Congrès HLM : face aux multiples crises, la Caisse des dépôts revoit son arsenal de dispositifs

A l'occasion du 82e congrès HLM organisé à Lyon, la Caisse des dépôts a annoncé la mise en place d'un nouveau dispositif de prêt à taux fixe pour faire en sorte que les bailleurs sociaux passent le cap de 2023, jusqu'à une amélioration de situation prévue en 2024. Objectif: viser "le long terme", malgré les crises actuelles et la hausse du taux du livret A. La Caisse prévoit aussi le renforcement de l’enveloppe éco-prêt existante et des projets plus expérimentaux sur la rénovation profonde. Explications.
(Crédits : ERIC GAILLARD)

"Nous sommes confrontés à pas moins de cinq crises : la guerre en Ukraine, l'inflation, la crise énergétique, le dérèglement climatique et la remontée des taux d'intérêts", a résumé Éric Lombard, directeur général de la Caisse des dépôts, lors de son discours à l'occasion du 82e congrès HLM, à Lyon.

Autant de crises qui risquent de ralentir la production et la rénovation de logements sociaux. La Caisse des dépôts a ainsi annoncé lors de ce congrès un certains nombre de dispositifs, nouveaux ou renforcés, pour en minimiser l'impact.

Un nouveau prêt pour faire face à la hausse du livret A

La hausse du taux d'intérêt du livret A, passé de 1% à 2% inquiète les bailleurs sociaux. En effet, ils contractent auprès de la Caisse des dépôts des prêts qui sont indexés sur ce taux. Mais cette dernière se veut rassurante et se positionne sur le long terme. "On pense que cette hausse n'est pas terminée, mais on pense comme l'État que ce mouvement d'inflation et de hausse des taux du livret A est un mouvement transitoire", avance Eric Lombard.

Le directeur général parle d'"une bosse" à passer jusqu'en 2023, avec "atterrissage" prévu pour 2024. "On ne va pas se retrouver durablement avec des taux élevés", affirme Eric Lombard. Dans son étude Perspectives, la Banque des territoires prévoit une "projection du taux du livret A de long terme [qui] reste inchangée par rapport à l'étude de l'année dernière, à 1,5 %."

Une hausse des taux qui se lisse sur le long terme donc et qui met un an avant de se traduire, même si la récente hausse de 1% va tout de même coûter "1,4 milliard d'euros de charges supplémentaires sur les comptes des organismes."

Si la perspective à long terme semble plus apaisée, il y a quand même une nécessité d'agir maintenant. "Cette hausse des taux du livret A nous impacte, mais ne remet pas en cause notre action", souligne Emmanuelle Cosse, présidente de l'Union sociale pour l'habitat, organisateur du congrès.

Pour faire face à cette hausse, la Caisse de dépôts a donc lancé, en août 2022, un nouveau prêt PLUS Horizen, garanti cinq ans à taux fixe de marché qui se réindexe ensuite sur le taux du livret A +0,60%, "sur une deuxième phase de 30 ans minimum" sachant qu'en zone tendue - là où la demande de logements est supérieure à la demande - ce financement pourra aller jusqu'à 80 ans.

Selon Kosta Kastrinidis, directeur des prêts de la Banque des territoires, "c'est un produit transitoire, concessif", fléché vers la construction qui sera ouverte jusqu'à fin 2023. Une enveloppe d'un milliard est consacré à ce nouveau prêt.

"Si [ce prêt] avait vu le jour plus tôt ça aurait été plus favorable, mais on est déjà contents de l'avoir. C'est utile qu'on se prépare au pire et de réfléchir à des dispositifs si le livret A augmente encore dans ces prochaines années", a réagi Emmanuel Cosse.

Six milliards d'euros pour l'éco-prêt

En plus de ce nouveau prêt, la Caisse des dépôts mobilise aussi ses forces sur la rénovation énergétique du parc et la construction. "Notre diagnostic, ce n'est pas tant un choc de trésorerie sur le secteur. Le vrai enjeu, c'est le besoin d'investir plus que d'habitude et l'échéance de la loi Climat et Résilience qui a un effet ciseau avec la hausse des coûts. Sur le long terme, tout ça est absorbable, il faut lutter contre l'attentisme", a ajouté Kosta Kastrinidis.

La crise énergétique et le réchauffement climatique qui font aller à marche forcée vers la sobriété."44% des logements sociaux sont aujourd'hui en étiquette C ou supérieur, cela veut dire que nous en avons 56% à réhabiliter d'ici 2050, soit trois millions de logements, pour répondre aux objectifs de la stratégie nationale bas carbone", selon Emmanuelle Cosse. Les logements classés G, F et E seront interdits à la location dès 2023, puis en 2025, 2028 et 2034.

L'enveloppe dédiée au financement de l'éco-prêt, permettant de financer la rénovation énergétique, avait déjà été abondée pour pour atteindre 4 milliards d'euros sur la période 2019-2022. Un prêt qui permettrait de financer la rénovation de 125.000 logements par an. Lors du congrès, la Caisse des dépôts a annoncé que cette enveloppe allait de nouveau être abondée pour passer à six milliards d'euros pour la période 2023-2027. Le plafond de prêt par logement devrait quant à lui passer de 22.000 à 30.000 euros. Ce dernier point est encore en cours de négociation.

Pour aider à conduire les opérations de rénovations énergétiques, la Caisse des dépôts a d'ailleurs décliné son outil Prioreno pour les bailleurs sociaux. Cet outil issu d'un partenariat déjà établi avec Engie et GRDF permet de connaître finement la consommation énergétique des bâtiments et estimer leurs surfaces solaires à l'aide de datas traitées par une intelligences artificielle. Cet outil était déjà mis à disposition des collectivités et va être accessible aux bailleurs sociaux, avec une expérimentation prévue dès 2023.

Un projet "seconde vie"

Dans le processus de décarbonation des pratiques, la "seconde vie" des bâtiments a aussi été défendue par la Caisse des dépôts lors de ce congrès. "Dans le logement social, on a beaucoup détruit et on aurait pu donner une seconde vie aux bâtiments avec une réhabilitation profonde", selon Olivier Sichel, directeur de la Banque des territoires. Cette expérimentation, menée dès 2023, devrait en redonner cinquante ans de vie à 5.000 à 10.000 bâtiments.

"Économiquement, c'est plus intéressant de raser et de reconstruire mais cela a un bilan carbone désastreux", a poursuivi Olivier Sichel. Le cadre administratif et financier n'offre pas non plus d'avantages concernant ce type de projets. Il n'y a d'ailleurs pas non plus d'agrément "seconde vie."

Ainsi, "la Banque des Territoires souhaite soutenir ces projets particulièrement coûteux avec un dispositif spécifique, qui permettra la délivrance par l'Etat d'un agrément "seconde vie" ouvrant droit aux prêts réglementés et aux avantages fiscaux dédiés à la production de logements sociaux", a annoncé Eric Lombard.

Il n'y a pas encore d'enveloppe annoncée pour ce projet, pour l'instant à cheval entre les aides pour le neuf et les rénovations éligibles à l'éco-prêt.

Emmanuelle Cosse, s'est d'ailleurs adressée directement au Ministre du Logement, Olivier Klein, présent dans la salle, pour pousser ce dossier : "Je suis convaincue que si on soulève les derniers carcans, nous pourrons sortir les opérations de seconde vie dès 2023."

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