », a-t-il souligné.
Mi-janvier, il avait estimé dans une interview aux Echos qu'il fallait rouler 70.000 km. Dans cette même interview, il avait indiqué qu'une voiture électrique coûterait 50% plus cher qu'une voiture thermique.
« Nous allons nous retrouver avec des voitures électriques trop chères et qui roulent avec une énergie pas assez propre » a-t-il résumé. Enfin, il a reproché l'absence de stratégie harmonisée « a minima » au niveau européen. Ainsi, si Carlos Tavares n'est pas homme qui change d'avis comme de chemises, c'est également un industriel qui sait se montrer extrêmement pragmatique.
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