Logement social : Action Logement va investir 70 milliards d'euros dans la décarbonation de son parc immobilier

Le premier bailleur social et premier producteur français de logements sociaux va débloquer près de 8 milliards d'euros par an pour réduire de 55% son empreinte carbone d'ici à 2030 et atteindre la neutralité carbone à horizon 2040. Malgré la ponction annoncée de 300 millions d'euros sur budget, Action Logement l'assure : ces sommes sont dans « la droite ligne » des investissements existants.
César Armand

Premier bailleur social avec 1,1 million de logements sociaux réparties dans 50 filiales et premier producteur de logements sociaux (40.000 en 2021, un tiers de la production nationale), Action Logement veut accélérer dans le domaine des énergies de la décarbonation.

Ce 29 novembre, lors d'une convention nationale organisée au palais des congrès d'Issy-les-Moulineaux, l'ex-1% Logement a annoncé le déblocage de 70 milliards d'euros d'ici à 2030, soit près de 8 milliards d'euros annuels, pour réduire de 55% ses émissions carbone à horizon 2030 et atteindre la neutralité carbone à horizon 2040, soit dix ans d'avance sur l'objectif français.

« Ces investissements sont dans la droite ligne de tous nos investissements en construction et de réhabilitation », a souligné la directrice générale d'Action Logement, Nadia Bouyer, interrogée par La Tribune.

340.000 logements à rénover en huit ans

Alors que les logements G, F et E, considérés comme des passoires thermiques, vont être progressivement interdits à la location en 2023, 2025, 2028 et 2034, Action Logement veut réaliser 42.500 réhabilitations dès 2023 (+30% rapport à 2021) afin que l'intégralité de son parc immobilier soit a minima classé C en 2030. Autrement dit, 340.000 logements de catégorie G, F, E et donc D devront être rénovés en huit ans.

Parallèlement, alors que 62% de ses locataires sont encore dépendants du gaz, l'organisme paritaire administré par les syndicats et le patronat entend sortir des énergies fossiles pour le chauffage.  Et ce, en privilégiant le raccordement aux réseaux de chaleur décarbonés et en déployant de la géothermie semi-profonde (récupération de la chaleur de la terre en sous-sol grâce à une pompe à chaleur, Ndlr) et de l'autoconsommation collective.

Baisser les consommations de 10% d'ici à 2024

Un virage énergétique qu'Action Logement prend aussi dans la construction de logements. Près d'un an après l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation environnementale des bâtiments neufs dite « RE2020 », l'ex-1% Logement assure qu'il prend de l'avance : 10% de sa production est déjà aux standards écologiques de 2025, de même qu'en 2027, 50% de son parc respectera les exigences prévues pour 2028.

Sans attendre cette échéance, l'objet politico-économique qui articule les besoins des entreprises et les demandes des salariés grâce à la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) érige également la sobriété en norme durable. Conformément à l'objectif gouvernemental de baisser la consommation de 10% d'ici à 2024, Action Logement va développer l'information sur les écogestes, à coup de réunions de locataires, de campagnes d'affichage dans les halls d'immeubles, d'envois de courriers et même de suivis individuels.

300.000 m² de foncier économisés avec "Action Cœur de ville 1"

Autre annonce, cette fois plus surprenante, la contribution du bailleur social à la reconstruction de la ville sur la ville. Avec 2 milliards d'euros investis depuis 2018 dans le programme de revitalisation des villes moyennes « Action Cœur de ville », Action Logement affirme qu'il a financé la réhabilitation de 22.000 logements et permis d'économiser plus de 300.000 mètres carrés de foncier. Alors que l''Etat s'apprête à lui ponctionner 300 millions d'euros dans le budget 2023, le producteur refuse, pour l'heure, de communiquer sur sa participation financière au deuxième volet 2023-2026.

Ce dernier, comme le premier, est censé être doté de 5 milliards d'euros par l'Etat, l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) et la Banque des territoires.

Un sujet de crispations avec le gouvernement qui revenu dès les discours d'ouverture. En introduction, le président d'Action Logement - et président du Medef Grand-Est - Bruno Arcadipane a, en effet, rappelé au ministre du Logement, Olivier Klein, que le groupe avait investi 12,5 milliards d'euros en 2021, notamment dans le programme « Action Cœur de ville ». Citant le deuxième volet d'ACV, le ministre n'a pas évoqué la ponction budgétaire de 300 millions d'euros, mais lui a répondu qu'Action Logement était un « acteur essentiel » du dispositif, « les élus plaçant beaucoup d'attente dans ce programme qui a fait ses preuves et qui continuera à le faire ».

Des déclarations d'amour du Medef et de... Jean-Louis Borloo

Des propos d'Olivier Klein qui n'ont pas suffi à rassurer le président délégué du Medef. Montant sur scène juste après, Patrick Martin a fait « une déclaration d'amour à Action Logement ». « Le Medef est viscéralement attaché à ce modèle. Mon message n'est pas innocent dans le contexte du moment », a-t-il insisté, faisant une allusion à peine voilée aux volontés gouvernementales. Même l'ancien ministre Jean-Louis Borloo, invité en conclusion, est sorti de sa réserve. « Vous avez fait "Action Cœur de ville", vous avez fait Visale (la garantie logement, Ndlr), vous avez doublé la production de logements sociaux en cinq ans. c'est admirable ! », a lancé le retraité de la vie politique.

Autant de messages qui apporte du « calme » et de la « sérénité » au président d'Action Logement. En présence de l'ancien ministre et initiateur d' "Action Cœur de ville" Jacques Mézard, Bruno Arcadipane a édulcoré son discours en conférence de presse finale. « On est en train de discuter, de construire et de travailler avec les autres financeurs. Ça devrait aller. Nous sommes prêts, mais ne faisons pas les mêmes erreurs que par le passé : terminons d'abord Action Cœur de ville 1 », a-t-il affirmé.

Et de conclure, dans un sourire, « nous n'avons pas encore de budget 2023 ». En d'autres termes, la loi de finances 2023 n'ayant pas encore été définitivement adoptée par le Parlement, il peut encore négocier avec l'exécutif...

Lire aussiAttractivité: la Cour des comptes appelle à « maintenir » les moyens d'« Action cœur de ville »

César Armand

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Commentaires 2
à écrit le 30/11/2022 à 16:57
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Action logement : Un patrimoine de 1 069 957 logements (source Action Logement), et 70 milliards pour 55% de CO2 en moins soit 65 423 euros par logement. 1) d'ou sort cet argent ? 2) Comment on peut penser que des copropriétés non sociales puiss...

à écrit le 29/11/2022 à 23:41
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Ils vont détruire les logements pour planter des arbres à la place? Tant qu'il y a des habitants dans un logement la 'neutralité' carbone n'existe que comme argument marketing.

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