Revitalisation des villes moyennes : Action Logement renonce (pour l'instant) à contribuer à « Action Cœur de ville » 2

Lors du congrès des maires ce 22 novembre, Bruno Arcadipane, le président du premier bailleur social et premier producteur de logements sociaux a fait savoir au gouvernement et aux élus locaux qu'il n'était pas « en mesure d'annoncer ce que sera[it] la contribution » d'Action Logement au 2è programme « Action Cœur de ville ». Partie prenante de ce dispositif de revitalisation des villes moyennes depuis son lancement en 2018, le président national d'Action Logement, reproche à l'Etat de lui ponctionner 300 millions d'euros dans le cadre du budget 2023. Explications.
César Armand
Le président d'Action Logement, Bruno Arcadipane, également président du Medef Grand-Est.
Le président d'Action Logement, Bruno Arcadipane, également président du Medef Grand-Est. (Crédits : Action Logement)

Réhabilitation et restructuration de l'habitat en centre-ville, développement économique et commercial, mise en valeur de l'espace public et du patrimoine, accès aux équipements et services publics, telle est la quadruple ambition du programme « Action Cœur de ville ». Mis en place en mars 2018 par le gouvernement et doté de 5 milliards d'euros à travers la Banque des territoires (Caisse des Dépôts), d'Action Logement (ex-1% Logement) et de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), ce programme de l'Etat vise à revitaliser 234 villes moyennes.

Toutes sources confondues, ces communes entre 15.000 et 100.000 habitants accueillent 23% de la population française et 26% de l'emploi, mais rencontrent des problèmes de désertification des centres-villes ou concentrent des logements de moindre qualité qu'ailleurs. Depuis quatre ans, le dispositif a rencontré un tel succès auprès des maires que le président de la République a décidé, dès septembre 2021, de le reconduire jusqu'en 2026, date des prochaines élections municipales.

Une ponction de 300 millions sur le budget d'Action Logement

A la veille du congrès des maires, qui s'est ouvert ce 21 novembre, la ministre des Collectivités territoriales, Caroline Cayeux, en a dévoilé les contours : 5 milliards d'euros supplémentaires, dont 700 millions de subventions de l'Etat, vont être débloqués au service de la transition écologique, du recyclage des friches et contre l'étalement urbain. De la même façon que le périmètre d'évolution : « Action Cœur de ville » 2 concernera aussi les quartiers de gare et les entrées de ville.

Outre CDC Biodiversité et La Poste, nouvelles parties prenantes, le gouvernement compte sur ses partenaires historiques pour boucler ce budget colossal. Sauf que tout ne se passe pas comme prévu. Lors d'un discours prononcé au congrès des maires ce 22 novembre, en présence d'élus et de la ministre, le président d'Action Logement a fait savoir qu'il n'était pas « en mesure d'annoncer ce que sera la contribution » de l'ex-1% Logement au dispositif. En cause : une ponction de 300 millions d'euros sur son budget inscrite dans la loi de finances 2023 et déjà adoptée, par 49-3, dans la version de l'Assemblée nationale.

« C'est d'autant plus regrettable car nous œuvrons avec vous les maires sur le terrain pour le développement économique, environnemental et social de vos villes. Chaque euro investi par Action Logement génère 3 euros d'investissements publics ou privés », a cinglé Bruno Arcadipane, également président du Medef Grand-Est.

L'ex-1% Logement a investi 2 milliards d'euros depuis 2018

D'autant que pour la première version d'« Action Cœur de ville », Action Logement affirme avoir investi 2 milliards d'euros - soit 500 millions de plus que prévus - dont 1,227 milliard d'euros pour 22.000 logements livrés ou en cours de production. Ni établissement public ni entreprise privée, l'ex-1% Logement est le premier bailleur social et premier producteur d'habitats sociaux et intermédiaires français. Organisme paritaire administré par le patronat et les syndicats, cet objet politico-économique hybride articule les besoins des entreprises et les demandes des salariés grâce à la participation à l'effort de construction - la PEEC - que chaque employeur doit verser.

Présent dans la salle, le président du Medef est monté sur scène pour rappeler ce message aux parlementaires, d'autant que le Sénat examine actuellement le budget 2023 en séance publique.

« Aidez-nous à continuer à faire des logements et à financer "Action Cœur de ville" 2 », a lancé le patron des patrons Geoffroy Roux de Bézieux.

 « Il faut préserver Action Logement, c'est l'un des rares outils qui fonctionne », lui a répondu, en petit comité, le député (Renaissance) de la 2ème circonscription du Val-d'Oise, Guillaume Vuilletet.

Juste après, ni Caroline Cayeux, ministre des Collectivités territoriales, ni Gil Avérous, président (LR) de l'association Villes de France, qui représente ces 232 communes de 10.000 à 100.000 habitants, n'ont cependant réagi à ces propos d'estrade. Tour et à tour, l'ex-maire (Divers droite) de Beauvais et l'édile (LR) de Châteauroux se sont simplement félicités qu'« Action Cœur de ville » ait fait gagner 17% de nouveaux habitants dans ces 232 villes moyennes.

 L'ANAH prudente, 800 millions d'euros supplémentaires pour la "Caisse"

Outre Action Logement, l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) finance, à hauteur de 1,2 milliard d'euros, « Action Cœur de ville » depuis 2018. Dans le public, son président Thierry Repentin s'est montré très prudent sur sa participation au deuxième volet.

« Je ne suis pas inquiet mais j'attends le bleu budgétaire [le document officiel de Bercy, Ndlr]. Je suis comme Saint-Thomas, je ne crois que ce que je vois », a confié le maire (PS) de Chambéry (Savoie) à La Tribune.

Quant à la Caisse des Dépôts, qui mobilise 1,7 milliard d'euros - 1 milliard en fonds propres et 700 millions en prêts -,  son engagement grimpe à 2,5 milliards d'euros, affirme son directeur général délégué Olivier Sichel à La Tribune. La filiale dédiée au logement, CDC Habitat, va mettre sur la table 1,2 milliard d'euros pour 8.000 logements dans 70 villes en France métropolitaine et dans les Outre-Mer. La Banque des territoires apportera, elle, 700 millions d'euros de prêts, 500 millions d'investissements en fonds propres - elle sera actionnaire - et 90 millions de subventions en ingénierie.

« Un euro de la Banque des territoires génère 7 euros d'investissements publics ou privé », assure Olivier Sichel, interrogé sur l'effet de levier.

La balle est dans le camp de Bercy

Si l'exécutif veut finaliser ce budget de 5 milliards d'euros, la balle est désormais dans le camp de Bercy. Action Logement a écrit une lettre en ce sens au ministre de l'Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique Bruno Le Maire et au ministre des Comptes publics Gabriel Attal.

Aussi longtemps que le sujet de la ponction de 300 millions d'euros « ne sera pas clarifié », « nous serons dans l'incapacité de nous prononcer », conclut la directrice générale Nadia Bouyer. Vaste programme...

César Armand

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